Italie : les ultras en colère

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avec AFP , modifié à
FOOT - Les ultras de plusieurs clubs italiens critiquent certaines mesures de la Ligue italienne.
Montolivo face à la Juve (930x620)

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Le samedi 19 octobre prochain, l'AC Milan recevra l'Udinese dans un stade San Siro vide. Le club lombard, qui était dans le collimateur, a en effet été sanctionné par la Ligue de football italienne (Lega) d'un match à huis-clos en raison des chants entonnés par certains de ses supporters lors du match à Turin face à la Juventus, dimanche dernier (3-2, photo), chants qui avaient déjà entraîné précédemment la fermeture d'une partie de tribune. La Ligue reproche à ces chants non pas d'être racistes mais d'inciter à la "discrimination territoriale". L'utilisation de ce terme a entraîné un flot de réactions, la plupart du temps outrées, aussi bien chez les supporters que chez les dirigeants.

"Naples choléra", "Vésuve, lave-les tous"

Qu'ont chanté exactement le supporters du Milan incriminés ? Face à la Juve, ils ont à nouveau entonné des formules anti-napolitaines pour lesquelles ils avaient déjà été sanctionnés : "Naples choléra" ou "Vésuve, lave-les tous", en référence au célèbre volcan situé à côté de la ville de Campanie. Pour la Lega, il s'agit de "discrimination territoriale", un terme créé afin de mettre fin aux réflexions peu amènes opposant régulièrement le Nord (ici Milan) et le Sud (Naples). "Si je dis ce que je pense de la discrimination territoriale, c'est moi qu'on va disqualifier", s'est irrité l'administrateur délégué du Milan, Adriano Galliani. "Ça n'existe qu'en Italie. (...) L'UEFA parle de discrimination raciale, mais l'autre (la discrimination territoriale), nous nous la sommes inventée tout seuls ! Si je m'en prends à ceux de Porta Romana (un quartier de Milan, ndlr), moi qui suit de Brera, est-ce de la discrimination territoriale ? Le racisme est grave, mais la discrimination territoriale, franchement, non."

Les ultras de Milan partagent cette opinion. "Qu'il soit bien clair que personne ne considère inutile la loi contre toute forme de racisme", insiste le communiqué de la "Curva Sud" milanaise : "le problème est justement dans "toute forme", on passe de la condamnation d'un phénomène, le racisme, que nous trouvons inacceptable, à l'impossibilité d'être potache, acide et même à l'occasion mal éduqué."

Quelques heures avant de reprendre leurs chants anti-napolitains, les supporters rossoneri avaient reçu le soutien inattendu des supporters de Naples eux-mêmes. Lors de la réception de Livourne au stade Sao Paolo (4-0), dimanche après-midi, les tifosi ont eux-mêmes repris ce chant et installé une banderole sur laquelle était écrit "Naples choléra", accompagnée d'une autre : "allez-y, fermez notre virage".

Supporters de Milan (930x620)

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Les supporters de l'AC Milan ont salué cette "auto-ironie, qui défie les soi-disant experts et leur montre à quel point ces accusations sont ridicules". Peut-être plus fort encore, les supporters du rival historique de l'AC Milan, ceux de l'Inter Milan, ont publié un communiqué dans lequel ils invitent tous les virages d'Italie à entonner "des chœurs discriminants" afin qu'on aboutisse à une "fermeture totale des stades".

Les tifosi nerazzurri proposent également des "initiatives populaires coordonnées avec d'autres tifosi et ultras, avec les tifosi de l'autre équipe de notre ville, avec nos rivaux historiques et avec quiconque prend la mesure de cette stupéfiante tentative d'imposer à nos esprits un conformisme hypocrite". Cette menace d'une fronde généralisée semble effrayer le président de la Ligue italienne. "Évitons de donner les clefs des stades à ces irresponsables", a plaidé sur la Rai Maurizio Beretta, craignant un "chantage" : "nous avons toujours été en première ligne sur le thème de la discrimination raciale, mais ce mécanisme de sanctions (...) risque de laisser les équipes et le championnat aux mains de quelques irresponsables et agitateurs."

Banderole anti-ch'tis, 930

En France aussi, plusieurs chants ou banderoles du même type ont défrayé la chronique ces dernières années. L'exemple le plus célèbre reste la banderole déployée par des membres de l'ancien Kop de Boulogne lors de la finale de la Coupe de la Ligue 2008 opposant le PSG à Lens (2-1) : "pédophiles, chômeurs, consanguins : bienvenue chez les Ch'tis". Les supporters lensois présents dans le stade avaient immédiatement rebondi sur cette banderole avec un chant ironique. Mais le message des ultras parisiens ne fit pas rire du tout les autorités politiques et sportives françaises, qui n'ont pas eu besoin de la notion de "discrimination territoriale" pour condamner le PSG.