Federer supporté comme un Français

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Nicolas Rouyer, à Roland-Garros , modifié à
ROLAND-GARROS - Le Suisse, qui a battu Simon, a bénéficié du soutien du public.

Gilles Simon (n°15) mène deux sets à un contre Roger Federer (n°2), dimanche, en huitièmes de finale de Roland-Garros. En ce début de quatrième set, le Niçois entrevoit un immense exploit : devenir le premier joueur depuis Gustavo Kuerten (Roland-Garros 2004) à éliminer le Suisse avant le stade des quarts de finale dans un tournoi du Grand Chelem. Le court Philippe-Chatrier se met alors à hurler : "Roger ! Roger !", témoignage d'une passion qui a connu l'un de ses plus beaux épisodes, dimanche. Malgré la perspective d'un quart de finale 100% français entre Simon et Tsonga (et donc d'une présence française en demi-finales), le Central, partagé et versatile, a soutenu une grande partie du temps le Suisse au cours d'un match qui a définitivement fait décoller la quinzaine (6-1, 4-6, 2-6, 6-2, 6-3). Voici pourquoi les spectateurs de Roland-Garros continuent d'encourager Federer, aimé contre un Français, aimé comme un Français.

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Pour le jeu léché. "Comme c'est Roger, tout le monde l'adore, même ici",  a souri Simon à l'issue de la rencontre. Parce que c'est "Roger", donc. Mais si un mot devait résumer le goût du public pour le Suisse, c'est bien "jeu", qu'il soit qualifié de "léché" ou de "propre". Dimanche, le "Maestro" a encore fourni quelques beaux exemples, avec plusieurs passings en demi-volée et un coup droit gagnant fabuleux qui est passé sur la droite du filet dans le premier set. Le petit Martin, casquette bleu siglée "RF", dégaine : "j'aime bien son jeu. Et il a une histoire." Comme si les autres joueurs, eux, à commencer par Simon, n'avaient pas d'histoire. Mais Federer, lui, est l'histoire. Parmi ses nombreux records, l'actuel n°3 mondial détient bien évidemment celui du nombre de victoires en Grand Chelem, avec 17 titres. Assister à un match de Federer, aujourd'hui âgé de 31 ans, est vécu comme un privilège. Et c'est pour continuer à avoir ce privilège que les spectateurs du Central l'ont autant soutenu contre Simon lorsqu'il a connu son incroyable passage à vide.

Pour le côté outsider. Quel que soit le sport, le public français a souvent du mal avec les gagnants. Alors oui, Federer est le plus grand des gagnants, mais pas à Roland. A Roland, c'est Rafael Nadal, septuple vainqueur. Federer, qui l'a emporté en 2009, sera un éternel outsider porte d'Auteuil. Car, cette année-là, il n'avait pas battu Nadal (éliminé en huitièmes de finale par Robin Söderling) et parce qu'aussi, il a perdu quatre finales contre le Majorquin (trois de rang entre 2006 et 2008 et en 2011). Alors, plutôt que le jeu "du fond du court" de Nadal et son côté métronomique, on préfère le côté artiste de "Fed", plus imprévisible. Capable de dominer son sujet, comme dans le premier set dimanche, mais aussi de perdre totalement le fil dans les deux suivants, Federer est un être aussi gracile que fragile. Sa chute sur le point qui a permis à Simon de revenir à 3-3 dans le deuxième set l'a ainsi complètement déréglé. Il a mis un set et demi à s'en remettre.

Pour le caractère posé. En plein coeur de la tempête, alors que Simon le torpillait de toutes parts, à aucun moment Federer n'a eu un mot plus haut que l'autre ou un geste d'énervement. Certains de ses supporters peuvent s'en agacer, jugeant leur héros trop apathique. D'autres y voient au contraire un calme à toute épreuve, un tempérament chevaleresque. "C'est quelqu'un qui a un bon état d'esprit, qui représente bien les valeurs du tennis", estime même Philippe. Et Nadal, il ne représente pas les valeurs du tennis ? Philippe sourit. Sa compagne vient à son secours : "ce n'est pas le même jeu…"

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Pour le côté sympathique. Avec son accent chantant et son côté accessible, Federer sait s'attirer la sympathie du public. Alors que Nadal, pourtant vainqueur à sept reprises, tarde à s'exprimer en français, Federer, lui, a l'avantage d'être francophone. Il a également cette fraîcheur au micro qu'apprécient les spectateurs, comme quand il révéla, dimanche soir, ne pas se souvenir de "ses 1.000 matches", mais qu'il il se souviendra sans aucun doute de celui-ci. "Je vous remercie aussi parce que maintenant, je connais son prénom", a-t-il également ajouté, faisant référence aux "Gillou" descendus des tribunes. Federer plaît aux spectateurs de Roland, et pas seulement aux Français. Croisé à la sortie du court, un spectateur belge, Geoffroy, admet préférer le Suisse à tous ces joueurs français "qui se cherchent toujours une excuse après une défaite". Malgré la grande frayeur connue dimanche, "Fed" semble lui aimer les Français. Avant Simon, il s'était en effet débarrassé de Julien Benneteau. Et mardi, en quarts de finale, ce sera Jo-Wilfried Tsonga. Une fois de plus, le Central aura deux amours. "Ce n'est pas de ma faute, c'est le tirage au sort", a souri Federer.