Une fausse victime de pédophilie écrit à 33 diocèses, seuls deux alertent la justice

En 2016, l'Eglise s'était engagée à une série de mesures pour mieux lutter contre la pédophilie.
En 2016, l'Eglise s'était engagée à une série de mesures pour mieux lutter contre la pédophilie. © Photo d'illustration : KENZO TRIBOUILLARD / AFP
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Jean-Luc Boujon édité par C.O. , modifié à
Une association a publié il y a quelques jours les résultats d'un "testing" mené auprès de 33 diocèses pour savoir si la parole des victimes de prêtres pédophiles était mieux écoutée.

Un peu plus d'un an après les mesures prises par l'Eglise contre la pédophilie, l'association lyonnaise La Parole Libérée publie les résultats d'une opération de "testing" réalisée sur la prise en charge des victimes par les diocèses. Cette association, qui avait permis de révéler plusieurs scandales de pédophilie dans l'Eglise catholique en 2015, a voulu savoir si, plusieurs mois plus tard, la parole des victimes de prêtres pédophiles était mieux écoutée. Elle a ainsi envoyé par mail un faux témoignage de victimes à 33 diocèses, entre mai et juillet dernier, aux cellules d'écoute des diocèses créées il y a un peu plus d'un an.

Un engagement des autorités religieuses. Dans ce mail, une prétendue victime âgée de 38 ans raconte avoir été agressée sexuellement par un prêtre quand elle avait neuf ans. Logiquement dans ce cas là, la cellule doit prévenir le procureur de la République comme la loi l'exige. C'était aussi l'engagement des autorités religieuses pris en avril 2016 après l'affaire de pédophilie visant le prêtre lyonnais Bernard Preynat.

Deux signalements. Mais dans les faits, les comportements sont différents : cinq diocèses n'ont pas répondu à ce mail. Et sur les 28 qui ont répondu, seuls deux ont signalé le courrier à la justice. "Ça ne fait pas beaucoup", regrette au micro d'Europe 1 François Devaux de l'association La parole libérée. "Cela pose vraiment question. On peut d'autant plus s'interroger que l'Eglise a été fortement remise en question ces deux dernières années."

La conférence des évêques dénonce le procédé. L'opération de "testing" n'a pas plu à tout le monde. La conférence des évêques de France a dénoncé le procédé par l'intermédiaire de son porte-parole, expliquant que si un évêque est mis au courant de faits de pédophilie, il doit avant tout signalement s'assurer de la vraisemblance des accusations. C'est pourtant à la justice de faire ce travail et non à l'église.

Le porte-parole assure également que l'église a pour fonctionnement d'inciter la victime à porter plainte elle-même ou, si elle ne le fait pas, de demander au prêtre de se dénoncer. Elle précise qu'elle ne fera un signalement à la justice que dans le cas où rien ne se passe. Un discours qui n'est pas recevable pour l'association La Parole libérée. Elle rappelle que ce n'est pas là dessus que l'Eglise s'était engagée il y a un an.