Ces adolescents se sont reconnus dans "Respire"

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Fabienne Cosnay , modifié à
L'AVIS DE - Cinq jeunes ont vu le dernier film de Mélanie Laurent, Respire. Voici leurs confidences. 

Avec Respire, son second long-métrage, Mélanie Laurent raconte une histoire d'amitié vénéneuse, dans le monde clos du lycée. Sarah est la nouvelle de la classe, solaire, magnétique. Elle choisit la douce et sage Charlie comme amie. Mais l'amitié fusionnelle vire rapidement à une dangereuse fascination.

Nous avons rencontré Julie, Margaux, Caroline, Dimitri et Aymène, cinq lycéens et étudiants. Tous ont aimé ce film dans lequel ils disent "s'être reconnus". Interviews croisées.

# L'amitié fusionnelle au lycée

Dans Respire, les deux lycéennes, Sarah (Lou de Lâage) et Charlie (Joséphine Japy), alternent dans leur relation fusionnelle des moments d'amour et de haine qui les enferment dans un psychodrame montant crescendo jusqu'à un dénouement tragique, qu'on ne dévoilera pas ici. Cette amitié fusionnelle fait écho à l'histoire de Margaux.

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"Le plus terrible, c'est qu'on ne s'en rend pas compte sur le moment. Moi j'ai vécu une amitié très passionnelle, limite étouffante. Avec Charlotte*, on ne pouvait pas passer un jour sans s'envoyer des SMS ou s'appeler. Je me suis rendu compte que cette amitié était malsaine quand j'ai changé de ville pour mes études. Charlotte n'a jamais accepté mon choix et du jour au lendemain, je n'ai plus eu de nouvelles", se souvient la jeune fille. "L'emprise d'une personne sur l'autre, ça va très vite", ajoute Caroline. Entre deux ami(e)s, il y en a toujours un(e) qui est plus soumis(e), l'amitié d'égal à égal, ça n'existe pas, estiment ces jeunes.

 

# Etre victime de harcèlement

 

Plus on avance dans le film, plus l'étau se resserre autour de Charlie. L'adolescente s'isole, ne parle plus à personne, ne s'intéresse plus à rien. Dans sa classe, sur le bureau qu'elle partageait avant avec Sarah, on a gravé le mot "pute" à côté de son prénom. Pareil sur son casier. Mais Charlie ne dit rien à personne. Ses amis, sa mère et les profs assistent, impuissants ou indifférents, à l'enfermement de l'adolescente.

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© © Jérôme Plon et Alice Dardun – MOVEMOVIE

"Le harcèlement conduit à l'isolement. Le fait d'être le bouc émissaire d'une bande pousse à se taire encore plus", confie Julie. La jeune fille se rappelle amèrement de son année de troisième. "A l'époque, j'étais très ronde et quand je montais dans le car scolaire, j'avais le droit à toute sorte d'insultes. Un jour, je n'ai plus voulu le prendre. Ma mère m'a demandé pourquoi et j'ai fini par tout lui raconter", se remémore t-elle.

 

# Le temps des confidences

 

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Trouver la bonne oreille à qui se confier n'est pas toujours évident. Aymène raconte fièrement qu'on le surnommait "le nounours" dans son collège. "Dans mon groupe, j'ai toujours été celui à qui se confient les filles quand elles ont un problème. Elles me racontent leur histoire d'amour, leur envie de mourir, parfois. A chaque fois qu'elles ont envie de parler, je suis là", confie l'adolescent.

Filles et garçons ne seraient d'ailleurs pas égaux face au harcèlement scolaire. "Un mec n'en parlera pas. Ça touche à sa virilité, à sa dignité", assure Dimitri. Julie, Margaux, Caroline et Aymène acquiescent. "Les filles sont beaucoup plus  protectrices entre elles".

# Faire partie d'une bande

La vie au lycée est faite de castes. Il y a 'les populaires' que tout le monde envie, 'les normaux' qui ne font pas parler d'eux et 'les solitaires' objets de railleries, nous détaillent Julie, Margaux, Caroline, Dimitri et Aymène. Dans le film, Sarah, la nouvelle de la classe, jette son dévolu sur Charlie. Cette dernière, fascinée, laisse tomber Victoire, sa copine d'enfance et la bande qui va avec. Mais tandis que Charlie s'éteint à petit feu victime de la perverse Sarah, celle-ci prend toute la lumière et devient la fille "cool" de la bande. "Sarah prend la place de Charlie parmi les populaires", décrypte, sérieux, Dimitri.

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© © Jérôme Plon et Alice Dardun – MOVEMOVIE

Si les catégories évoluent au fil des années, le sentiment d'avoir été du bon ou du mauvais côté, lui, ne changera jamais. "Au lycée, ce n’était pas les années les plus heureuses. J'étais fascinée par une bande. Des filles très à l’aise, qui font beaucoup de bruit dans les couloirs…", confie Mélanie Laurent.  "Je me souviens aussi de tous ces cas isolés de lycéens, qui au lieu d’être solidaires et de devenir amis, ne se parlent pas. Et qu’on appelait déjà les soi-disant losers".

 

*Le prénom a été changé

Respire, de Mélanie Laurent, avec Lou de Laâge, Joséphine Japy, Isabelle Carré et Claire Keim. En salles le 12 novembre, avec Europe 1.