Aulas: "Un accident de parcours"

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Propos recueillis par SYLVAIN LABBE , modifié à
Alors qu'OL groupe, dont dépend l'OL, accuse un déficit de 35,6 millions d'euros pour l'exercice écoulé, Jean-Michel Aulas, comme à son habitude, fait face. Avec un budget bâti sur l'hypothèse d'un podium en championnat et d'un quart de finale en Ligue des Champions, "JMA" ne doute pas que Puel et ses hommes ont toujours les moyens de viser le titre. Et voit loin avec la perspective d'un OL Land désormais bien lancée...

Alors qu'OL groupe, dont dépend l'OL, accuse un déficit de 35,6 millions d'euros pour l'exercice écoulé, Jean-Michel Aulas, comme à son habitude, fait face. Avec un budget bâti sur l'hypothèse d'un podium en championnat et d'un quart de finale en Ligue des Champions, "JMA" ne doute pas que Puel et ses hommes ont toujours les moyens de viser le titre. Et voit loin avec la perspective d'un OL Land désormais bien lancée... Président, pensez-vous être le club français n°1 en termes de pertes financières sur la saison dernière ? Les autres clubs français n'ont pas communiqué à ce sujet, à la différence de l'Olympique Lyonnais. Nous, nous avons les moyens de publier nos résultats financiers sans avoir à en rougir parce que sur les cinq dernières années, les bénéfices enregistrés pendant cinq ans (71 millions d'euros en cumul, source OL) sont très supérieurs aux pertes annoncées mardi. Ça mérite le respect et là, on est assurément premier en France, mais même je peux le dire premier en Europe. Comment expliquer ces pertes significatives ? Il s'agit d'un incident de parcours. Elles sont dues d'une part au contexte général, les clubs français sont en grosses difficultés (en déficit de 180 millions d'euros). D'autre part, le marché des transferts, qui cette année s'est avéré moins pertinent que les précédentes pour l'Olympique Lyonnais, a inversé la tendance sur cet exercice. Il s'agit d'un exercice déficitaire accidentel puisque les six précédentes années étaient celles d'une série éminemment profitables. Ce résultat négatif montre que tous les clubs, même Lyon, peuvent avoir des résultats déficitaires. Même en ayant disputé une demi-finale de Ligue des Champions ? Même en ayant disputé une demi-finale de Ligue des Champions. Je crois que ce qui est important dans le modèle des clubs européens et donc français, c'est qu'aujourd'hui seuls les clubs propriétaires de leurs stades s'en sortent, des stades dans lesquels on peut avoir beaucoup de spectateurs, mais des stades qui offrent surtout une structure d'accueil, qui permettent un certain nombre de ressources. "Inquiétant pour la plupart des clubs français" Est-ce que ce contexte défavorable vous inquiète à court ou à moyen terme ? Inquiétant pour la plupart des clubs français, c'est clair parce qu'on a subi la suppression du DIC, qui n'a fait qu'accroitre l'incertitude. Je crois que l'avenir, c'est d'une part avoir des stades, mais aussi avoir des fonds propres. L'Olympique Lyonnais a un petit peu plus de 130 millions de fonds propres, qui lui permettent de résister quand il y a un certain nombre de difficultés. Et puis avoir aussi des actionnaires qui jouent le jeu, l'OL va solliciter une émission d'obligations sur le marché (à hauteur de 25 millions d'euros) pour renforcer ces fonds propres. L'OL est crédible puisqu'il négocie actuellement la capacité à pouvoir travailler de manière compétitive en ayant une capacité d'endettement plus importante. L'avenir est certainement plus difficile, mais ceux qui auront fait les investissements nécessaires en joueurs, avec des stades, auront certainement raison, comme c'est le cas du Real Madrid ou d'Arsenal, qui ont des résultats financiers très brillants. Dans ce contexte, investir 22 millions d'euros sur Yoann Gourcuff, est-ce une prise de risques ? C'est toujours une prise de risques. Les investisseurs, dont je fais partie, ont accepté sur cette prise de risque de mettre la main à la poche et d'apporter un certain nombre de fonds pour financer cette acquisition. Lorsqu'on regarde ce qui se fait à l'étranger avec les meilleurs joueurs européens, on essaye de pouvoir traduire des initiatives sous forme de solutions pour, non seulement faire progresser Lyon parce que c'est l'objectif, mais pour faire progresser tout le football français. Si on regarde les comptes du football français au cours des six dernières années, je rappelle que l'OL a acheté pour 220 millions de joueurs à un certain nombre de clubs français. On a besoin de prendre des initiatives, on en a pris une avec Yoann Gourcuff, on va en prendre une avec un modèle de financement de notre stade qui est un modèle privé. Diriez-vous que la construction d'OL Land est devenue urgente pour l'OL ? C'est de toute façon une