Un spectacle sur un texte de Charb annulé à Lille et refusé en Avignon

Le spectacle est tiré d'un texte posthume de Charb, contre "les escrocs de l'islamophobie".
Le spectacle est tiré d'un texte posthume de Charb, contre "les escrocs de l'islamophobie". © AFP
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avec AFP
Le spectacle, tiré d'un texte posthume de Charb, a été annulé à Lille par crainte de débordements. À Avignon, il a été refusé pour des raisons artistiques. 

Un spectacle dénonçant "les escrocs de l'islamophobie", tiré d'un texte posthume de Charb, a été annulé à Lille par crainte de débordements et refusé par deux salles du Festival off d'Avignon pour des raisons artistiques.

"Une censure sécuritaire". Les responsables du spectacle, le comédien et metteur en scène lillois Gérald Dumont et la directrice des ressources humaines de Charlie Hebdo Marika Bret, ont dénoncé une "censure sécuritaire" rejoints par la Licra mardi. Gérald Dumont a déjà présenté une quinzaine de fois en public la "Lettre aux escrocs de l'islamophobie qui font le jeu des racistes", publiée après la mort de Charb dans la tuerie qui a fait 12 morts au siège de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015.

Crainte de débordements à Lille. Elle devait être présentée mardi 21 mars dans une salle qui appartient à l'université Lille 2, avec la participation de Marika Bret, à l'origine de la publication du livre. "Quand le président de la faculté a su que je venais, il a tout annulé. Il craignait des débordements", a déclaré Marika Bret. "Ma philosophie c'est d'ouvrir les portes", s'est défendu le président de Lille 2 Xavier Vandendriessche dans La Voix du Nord. "Mais j'ai craint les débordements, le climat et l'ambiance sont si lourds (...) Je sais qu'on est un peu complice en agissant de la sorte et ça m'emmerde, mais j'ai préféré annuler ou plutôt reporter."

Refusé à Avignon... Marika Bret espérait également fêter les 25 ans de Charlie Hebdo en Avignon avec ce spectacle et des débats, à l'occasion du Festival cet été. L’événement a été proposé à deux théâtres, l'Entrepôt et la Manufacture, qui l'ont refusé.

... pour des raisons artistiques. Dans une lettre envoyée à la ministre de la Culture, Audrey Azoulay, aux élus des régions Hauts de France et Paca, ainsi qu'à plusieurs directeurs de théâtres, Marika Bret et le metteur en scène dénoncent une "censure sécuritaire". "Nous taxer d'autocensure est indigne. Nous n'avons aucune leçon à recevoir en terme de prise de risque", a déclaré Pascal Keiser, directeur de La Manufacture à Avignon, qui programme cette année un spectacle sur l'affaire Merah et un autre sur la radicalisation islamique. "Ce spectacle n'a pas été déprogrammé, il n'a tout simplement pas été retenu", explique-t-il. "Le dossier du spectacle était très succinct, trois pages, pas de vidéo, et nous n'avions pas de possibilité d'aller le voir. Nous avions des doutes sur la qualité artistique du spectacle (...) On n'allait pas faire du Charlie pour faire du Charlie, pour le buzz."

Même explication du côté de L'Entrepôt. "Je ne vois pas en quoi on doit se justifier de ne pas retenir un spectacle", a répondu la directrice Michèle Addala. "Nos choix sont à la fois poétiques et politiques, la proposition ne nous convenait pas." La Licra a par ailleurs estimé que la déprogrammation de ce spectacle à Lille "n'est pas une simple annulation : c'est un acte de censure, de lâcheté et de trahison de nos valeurs", dans un communiqué.