Comment Hollande a ménagé les marchés

© REUTERS
  • Copié
avec Martial You , modifié à
Accusé d’être mauvais gestionnaire, le PS s’est employé très tôt à rassurer le monde économique.

François Hollande n’a droit à aucun état de grâce : à peine élu, le nouveau président de la République est déjà pressé par les marchés financiers, qui ont tous plongé dans le rouge dès lundi matin. Le contexte économique est certes difficile mais le socialiste va devoir affronter la crise de la dette avec un handicap de taille : l’accusation répétée à l’envie selon laquelle la gauche serait mauvaise gestionnaire et synonyme d’explosion des déficits. Depuis des mois, le camp socialiste s’est donc attaché à déminer le terrain et à rassurer le monde économique.

Hollande très attendu sur le front économique

Fuites de capitaux, bourses en chute, dégradation de la note souveraine, etc. : les détracteurs de François Hollande prédisaient le pire en cas de victoire socialiste. Le scepticisme était encore plus grand parmi les Anglo-saxons, traditionnellement très méfiants vis-à-vis du socialisme.

Pourtant, la catastrophe redoutée par certains n’a pas eu lieu. En milieu de journée, les principales bourses européennes se sont rapprochées de l’équilibre et le taux des emprunts français sont stables. Cerise sur le gâteau, l’agence de notation Standard & Poor’s a précisé lundi matin qu’elle ne compte pas dégrader la note française à court terme.

Une tournée médiatique pour déminer le terrain

Si la France n’a pas fait l’objet d’attaques sur les marchés, c’est aussi parce que François Hollande avait choisi de prévenir plutôt que de guérir. Accusé d’en vouloir au monde de la finance, le futur président a effectué une tournée dans les médias étrangers dès le mois de février avec un objectif : s’adresser à la City pour rassurer.

Le 14 février, le socialiste a ainsi accordé un entretien au quotidien britannique The Guardian au cours duquel il a justifié son souhait de mieux encadrer la finance. Tout en rassurant, se vantant "qu'aujourd'hui il n'y a plus de communistes en France. Ou plus beaucoup".

Pas de provocation à l’égard des marchés

Mi-avril, il s’est adressé cette fois-ci au quotidien économique allemand Handelsblatt pour marteler qu’il souhaitait ajouter un volet "croissance" au pacte européen de stabilité. Avec néanmoins une précision de taille : il ne conteste par la rigueur budgétaire décidée à 27.

Outre ces interviews remarquées, François Hollande a mené une campagne d’entre-deux-tours très encadrée : le candidat n’a pas fait de surenchère à gauche ni dévoilé de nouvelles promesses avec autant de dépenses à la clef. C’est donc un socialiste très sage qui s’est présenté aux médias étrangers, sans oublier que François Hollande a envoyé de nombreux émissaires dans le monde.

Ses bras-droit en service commandé

François Hollande a également chargé son équipe de multiplier les contacts pour exposer son projet. Michel Sapin, pressenti comme possible ministre de l’Economie, a ainsi rencontré personnellement les trois principales agences de notation à Paris pour présenter un premier calendrier de réformes.

Autre émissaire spécial, Emmanuel Macron s’est rendu à Londres. Cet inspecteur des finances et potentiel futur conseiller économique de François Hollande y a rencontré les principaux acteurs de la City pour faire de la pédagogie et rassurer.

Les premières mesures du futur président sont d’ailleurs tout sauf une surprise : retraite à 60 ans pour les travailleurs ayant commencé avant 18 ans, gel temporaire des tarifs de l’essence et baisse des revenus du président et du gouvernement. Pas de quoi prendre les marchés de court.