Schmidt, l’anti-Saint-André qui fait gagner l’Irlande

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Si Philippe Saint-André a inspiré le plus souvent la défiance depuis 4 ans qu’il mène les Bleus, son homologue Joe Schmidt est le Midas du rugby irlandais, capable de faire du XV du Trèfle la deuxième nation mondiale. Les Bleus que le Néo-Zélandais a entraînés à Clermont dressent le portrait d’un technicien sans concession et obsédé par la victoire.

Au petit jeu des comparaisons, qui avait fini par lui taper sérieusement sur le système jusqu’à ce que l’Italie vienne refroidir quelque peu l’euphorie ambiante autour des hommes en vert dans cette Coupe du monde, Philippe Saint-André et son bilan depuis qu’il préside aux destinées de l’équipe de France (42,5 % de victoires : 17 victoires, 2 nuls, 21 défaites) –le pire pour un sélectionneur tricolore depuis trente ans- souffre forcément d’être évalué à la lumière des états de service de son homologue irlandais. Avant même la "finale" de la Poule D entre Français et Irlandais dimanche, à Cardiff (17h45), Joe Schmidt, certes nommé deux ans plus tard, remporte le combat face au « Goret » par K.-O. technique.

Le technicien néo-zélandais, fort de ses 75 % de victoires (18 victoires, 6 défaites), fait des merveilles depuis qu’il a été nommé en avril 2013 à la tête d’un XV du Trèfle tombé à la cinquième place du Tournoi des 6 Nations, devant la France, bonne dernière, avec notamment deux revers face à l’Ecosse et l’Italie. Deux ans plus tard et l’équipe vieillissante de l’époque, orpheline de sa star Brian O’Driscoll, s’est transformée en machine à gagner. Schmidt, déjà capable de mener le Leinster à deux titres de Champion d’Europe (2011, 2012) après avoir contribué à la conquête du Brennus avec Clermont en tant qu’adjoint de Vern Cotter (2010), est devenu le nouveau Midas du rugby irlandais. Avec à la clé deux victoires successives dans le Tournoi (2014, 2015), un doublé réussi une seule fois dans toute l’histoire de la sélection (1948, 1949).

PSA ne fait pas le poids

PSA, qui n’a mené au mieux les Bleus dans ce 6 Nations qu’à une quatrième place depuis quatre ans, ne fait pas le poids. D’autant que l’Irlande reste toujours à ce jours une équation sans réponse pour le sélectionneur tricolore, qui attend toujours sa première victoire après quatre confrontations infructueuses (2 nuls, 2 défaites). La cinquième aura donc pour cadre la Coupe du monde historiquement si peu favorable à des Irlandais qui n’ont jamais battu qu’une seule nation majeure dans la compétition, l’Australie en 2011 (15-6). 

" A Clermont, c’était un peu dur, un peu tendu au début avec lui, quelqu’un que j’ai appris à connaître. Il est très professionnel et très dur. Mais il est aussi très attachant en dehors. "

Avec un enjeu que Schmidt a su situer dès le coup de sifflet final du poussif succès sur l’Italie (16-9), qui a suffi pour envoyer Irlandais et Français en quarts de finale : "Six jours pour jouer le N°1 (Nouvelle-Zélande) ou sept pour jouer une équipe (Argentine) en grande forme". Alternative périlleuse, mais un même souci pour chacune des deux équipes d’entretenir la dynamique de la victoire. Quoi de plus normal quand on a l’obsession de "tout gagner", comme c’est le cas de Schmidt.

Une soif de victoire que confirme Morgan Parra en même temps qu’il se souvient d’un entraîneur aussi rigoureux avec ses joueurs qu’il apparaît disponible et affable avec les médias. "A Clermont, c’était un peu dur, un peu tendu au début avec lui, quelqu’un que j’ai appris à connaître, se rappelle le demi de mêlée. Il est très professionnel et très dur. Mais il est aussi très attachant en dehors." Un entraîneur des lignes arrières à l'ASM que Benjamin Kayser dépeint encore comme "très précis, très appliqué, très apprécié humainement, et très présent au quotidien." Concordant encore avec le portrait qu’en dresse Wesley Fofana révélé lors du Mondial 2011 sous les ordres de Schmidt.

"Exigeant" et "humain" à la fois

" Si je suis inquiet ? Je suis toujours inquiet. Peut-être qu'on s'est laissé bercer par nos deux premiers matches… "

"Il demande toujours énormément à ses joueurs. Il faut beaucoup donner pour le satisfaire, être concentré, toujours à 150%. À Clermont, il m’aimait plutôt bien, il me parlait beaucoup aux entraînements, il fallait que je fasse les choses parfaitement tout le temps, décrit le trois-quarts centre. C'est un entraîneur très exigeant qui aime la précision, la vitesse et la fluidité dans le jeu. Il y a bien sûr sa patte dans le jeu irlandais". Kayser prend le relais : "L’Irlande de Joe Schmidt est un bon mix entre le jeu au large et le jeu de défi, mètre après mètre, du Munster que nous avons affronté en Coupe d’Europe avec Clermont, où Conor Murray et son jeu au pied, ainsi que Paul O’Connell dans le combat, sont particulièrement importants."  Avec ce souci permanent de s’adapter à son adversaire : "C’est quelqu’un de très appliqué sur les lancements. Il va chercher chaque petit détail à exploiter et préparera toujours quelque chose en fonction", prévient Parra.    

Le match tactique avec Saint-André lui aussi a paru déséquilibré jusqu’à cette dernière sortie contre l’Italie. Suffisamment décevante pour l’inquiéter : "Si je suis inquiet ? Je suis toujours inquiet. Peut-être qu'on s'est laissé bercer par nos deux premiers matches…", dira Schmidt. Raison de plus pour se méfier du sorcier kiwi de l’Irlande. 

Europe 1 avec Sports.fr