Le très contesté appétit de Google pour les livres

  • Copié
Rédaction Europe1.fr , modifié à
Le géant de l'internet souhaite constituer une immense bibliothèque en ligne, suscitant des réactions agacées.

Passer de onze millions de livres disponibles en ligne, à plusieurs centaines de millions : voici l'ambition de Google Books, projet porté par le géant américain de l’internet, qui a fondé son succès sur sa fonction de recherche en ligne, avant de s’attaquer aux vidéos (YouTube, racheté en 2006) aux cartes (GoogleMaps).

>> Comment fonctionne le projet "Google Books" ?

Pour développer son catalogue en ligne, la firme de Mountain View a deux solutions : séduire les bibliothèques ou s’adresser aux éditeurs.

Aux bibliothèques, Google propose d’assurer gratuitement la numérisation d’une grande partie de leurs fonds, souvent anciens et qui ne sont pas tombés dans le domaine public. En échange ? Les bibliothèques autorisent Google à mettre une partie des ouvrages des numérisés à disposition sur son portail.

Aux éditeurs, qui gèrent les droits d'auteurs d'ouvrages récents, la proposition est toute autre : l'entreprise propose le partage d’une partie des recettes publicitaires engrangées grâce à la commercialisation d'espaces publicitaires sur les pages dédiées à la consultation des ouvrages. Exigence posée par le moteur de recherche vis-à-vis des éditeurs ? Une exclusivité sur l’indexation des ouvrages en ligne. Autrement dit : la possibilité de le retrouver.

>> Pourquoi parle-t-on tant de "Google Books" en ce moment ?

Le 7 octobre prochain, la justice américaine rendra une première décision sur l’accord signé entre Google et le très puissant syndicat des auteurs américains : celui-ci prévoit que l’entreprise américaine perçoive 37% des bénéfices liés à l’exploitation des ouvrages en ligne - les auteurs et éditeurs en recevant 63%. L'accord est très contesté, notamment par d'autres acteurs de l'internet, comme Amazon.

Autre actualité : le 18 août, le quotidien économique La Tribune a révélé que la très prestigieuse Bibliothèque Nationale de France (BNF) envisageait de répondre favorablement aux avances de Google. Un éventuel accord BNF-Google a aussitôt dénoncée par l’ancien président de l’institution, Jean-Noël Jeanneney : ce serait, selon lui, un "insupportable tête-à-queue".
Une première étape avait pourtant été franchie dès 2008, quand la bibliothèque de Lyon a passé un accord avec l’entreprise américaine : "Elle n'aurait pas pu s'engager sans le soutien de la BNF", affirme Alain Beuve-Méry, spécialiste de l'édition au journal Le Monde.

>> Des éditeurs en colère

Le syndicat national de l’édition française (SNE) considère que le projet de Google "n’est pas conforme au droit de la propriété littéraire et artistique".

Google veut "faire de l’argent avec nos livres" et se comporte "de façon extrêmement arrogante", accuse François Gèze, PDG des éditions La Découverte :

 

Vendredi 4 septembre, le syndicat des éditeurs italiens, sur la même longueur d'ondes que les éditeurs français, a annoncé qu'il allait "porter ses objections devant un tribunal new-yorkais".

>> Et l’Union européenne, dans tout ça ?

Le 7 septembre, Google va "expliquer" son projet devant la Commission européenne. Mais, déjà, la commissaire européenne aux télécommunications a-t-elle apporté, le 28 août dernier, un début de soutien au projet Google Books.

Viviane Reding estime que les différentes institutions publiques doivent s’allier au privé pour mener à bien le chantier de la numérisation : "Je comprends les craintes de beaucoup d’éditeurs et de bibliothèques qui se trouvent confrontés à la puissance commerciale de Google", a-t-elle notamment affirmé. Avant d'ajouter : "Mais je partage aussi la frustration de beaucoup d’entreprises Internet qui aimeraient offrir des modèles d’entreprises intéressants dans ce domaine."