Réforme du bac : pourquoi Blanquer pourrait réussir là où ses prédécesseurs ont échoué

Jean-Michel Blanquer 1280
© JOEL SAGET / AFP
  • Copié
Virginie Salmen, édité par R.Da.
Le ministre de l'Education nationale pose mercredi les bases d'une réforme du bac qui, à ce stade, n'a rencontré qu'une faible opposition.
L'ENQUÊTE DU 8H

Les premières propositions quant à la réforme du baccalauréat doivent être dévoilées mercredi. Les séries littéraires ou scientifiques devraient être supprimées purement et simplement. La mise en place d'un grand oral  pourrait également changer l'organisation des épreuves. Pour l'heure, cette refonte ambitieuse d'un examen qui fête cette année ses 210 ans n'a rencontré aucune opposition de taille. Jean-Michel Blanquer, le ministre de l'Education nationale, s'apprête-t-il a réussir ce que ses prédécesseurs ne sont jamais parvenus à faire, à savoir "dégraisser le mammouth" selon la fameuse formule de Claude Allègre ?

Une opposition silencieuse. En 2005, François Fillon, alors ministre de l'Education nationale, avait proposé d'instaurer le contrôle continu au baccalauréat avec une épreuve finale à six matières. Une mesure accueillie par des manifestations de lycéens, poussant le ministre à battre en retraite trois mois plus tard. Treize ans plus tard, il se pourrait cependant que les planètes soient alignées en faveur de Jean-Michel Blanquer. En effet, cette fois le gouvernement n'a pas d'opposition politique à affronter sur ce sujet : on n'entend plus ni le Parti socialiste ni les Républicains, ni même La France insoumise. L'opposition syndicale est également très limitée, les représentants lycéens peinant à mobiliser des jeunes "dépolitisés". Surtout, le Snes, syndicat de professeurs le plus actif dans l'affrontement, est sorti affaibli de la réforme du collège.

Un ministre déterminé... Pour l'ami d'enfance de Jean-Michel Blanquer, François Baroin, l'explication réside aussi dans la personnalité du ministre : "Il est animé de ce projet. Le fait d'en être convaincu et de l'incarner permet justement de faire passer ces messages. Ces idées de bon sens […] étaient souhaitées par une large majorité de Français, mais aussi, peut-être inconsciemment, par une partie du corps constituant ce magnifique ministère de l'Education nationale", estime le maire de Troyes.

et des esprits prêts pour le changement. Pour l'instant, Jean-Michel Blanquer s'est beaucoup adressé aux parents. Dans ses interviews, il a prononcé des mots rassurants : "autorité", "méthodes de lecture syllabique", etc. Mais concrètement, dans les classes, les profs n'ont encore rien vu changer : les portables ne sont pas interdits, personne ne porte d'uniforme et les méthodes de lecture sont toujours les mêmes. Pour Christian Chevalier, qui a dirigé le syndicat SE-UNSA pendant une dizaine d'années, le moment de vérité va arriver avec cette réforme du bac. "Je ne crois pas qu'il y ait de miracle Blanquer. Les échecs précédents ont sans doute permis à la société, à la communauté éducative et aux parents de prendre conscience qu'il faut avancer sur cette question du bac". En clair, les esprits seraient mûrs pour le changement.

Gare à l'embrasement. Un avertissement cependant : les historiens de l'éducation rappellent que les mouvements lycéens se mettent en place très rapidement. Pour la réforme du lycée sous Xavier Darcos, par exemple, ils s'étaient mobilisés en 15 jours.

Quelles pistes pour la réforme du bac ?

C'est un bac resserré à quatre épreuves, au lieu d'une dizaine actuellement, qui se profile, suivant la promesse de campagne d'Emmanuel Macron. Les candidats en passeraient deux en juin : la philosophie et un grand oral d'une demi-heure, pour défendre un projet préparé pendant l'année devant un jury de trois à quatre personnes. Cet oral compterait pour 15% de la note finale.

Les deux autres épreuves pourraient quant à elles être passées beaucoup plus tôt, dès le retour des vacances de Pâques. Elles porteraient sur les deux matières "majeures". En effet, fini les séries littéraire, scientifique et économique : les élèves auraient à choisir chacun deux matières "majeures" et deux "mineures", en plus d'un tronc commun.

Un point fâche néanmoins : les 40% de la note finale du baccalauréat acquise lors du contrôle continu, donc avec les notes du bulletin. Pour beaucoup de professeurs, de parents d'élèves et de lycéens, ce système est trop inégalitaire suivant les établissements.