Kemel, socialiste pris entre deux Fronts

Pour contrer avec le poids médiatique de ses adversaires, Philippe Kemel sillonne le terrain, sur de son fait.
Pour contrer avec le poids médiatique de ses adversaires, Philippe Kemel sillonne le terrain, sur de son fait. © MAXPPP
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A Hénin-Beaumont, le candidat PS lutte contre Mélenchon et Le Pen, des candidats "de cinéma".

Philippe Kemel a beau se présenter dans la circonscription la plus médiatisée des élections législatives, la 11e du Pas-de-Calais, sous les couleurs du PS de surcroît, il reste pour le grand public un inconnu. Le maire de Carvin, deuxième ville du territoire derrière Hénin-Beaumont, peine logiquement à exister entre deux mastodontes politiques, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, qui, après l’Elysée, briguent tous deux le même siège à l’Assemblée nationale. Mais cela n’empêche pas l’élu local d’afficher sa sérénité quant à l’issue du scrutin.

Des candidats de "plateau de cinéma"

Et pour trancher avec le style détonnant des candidats des deux Fronts, de Gauche et national, Philippe Kemel, économiste de formation, arpente le terrain. "Je leur oppose ce que je suis, ce que je sais faire, rencontrer les habitants, les écouter", glisse-t-il à Europe1.fr. L’universitaire n’hésite pas non plus à adresser quelques piques. "Ce nouveau round de l’élection présidentielle occulte le véritable scrutin et vient sur le fond voler aux citoyens leur élection", peste-t-il, dénonçant des candidats de "plateaux de cinéma. Leurs équipes sont des metteurs en scène", attaque encore le candidat socialiste.

Sans surprise, c’est surtout l’attitude de Jean-Luc Mélenchon qui provoque l’ire de Philippe Kemel. "Jean-Luc, on lui demande de refaire de la politique. Ses dernières interventions ont montré qu’il était plus préoccupé par les socialistes que par Madame Le Pen. Qu’il n’oublie pas le combat, le bon combat", prévient le candidat socialiste. "On pensait qu’il allait porter une imagination nouvelle pour avoir des propositions qui enfin pouvaient mettre le FN en difficulté. Mais, sans doute parce qu’il se rend compte que pour lui le combat n’est pas gagné, il est obligé d’utiliser des arguments qui ne sont pas de son niveau", insiste Philippe Kemel.

 

Soutien national

Le président du Parti de gauche n’est en effet pas tendre avec son rival. Dimanche dernier, sur France 3, Jean-Luc Mélenchon avait accusé "ce militant socialiste, M. Kemel", d’avoir mis dans son propre camp "une pagaille noire en trichant lors des élections internes." Harlem Désir, numéro 2 du PS, a alors dû lui-même monter au créneau pour défendre son candidat. "Il faut éviter les polémiques, je ne permets pas à Jean-Luc Mélenchon de développer ces allégations", a riposté le leader socialiste mardi sur Public Sénat. Cette intervention montre en tout cas l’importance que place le PS dans ce scrutin. La présence annoncée de Martine Aubry jeudi en fin d’après-midi à Hénin-Beaumont en est une autre illustration.

Fort de ce soutien national, Philippe Kemel martèle son optimisme. Même un sondage Ifop pour le JDD publié le 20 mai dernier et le donnant en troisième position, derrière le candidat du Front de gauche et celle du Front national, ne semble pas entamer cette sérénité affichée. "Ma proximité et le message portant sur la nécessité de donner une majorité claire à François Hollande font que je serai en tête au premier tour. Beaucoup d’indicateurs de terrain le montrent", assure-t-il . "François Hollande est à l’Elysée, Jean-Marc Ayrault est Premier ministre, et Philippe Kemel sera à l’Assemblée nationale leur soutien sans faille", veut-il croire.

Désistement au second tour ?

"Le favori, après tout, c'est le candidat du Parti socialiste, qui détient aujourd'hui la circonscription, ce qu'oublient un peu vite les médias nationaux", confirme de son côté Bernard Dolez, professeur de sciences politiques à Paris I. D’autant qu’après quelques bisbilles, le PS local est désormais derrière son candidat, veut croire ce dernier. "Ce n’était pas gagné. Mais on a une bonne dynamique, ça fonctionne bien", jure Philippe Kemel. Même le sortant Albert Facon, élu en 2007 avec 58% des voix face à Marine Le Pen, a fini par s’incliner.

Philippe Kemel espère donc bien être en tête au premier tour. Et malgré l’échange d’amabilités, il compte bénéficier du soutien de Jean-Luc Mélenchon pour le second tour. "Si je suis en tête, il se passera ce qui se passe traditionnellement lors de ce type d’élection : le candidat  de gauche le mieux placé voit l’autre se désister en sa faveur", assure-t-il. Et si les rôles sont inversés ?  "Je serai en tête au premier tour. La question ne se pose pas", finit-il par répondre, après plusieurs secondes d’un silence éloquent.