Les tribulations d'un fondeur vénézuélien aux Mondiaux de ski nordique

Équilibre précaire, technique approximative... le fondeur vénézuélien a chuté à de nombreuses reprises.
Équilibre précaire, technique approximative... le fondeur vénézuélien a chuté à de nombreuses reprises. © Jonathan NACKSTRAND / AFP
  • Copié
Julien Pearce avec AFP , modifié à
Expulsé de France en janvier, un jeune skieur de fond vénézuélien voyait la neige pour la première fois lors des Mondiaux en Finlande, jeudi. Les images de sa course ont fait le tour du monde. 
VIDÉO

Expulsé de France, un skieur de fond vénézuélien a finalement pu se rendre aux Mondiaux de Lahti, en Finlande, où il a vu la neige pour la première fois et a ravi l'or de l'aventure humaine, à défaut de réaliser de grandes performances sportives.

Un calvaire de 10 kilomètres. Au Venezuela, l’or blanc, ce n’est pas la neige, mais plutôt le sable des plages. Température moyenne : environ 23 degrés.  Voilà pourquoi Adrian Solano n’avait jamais pratiqué son sport en conditions réelles. Il s’entraînait chez lui, au Venezuela, sur des skis à roulettes. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que pour sa première, le jeune homme de 22 ans a rencontré quelques difficultés. Dès le départ de la course, il est tout proche de tomber à la renverse. Il se rattrape in extremis. C’est le début de 10 kilomètres de calvaire : équilibre précaire, technique approximative, le fondeur vénézuélien chute à de nombreuses reprises, casse l’un de ses bâtons, mais fait preuve d’une rare abnégation et termine malgré tout l’épreuve un large sourire sur le visage.

"Une expérience inoubliable". "C'est une expérience inoubliable qui m'ouvre les portes d'un nouveau monde", a-t-il réagi jeudi, heureux, malgré la rudesse de l'apprentissage.

Une belle revanche sur… la police française. Les déconvenues de Solano avaient commencé fin janvier à Paris lorsqu'il avait été retenu à l'aéroport de Roissy en provenance de Caracas, soupçonné d'immigration illégale par les autorités françaises, selon son récit. "Quand je suis arrivé à Paris le 19 janvier, j'ai expliqué que j'allais en Suède pour m'entraîner. Ils n'ont pas cru que je faisais du ski au Venezuela (...) Je n'avais que 28 euros et les policiers m'ont accusé d'immigration (illégale) parce que ça se passait mal dans mon pays", a-t-il décrit.

Envoyé plusieurs jours dans un hôtel jusqu'à ce qu'il rencontre un juge pour lui "démontrer qu'il se rendait à la compétition", il a finalement été renvoyé et dû demander de l'aide au consulat du Venezuela à Paris qui lui a acheté un billet de retour. Il avait pu se rendre en Finlande grâce aux dons de généreux bienfaiteurs. "On ne peut pas tout avoir dans la vie. Les Français n'y sont pour rien, mais aux policiers qui n'ont pas cru à mon histoire, je dis : ‘Adrian Solano a fini par arriver en Finlande, et a participé à la compétition’", a-t-il indiqué.

Caracas proteste. Si l'histoire s'est bien terminée pour le fondeur, les autorités vénézuéliennes n'ont pour leur part pas digéré le traitement accordé à l'un de leurs citoyens, dont elles jugent l'expulsion "inadmissible". "Nous allons présenter une protestation au gouvernement français pour l'affront fait au sportif vénézuélien", a écrit la cheffe de la diplomatie vénézuélienne Delcy Rodriguez sur Twitter dans la nuit de mercredi à jeudi.

Et maintenant, objectif JO. Les organisateurs finlandais ont assuré de leur côté avoir eux aussi vécu une expérience inédite. "C'est la première fois que j'aide un skieur à régler ses fixations et utiliser ses bâtons", a témoigné le directeur des Championnats du monde, Jussi Prykäri. Adrian Solano va désormais retourner au Venezuela et se mettre en quête de moyens financiers pour préparer les Jeux olympiques dans quelques années.