Bercy met la taxe sur l’EBE au placard

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Alexis Toulon avec Axel de Tarlé , modifié à
DECRYPTAGE - Les marges des entreprises ne seront pas taxées. Le gouvernement préfère chercher les 2,5 milliards prévus dans les bénéfices des sociétés.

Pierre Moscovici a entendu la grogne des patrons : le gouvernement abandonne le projet de taxe sur l’excédent brut d’exploitation (EBE) qui devait rapporter 2,5 milliards d’euros. Un manque à gagner dans le budget 2014 qui devrait être compensé par une hausse temporaire de l’impôt sur les bénéfices.

Bercy à l’écoute. Les « Pigeons » sont passés par là, le ministère de l’Economie et des Finances est à l’écoute des patrons. La taxe sur l’EBE limitait considérablement les capacités d’investissement des sociétés. L’EBE permet notamment d’acheter de nouvelles machines, ou de rémunérer des actionnaires. Un risque que ne peut pas prendre le gouvernement qui souhaite que les entreprises accompagnent la reprise naissante de l’économie.

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La taxe sur l’EBE c’est quoi ? Cette mesure avait été annoncée début septembre. La taxe devait être de 3% dans un premier temps. Elle a été rapportée à 1,15% puis à 1,1% avant d’être totalement supprimée. Elle concernait les entreprises dont le chiffre d’affaires était supérieur à 50 millions d’euros.  Bercy avait ensuite laissé entendre que pour ne pas pénaliser l’investissement, la taxe pourrait porter sur l’excédent net d’exploitation (ENE).

Jusqu’où taxer les bénéfices ? La taxe sur les bénéfices est plus connue sous le nom d’impôt sur les sociétés (IS). Les bénéfices des entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 7,63 millions d’euros sont taxés à hauteur de 33,33%. Dans certaines conditions de capital, la taxe tombe à 15 % sur les 38.120 premiers euros de bénéfices. C’est l’une des premières ressources de l’Etat. L’impôt sur les sociétés a rapporté 55,1 milliards d’euros à l’Etat en 2012 et devrait atteindre 67,9 milliards d'euros en 2013. Afin de compenser le manque à gagner de la taxe sur l’EBE, l’Etat va devoir augmenter le taux de l’IS d’au moins 2 points, soit 35%.

Pourquoi l’IS plutôt que l’EBE ? Dans tous les cas, l’Etat fait porter aux entreprises la charge de l’impôt. Pourtant, les patrons semblent plus satisfaits par une hausse de l’IS que par la taxation de l’EBE. Plusieurs raison à cela : le bénéfice tombe à la fin de l’exercice comptable et cet impôt existe déjà. Le bénéfice, c’est le chiffre d’affaires auquel on a enlevé les différentes dépenses. Taxer les bénéfices diminue la richesse de l’entreprise mais ne pénalise pas directement son fonctionnement. Enfin, c’est un impôt connu et déjà intégré par les patrons. La création d’une nouvelle taxe a toujours un impact psychologique négatif très important.

Concurrence fiscale. Le besoin de remplir les caisses de l’Etat pose le problème de la concurrence fiscale au sein de l’Union européenne. En l’absence d’une politique fiscale commune, chaque pays peut jouer sur l’assiette de l’impôt pour attirer les entreprises, et les capitaux qui vont avec, sur leur territoire. L’Allemagne ne taxe qu’à 15% les sociétés (majorée de 5,5% dans les ex-Länder de RDA). Le taux normal d’imposition sur les sociétés varie de 24,98% à 33,99% en Belgique, de 19 à 32,75 % selon le bénéfice au Royaume-Uni (hors Jersey, Guernesey et Gibraltar) et 12,5% en Irlande. En queue de peloton, l’Espagne, avec un impôt sur les sociétés à 35%.

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