Emploi / Carrière - Les questions à vous poser si vous voulez changer de travail

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Le gouvernement entend faciliter les réorientations de carrière. L’occasion pour nous de nous interroger sur ce qui peut nous pousser, ou nous freiner, à changer de travail.

Un projet de loi "pour la liberté de choisir son avenir professionnel". La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a présenté vendredi un texte de 67 articles pour sécuriser le parcours de tous les travailleurs, dans un monde où la notion de plan de carrière n’a plus vraiment de sens. Parmi les nombreuses mesures présentées : l’ouverture des droits au chômage, d’ici 2020, pour les salariés démissionnaires qui auront un projet de reconversion professionnelle.

Une telle mesure incite à s’interroger sur les raisons qui peuvent nous pousser à changer de travail. Comment bien prendre cette décision si lourde de sens ? Nous avons posé la question à Bérangère Touchemann, coach professionnelle et auteure du blog Coaching de carrière.

Quelles sont les questions à se poser sur son job avant même d’envisager de changer ?

Il y a trois sources principales d’insatisfaction au travail. Vous avez :

- La perte de sens, lorsque l’on a l’impression que notre travail est inutile, qu’il ne correspond pas à notre vision du monde ou qu’il ne nous apporte pas la reconnaissance que l’on estime mériter

- La perte de plaisir, avec le sentiment que l’on a fait le tour de son poste et des possibilités offertes par l’entreprise. On a alors l’impression que l’on n’apprend plus rien, que l’on est accoutumé aux tâches que l’on effectue, que cela ne nous nourrit plus.

- Enfin la perte de qualité de notre environnement relationnel, lorsque l’on ne s’entend plus avec notre hiérarchie ou nos collègues.

La première question à se poser est donc : pourquoi ai-je envie de quitter mon job ? Il s’agit d’essayer d’être aussi factuel que possible, de ne pas rester dans l’émotion, l’affect. Vous pouvez, par exemple, faire une liste, écrite, de tout ce qui ne vous convient pas. Et essayez d’identifier le ou les éléments déclencheurs de votre mal-être : un changement de manager, un déménagement etc.

Ensuite, demandez-vous s’il n’y a pas d’abord des solutions pour que cela s’améliore. Si vous êtes le seul à avoir des problèmes avec votre manager, par exemple, demandez-vous s’il n’est pas possible d’arranger les choses. Tentez de renouer la communication avec lui. Demandez-lui de lister, très factuellement, les choses qu’il vous reproche. Puis essayez de trouver une solution à deux. Et si malgré cela, vous continuez à aller au travail la boule au ventre, peut-être est-il temps de réfléchir à partir...

Dans les sources d’insatisfactions, vous ne mentionnez pas la paye. Ne doit-on pas la prendre en compte ?

Evidemment, estimer que l’on est mal payé peut être une raison de vouloir quitter son job. Surtout si l’on a des besoins particuliers, des problèmes familiaux, des projets bien précis etc. Mais la majorité de mes clients qui décident vraiment de changer de travail n’invoquent pas cet élément parmi leurs motivations. Souvent, ils sont même prêts à être payés moins pour avoir un travail qui a plus de sens.

Une fois que la décision de changer est prise, comment s’assurer que l’on ne va pas se tromper, que le nouvel emploi ne sera pas pire ?

Effectivement, une question que tout le monde se pose est : l’herbe est-elle plus verte ailleurs ? Malheureusement, on ne le saura jamais totalement avant d’avoir testé un nouvel emploi. Souvent, l’ailleurs est idéalisé et l’on se rend compte trop tard que l’on s’est trompé. Les premières questions à se poser sont donc :

- Quels sont vraiment mes objectifs ?

- Qu’ai-je envie de changer, qu’ai-je envie de garder par rapport à mon travail actuel ?

- Quel est mon idéal ? Jusqu’à quel point suis-je prêt à le sacrifier pour m’adapter à la réalité ? Un travail à 70% parfait, est-ce mieux que mon travail actuel ? Est-ce que je peux trouver mieux en l’état du marché ?

Avec de telles questions, il est possible de se faire une grille de lecture, une sorte de radar pour trier les offres d’emploi. On part de soi et on examine les offres en fonction.

Ensuite, vous pouvez aussi essayer de vous renseigner sur votre futur job. Contactez des employés sur les réseaux sociaux, Linkedin par exemple. Demandez-leur si l’ambiance et les conditions de travail sont bonnes, s’il y a des choses à savoir avant de postuler, s’ils conseilleraient le job à un ami… En gardant bien en tête que leurs réponses ne seront peut-être pas 100% objectives.

Comment surmonter la peur de l’échec ? Parfois, on peut être tenté de ne pas se lancer par peur de tout perdre, de ne pas réussir la période d’essai dans le nouvel emploi par exemple…

C’est la chose la plus difficile à faire, surtout lorsque l’ancien job nous a fait perdre l’estime de soi. Il y a la peur de ne pas réussir, celle du changement, celle de s’être trompé de voie… Ce sont d’importants facteurs de renoncement. La principale réponse à apporter à cela, c’est d’agir : refaire son CV, contacter des employés d’autres entreprises, passer des entretiens d’embauche (même si vous n’êtes pas certain d’accepter le job) etc. Cela permet de sortir de son inertie, de son ruminement, de se rendre compte que la vie existe ailleurs que dans votre entreprise… En passant un entretien, même à blanc, peut-être allez-vous rencontrer un manager sympa ? Cela peut changer votre vision des choses, cela vous fait prendre conscience de votre capacité de changement. Aussi, cela vous pousse à vous interroger sur vos compétences, à faire le point.

Une reconversion doit-elle nécessairement être conforme au plan de carrière que l’on s’est fixé avant de rentrer dans la vie active ?

Aujourd’hui, plus personne n’a véritablement de "plan de carrière", sauf peut-être les professions très "classiques" : les médecins, les avocats… Cette notion est totalement obsolète et c’est pourquoi la réforme du gouvernement encourage les gens à suivre de nouvelles formations tous les cinq ans. Aujourd’hui, on fait davantage attention à la notion de plaisir que procure un emploi, et celui-ci peut changer de nature au fil de notre vie.

En revanche, une réorientation peut être l’occasion de s’interroger sur la place de nos rêves d’enfant. Dans quelle mesure sont-ils présents dans notre carrière ? J’ai une cliente qui, suite à un plan social dans son entreprise, a décidé d’ouvrir une école de danse. Cela va peut-être échouer, mais au moins, elle aura essayé.