urgence. Avec l'Euro 2016, les choses vont s'accélérer, j'ai le plaisir de m'apercevoir qu'OL Land entre désormais dans une phase active de sa construction. Il y a toujours des gens qui vont se mettre en travers du modernisme, de la jeunesse, de l'espérance et de la création d'emplois. Nous faisons aujourd'hui exactement ce que doivent faire les entrepreneurs et les gens qui prennent des initiatives. C'est une urgence en termes de modèle, qui impose aujourd'hui d'avoir des ressources, qui ne sont pas uniquement traditionnelles de sponsoring, de droits TV, de transferts. Les ressources liées au Grand Stade sont absolument indispensables. Arsenal, qui lui-même a investi dans un modèle de nouveau stade, fait les meilleurs résultats de tous les clubs européens et pourtant, à un moment donné, tout le monde s'interrogeait pour savoir si un club de foot devait se lancer dans de tels investissements. On se rend compte aujourd'hui que c'était la bonne voie. Demain, les clubs qui n'auront pas investi dans de grands stades, qui ne seront pas situés dans de grandes villes ou qui n'auront pas la capacité à sous-tendre cette politique d'investissements auront toutes les peines à exister de manière significative. Les éventuelles indemnités de licenciement de Claude Puel ont-elles été budgétées ? Oui, bien sûr, ça fait partie des aléas. Ceci dit, il n'a pas été dit qu'on ferait un bilan de Claude Puel à fin octobre. J'ai dit qu'on ferait un bilan des résultats sportifs à fin octobre, ce qui a été traduit, comme souvent par une presse à forte connotation médiatique, par résultats sportifs, égal choix de l'entraîneur. Je n'ai pas dit ça. Nous venons de nous imposer à Nancy, où j'ai déclaré qu'il valait mieux changer de surface synthétique que d'entraîneur. Nous avons gagné avec beaucoup de réussite et il est vrai que notre meilleur match reste celui qu'on a perdu contre Saint-Etienne, donc il n'y a pas de vérité absolue liée à ce match. Il y a une série d'actions que l'on a entreprises pour faire en sorte qu'il existe plus de réactivité, plus d'optimisme et d'ouverture vers l'extérieur. On nous a reproché de ne pas l'être suffisamment. J'ai dit qu'on ferait un bilan sportif de l'ensemble des leviers qui sont les nôtres. Joueurs et staff seront concernés par ce bilan. "Un staff est toujours sous pression " Votre situation comptable (17e à 10 points du leader rennais) ne semble pas vous alarmer outre mesure... (il se saisit d'une feuille) Vous n'êtes pas sans savoir qu'un certain nombre de clubs européens sont actuellement en difficultés. Le Bayern Munich, finaliste de la Ligue des Champions, est 12e de son championnat, le Werder de Brême est 13e, il avait fini le précédent exercice 4e, Schalke 04, 2e de la dernière saison, est actuellement 17e, Stuttgart, qui était 3e, n'est que 18e actuellement, Liverpool, 5e de la Premier League, est 18e, la Juventus est 12e, la Fiorentina est 17e, la Roma 18e... Il ne vous aura pas échappé que tous ces clubs sont ceux qui comptent le plus d'internationaux, qui ont fait la Coupe du monde en Afrique du Sud et ont donc été privés de la préparation d'avant-saison. C'était notre cas avec huit joueurs en équipe de France, six qui étaient Champions d'Europe juniors, donc sur un effectif de 24 joueurs, 14 avaient raté la préparation. En plus de cela, on a eu beaucoup de blessés, on en a tiré des conclusions rapidement, non pas en changeant d'entraîneur, mais de préparateur physique au bout de quatre matches. Je rappelle aussi que Lyon est le seul club français à avoir gagné ces deux matches de Champion's League. C'était là le court terme. Il faudra gagner le troisième. Maintenant, le match le plus important du mois, c'est celui que l'on livrera contre Lille chez nous. Votre staff est-il habité par la même confiance qui est la vôtre ? Malheureusement, un staff est toujours sous pression, c'est le fruit d'un excès de médiatisation. Je n'ai pas été le premier à mettre le staff technique sous pression, c'est une oeuvre collective (rires). Quel exercice est pour vous le plus délicat: présenter un déficit comme celui de la saison écoulée ou aller au devant d'une tribune jusque dans le stade pour calmer vos supporters ? C'est plus difficile d'aller au contact du public parce que c'est quelque chose à laquelle vous n'êtes pas préparé, c'est quelque chose de très enrichissant sur le plan humain et social, mais qui comporte aussi des aléas. Les clubs de foot sont faits aujourd'hui pour créer de la joie, de l'enthousiasme et de la passion positive. Mais lorsqu'elle est négative, on a l'impression indirectement, même quand on n'est pas l'acteur, d'y avoir un peu participé et on se fait des reproches. Donc il y a plus de pression à aller au contact des supporters que d'être au contact de journalistes ou d'analystes financiers.