Six mois après l’attaque du Super U de Trèbes, clients et salariés sont toujours bouleversés : "Je ne suis plus le même qu'avant"

Aujourd’hui, lorsqu'il s’approche du Super U, Christian ne peut refréner une angoisse.
Aujourd’hui, lorsqu'il s’approche du Super U, Christian ne peut refréner une angoisse. © Martin Feneau
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Martin Feneau avec Jihane Bergaoui, édité par Clémence Olivier
Six mois après l’attaque d'un Super U, à Trèbes, dans l'Aude, clients et salariés sont encore profondément marqués. Notre reporter, Martin Feneau, est allé jeudi à leur rencontre.
REPORTAGE

Europe 1 est de retour à Trèbes, dans l'Aube, six mois après l’attaque du Super U, le 23 mars, qui a fait cinq morts, dont l'assaillant. Ici, les clients et le personnel qui étaient à l'intérieur ce jour-là sont encore profondément marqués par l'attaque et par le sacrifice du colonel Arnaud Beltram, constate notre reporter, Martin Feneau, au micro de Nikos Aliagas. Des images, des sons, les hantent toujours.

Une angoisse toujours présente. Christian, qui faisait ses courses ce jour-là et avait dû mettre sa femme et sa belle fille à l'abri dans la chambre froide du boucher avant de se cacher dans les rayons, n'arrive pas à s'enlever de la tête le regard du terroriste. Aujourd’hui, lorsqu'il s’approche du Super U, il ne peut refréner une angoisse et il lui faut plusieurs minutes avant de se décider à entrer.

"C'est un endroit oppressant pour moi. Ça me fait une drôle de sensation", confie-t-il. "Je me revois très bien, là. Il n'y avait plus de bruit, plus aucun mouvement. Il n'y avait que lui, le terroriste, avec l'otage qu'il avait pris. Quand il m'a aperçu, il est sorti en courant du bureau et il m'a crié "viens ici, viens ici". J'étais à 3-4 mètres. S'il avait tiré, il m'aurait touché".

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"Je ne peux pas". Sur les 48 salariés du magasin, une vingtaine était présente pendant l'attaque. La plupart ont repris le travail. Mais ce n'est pas le cas d'André, 35 ans d'ancienneté. Depuis ce jour, il n'est retourné qu'une seule fois sur place pour dire à son patron qu'il souhaitait démissionner. "Je ne peux pas. Ce n'est pas physiquement, c'est moralement. Même dans mon nouveau travail, j'y pense encore", glisse-t-il. "Moins j'en parle, mieux je me porte, mais au fond de moi, je ne suis plus le même qu'avant. On dirait qu'il me manque quelque chose. Il va falloir qu'un jour ou l'autre j'y remette les pieds en tant que client, que je crève l'abcès."

Un lien entre clients et salariés. Reste que depuis l'attaque, un lien particulier s'est tissé entre les clients et le personnel du Super U. L'une des habituées du supermarché, présente le 23 mars, se force à faire ses courses ici. C'est une façon pour elle de se reconstruire face à ses souvenirs mais aussi, dit-elle, de soutenir les employés qui travaillent toujours dans le magasin.