Un film pédagogique sur l'homosexualité, cible de la Manif pour tous

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Fabienne Cosnay , modifié à
CENSURE - Le collectif veut interdire la diffusion dans les lycées de "Ce n'est pas un film de cowboys". Contacté par Europe 1, le réalisateur préfère "s'en amuser".  

Après Tomboy, un film de cow-boys. A chaque rentrée sa polémique et son film prétendument anti-genre. Après avoir tenté début 2014 d'empêcher la diffusion sur Arte du film Tomboy - l'histoire d'une petite fille de 10 ans qui se fait passer pour un garçon - la droite traditionaliste et religieuse s'est trouvé une nouvelle bête noire avec le court-métrage Ce n'est pas un film de cowboys du réalisateur Benjamin Parent.

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Ce court-métrage, récompensé dans plusieurs festivals et sélectionné lors de la Semaine de la Critique à Cannes en 2012, raconte l'histoire de quatre adolescents qui discutent entre eux du film Le Secret de Brokeback Mountain qu'ils ont vu la veille à la télévision. L'occasion  d'échanger autour de l'homosexualité, de la différence entre les sexes, de l'égalité ou encore de la tolérance au collège et au lycée, dans le cadre du Festival du Film pour l'éducation dans les Pays-de-la-Loire et du dispositif Collège au cinéma.

Regardez Ce n'est pas un film de Cow-boys :

"Rien de pédagogique". Impensable pour les anti-mariage gay. Le 25 septembre dernier, la section Loire-Atlantique de la Manif pour tous et le collectif Vigi-Gender ont envoyé un courrier aux responsables des lycées pour demander le retrait pur et simple du film de la programmation. Dans cette lettre, les deux mouvements tradi pourfendent "un militantisme qui n'a pas sa place dans un établissement scolaire" et dénoncent un film "primé au festival du film gay et lesbien de Saint-Etienne" qui "ne traite pas d'égalité garçon-fille (et) n'a rien à faire dans un parcours pédagogique". 

Découvrez la lettre envoyée par La Manif pour tous : 

   Courrier Mpt 1

Les projections maintenues. "Si offrir des espaces de parole aux jeunes relève du militantisme, alors oui, nous sommes militants ! ", leur répond du tac au tac Sylvie Clebecq , la responsable du Festival du film de l''éducation en Pays-de-La Loire, contactée par Europe 1. Le court-métrage sera projeté, comme prévu, à Nantes, Saint-Nazaire et au Mans entre les 17 et 28 novembre. Mais le réalisateur comme les organisateurs du festival restent vigilants et veulent à tout prix éviter des débordements, le jour de la projection du court-métrage. 

Dans le département de Seine-et-Marne, où le court-métrage est mis à la disposition des profs, l'accueil réservé au film a été chaleureux. "J'ai eu un rendez-vous il y a trois semaines à Chelles, avec une quarantaine d'enseignants pour leur donner des clefs de lecture et engager des thèmes de discussion, ça s'est très bien passé", se félicite le réalisateur Benjamin Parent, contacté par Europe 1. 

"Ils n'ont même pas vu le film !". Benjamin Parent confie à Europe 1 avoir été "presque amusé" de devenir la cible de la Manif pour tous avec "qui il ne parlera définitivement jamais la même langue". "Ils n'ont même pas vu le film, mais dès lors qu'il a été primé dans un festival LGBT, ils voient ça comme un outil de propagande", déplore le cinéaste. "Quand j'ai eu connaissance de l'existence de cette lettre, j'ai d'abord trouvé ça risible, ensuite, je dois reconnaître que ça m'a inquiété, c'est révélateur d'une montée de l'obscurantisme en France", ajoute Sylvie Clebecq, qui trouve le court-métrage "bourré d'humour et de tendresse".

Accessible à tous. Pour couper court aux fantasmes sur son film et faire un pied-de-nez à ses détracteurs, le réalisateur a décidé de rendre accessible à tous son court-métrage sur Internet. "En 24 heures, il a été visionné par 6.000 internautes", se félicite Benjamin Parent. La Manif pour tous, "meilleur attaché de presse du cinéma français", relève Slate.