Alain Finkielkraut 2:08
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Le philosophe et essayiste Alain Finkielkraut, qui publie "L'après littérature" pour dénoncer ce qui s'apparente selon lui à un basculement du monde vers une disparition de la "belle" littérature, était l'invité jeudi matin d'Europe 1. Souvent considéré par ses détracteurs comme un réactionnaire, lui réclame le droit à la nostalgie.
INTERVIEW

Alain Finkielkraut n'aime pas le monde qui change et ne se prive pas de le dire. Il l'a répété encore une fois, jeudi matin, dans Europe Matin. L'Académicien, qui publie L'après littérature chez Stock, se dit "très attristé par l'évolution à laquelle [il] assiste". En cause, selon lui, la multiplication "d'idéologies" devenues "inquiétantes" et la disparition de la littérature, supplantée par, notamment, un rap qui ne lui plaît guère. Et le philosophe de réclamer le droit d'être conservateur.

"Plus notre monde s'enlaidit, moins on a le droit de regarder en arrière"

"Je suis très étonné de cette criminalisation de la nostalgie", explique-t-il notamment. "C’est une disposition fondamentale de l’âme humaine et on a l’impression que plus notre monde s’enlaidit, moins on a le droit de regarder en arrière." Lui demande "un peu d'humilité" à notre époque, qu'il compare aux précédentes. "Quelques fois, la comparaison ne joue pas en notre faveur." Alain Finkielkraut explique notamment, sans en donner une raison précise, qu'il ne "pourrait plus vivre" dans le 10e arrondissement et "ne pourrait plus être" dans "beaucoup de lieux en France", "étant donné les gens qui y vivent". 

"Il suffit d'aller à Roubaix, à Manosque, à Forcalquier, à Tarascon...", énumère Alain Finkielkraut. "Je crois qu'il y a un droit fondamental à la continuité historique, et ce droit est mis en péril aujourd'hui." S'il ne mentionne pas explicitement l'immigration ou l'islam, l'Académicien semble s'y référer. "Toute une partie de l'opinion refuse de le prendre en compte, y voit une crispation nauséabonde et, se faisant, fait le jeu de certains extrémistes dont [elle a] peur, dit-elle, mais auxquels elle abandonne cette inquiétude."

"Nouveau féminisme" et "anti-racisme" l'inquiètent

Ce n'est pas là sa seule source d'inquiétude et de nostalgie. Deux autres "idéologies" mettent Alain Finkielkraut très mal à l'aise : le "nouveau féminisme" et "l'anti-racisme". "L'anti-racisme est devenu un système d'explication du monde avec d'un côté le mâle blanc, coupable de tous les maux, et de l'autre côté l'intersectionnalité de ceux qui en souffrent." Pour lui, "c'est une manière de ne pas voir la réalité, de s'aveugler". Citant la journaliste et essayiste Mona Chollet, qui s'attache dans ses travaux à décortiquer les mécanismes de ce qui constitue, selon elle, la domination patriarcale, Alain Finkielkraut estime qu'elle "habite dans une réalité parallèle".

La preuve, selon Alain Finkielkraut ? "Aujourd'hui les femmes ne ferment plus leur gueule, elles sont indépendantes financièrement, elles peuvent divorcer quand elles veulent." Le philosophe n'a peut-être pas lu l'enquête nationale sur les violences envers les femmes en France qui fait référence, dans laquelle les femmes qui viennent de se séparer déclarent être trois, voire quatre fois plus victimes de violences conjugales que les autres.