Conseil d'administration cherche "femmes"

Intervention du collectif féministe La Barbe, qui dénonce le manque de femmes dans les conseils d'administration, le 7 mai 2010.
Intervention du collectif féministe La Barbe, qui dénonce le manque de femmes dans les conseils d'administration, le 7 mai 2010. © MAXPPP
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avec Pierrick Fay , modifié à
ENQUETE - Les firmes se livrent à une course pour rattraper le retard en terme de parité.

D'ici 2017, en vertu de la loi, il faudra 40% de femmes dans les conseils d'administration. Les entreprises sont par conséquent en ce moment sur le qui-vive pour rattraper le retard accumulé en terme de représentation des femmes. Car actuellement, les conseils d’administration des sociétés ne sont composés que de 15% de femmes.

"Des chasseurs de têtes" féminines

Pour recruter les 500 à 700 femmes nécessaires à la satisfaction du quota fixé par la loi, les entreprises redoublent d’attention. "Du fait de la loi, il y a eu une accélération, une espèce de vent de panique, les sociétés du CAC 40 se jettent tout de suite et se disent ‘il faut qu’on rattrape’", "c’est au premier qui aura ses femmes au conseil", comme l’explique pour Europe 1 Florence Magne, chasseuse de tête du cabinet CTPartners.

Les conseils d’administration demandent "des femmes plutôt jeunes, dans la quarantaine, des femmes qui viennent de l’étranger, et des femmes qui ont des expertises". Un "vivier qui a toujours été très large", analyse Florence Magne.

Dans le cahier des charges figurent d'autres critères très précis. La candidate doit être curieuse, intègre et indépendante. Surtout, elle doit faire preuve d'une "impertinence courtoise", c’est-à-dire qu’elle peut donner son avis, mais sans trop forcer.

Machisme et condescendance

Les conditions d’entrée seraient-elles plus sévères pour les femmes ? En tout cas, l’élitisme des conseils d’administration semble être étroitement lié à une tradition relativement misogyne. Illustration de cet état de fait, le P-DG de Deutsche Bank, Joe Ackerman, a récemment créé la polémique en Allemagne. Interrogé sur les fameux quotas de femme, le responsable a répondu que cela permettrait d'avoir des conseils "plus colorés et plus jolis". En somme, une version revisitée de ‘soit belle et tais toi ‘.

En outre, confie à Europe 1 un autre chasseur de tête, certaines entreprises n’hésitent pas à demander aux candidates des CV avec photo.

"Faire la preuve de ses compétences"

"C’est pour cette raison qu’il faut des quotas", clame de fait Victoire de Margerie, la soeur du P-DG de Total. Au micro d’Europe 1, elle témoigne du machisme ambiant qui règne dans les firmes. "Globalement, j’ai toujours eu à faire la preuve de mes compétences", fustige-t-elle.

"Il y a des moments presque drôles de temps en temps. "J’ai un président de conseil d’administration qui m’a demandé la première fois que je suis rentrée dans la salle ‘ça va, vous n’avez pas trop peur’ ? Je lui ai répondu que par rapport à l’angoisse que j’avais eue quand j’avais construit mon usine en Allemagne de l’Est, ça me paraissait assez peu angoissant d’entrer dans une salle de conseil d’administration", ironise la responsable.

De son côté, l’ancienne ministre Anne-Marie Idrac, très convoitée par les conseils, soutiendra le projet des quotas jusqu’au bout. Car, conclut-elle, "plus il y a une diversité de regards, plus c’est utile pour le chef d’entreprise".