La Contagion des grands écrans

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CINEMA - Contagion rompt avec les codes du "film de virus", longtemps synonyme de série B.

Un réalisateur oscarisé, une galerie d'acteurs de premier plan, une sélection au festival de Venise et une critique très enthousiaste. Voilà qui n'est pas courant pour un "film de virus". Tous les éléments caractéristiques de ce sous-genre sont bien présents dans Contagion, sorti mercredi : un patient zéro, les premiers décès, des personnes en panique, des autorités aux abois... Mais la forme a muté. Dix ans après la sortie de Traffic, Steven Soderbergh réalise un nouveau film-chorale avec un élément d'actualité. C'est presque une redite (de qualité) pour le réalisateur américain, mais c'est une grande nouveauté pour le "film de virus", qui n'avait jamais visé le grand public jusqu'ici, à l'exception d'Alerte !, sorti en 1995.

Regardez la bande-annonce de Contagion :

Contagion, la bande-annonce officiellepar Europe1fr
Affiche préventive de "28 semaines plus tard"

© 20th century fox

Loin du classicisme de Contagion, la plupart des films de virus sortis depuis le début du siècle s'appuient en effet sur le potentiel horrifique de la thématique pour servir des séries B, parfois réchauffées, souvent survitaminées. Le virus se marie ainsi régulièrement (et harmonieusement) avec le personnage du zombie, comme dans le diptyque 28 jours plus tard/28 semaines plus tard (2002 et 2007) ou le film d'horreur espagnol Rec (2007). Des zombies, il n'y en a pas dans Contagion. A peine Steven Soderbergh s'autorise une petite scène gore, au détour d'une autopsie.

Mais, dans cette scène, comme dans tout le film, c'est l'ultra-réalisme qui prime, que ce soit dans les situations, les lieux ou les personnages. Contagion adopte le style du documentaire et s'éloigne ainsi des canons du "film de virus de science-fiction", comme le classique L'armée des douze singes de Terry Gilliam, sorti en 1995.

Un filon porteur pour le cinéma

Le début du siècle a fourni à Soderbergh les éléments d'actualité sur lesquels il s'est appuyé pour Contagion. "Nous sommes partis du Sras (syndrome respiratoire aigu sévère) apparu en 2002 et 2003 à Hongkong", explique le cinéaste dans un entretien au Figaro. "Pendant un an, nous nous sommes documentés auprès du Centre pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) et de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en essayant de déterminer quelle est la première question que l'on se pose dans ce type de cas. (...)  Alors que nous finissions le premier jet du script, la grippe H1N1 est arrivée." Psychose planétaire, enjeux politico-financiers autour des vaccins, réquisition des salles de sport : la réalité a alors rejoint la fiction.

Affiche de The Crazies (930x620)

© Overture films

Le virus H1N1 l'a montré : la globalisation des échanges anéantit toute barrière de protection. L'industrie du cinéma, toujours aussi prompte à capter les peurs actuelles, l'a compris. Et l'une des phrases d'accroche de Contagion le dit bien : "Personne n'est immunisé contre la peur"... Depuis quelques années, le virus nourrit ainsi de nombreux scénarios (Les fils de l'homme (2006), Blindness (2008), La planète des singes : les origines (2011), la série "24 Heures chrono") ou constitue le cœur du film lui-même, comme dans Infectés, sorti l'an dernier, ou The Crazies, remake du film de George A. Romero, sorti en 1973.

The Crazies version 2010 a d'ailleurs été monté sous l'égide des studios Participant Media et Imagination Abu Dhabi, que l'on retrouve également derrière Contagion en association avec le géant Warner Bros. Le budget total de Contagion s'élève à 60 millions de dollars, soit 44 millions d'euros, preuve que les gros studios n'hésitent plus à investir dans le virus, une peur ancestrale que la science est loin d'avoir fait disparaître. La Contagion ne fait sans doute que commencer...

Contagion, un film Europe 1, actuellement au cinéma. Retrouvez la bande-annonce, les interviews sur notre page spéciale.