Pics de pollution : les mesures prises "s'apparentent à un pansement sur une jambe de bois"

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Anaïs Huet , modifié à
Seuls les véhicules les moins polluants peuvent circuler lundi dans plusieurs villes de France, en raison de pics de pollution à l'ozone liés à la canicule. Mais les mesures prises sont largement insuffisantes, selon les défenseurs de l'environnement.
INTERVIEW

L'Île-de-France, la vallée du Rhône et l'Est du pays sont touchés par un pic de pollution à l'ozone, sous l'effet de la canicule. Dans plusieurs villes ou départements, des mesures ont été mises en place pour tenter de limiter les dégâts, à commencer par la mise en place de la circulation différenciée ou alternée. Mais pour Louis Cofflard, avocat de l'association des Amis de la terre, ces mesures, bien qu'elles soient indispensables, ne sont pas à la hauteur du risque encouru par la population et pour l'environnement.

Lutter plus fortement contre les émissions polluantes. "Ces mesures s'apparentent à un pansement sur une jambe de bois. Le pic de pollution est la partie émergée de l'iceberg", a-t-il dénoncé sur Europe 1 lundi matin. Le spécialiste explique : "L'ozone est un polluant secondaire. Il provient de polluants primaires que sont les oxydes d'azote et les composés organiques volatiles générés par le transport et l'industrie. Tant qu'on ne luttera pas contre les émissions polluantes des transports et de l'industrie, on aura des pics d'ozone. Et l'année prochaine, on en aura encore", alerte-t-il.

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Une qualité de l'air globalement très mauvaise. Louis Cofflard prône la mise en œuvre rapide d'un vaste plan, strict et intransigeant. Car il signale qu'au-delà des pics de pollution, la qualité de l'air est très mauvaise le reste de l'année, notamment dans les zones très urbaines, où la circulation est dense, ou dans les zones industrielles. "On n'est pas obligés d'avoir des pics de pollution pour que la qualité de l'air soit très mauvaise. L'urgence, c'est de prendre des plans sérieux de protection de l'atmosphère pour enrayer ces dépassements permanents, qui sont, du reste, une infraction à la législation française et européenne", souligne l'avocat.

La circulation "différenciée", comment ça marche ?

48.000 morts indirectes chaque année. Cet enjeu environnemental est aussi un enjeu de santé publique. Et pour cause, selon Louis Cofflard, la pollution de l'air "provoquerait 48.000 décès indirects par an", soit 14 fois le nombre de morts sur les routes. "Malheureusement, peut-être que les morts par la pollution de l'air se voient moins que les morts sur les routes. Cela encourage moins le gouvernement à prendre des mesures plus drastiques", avance le conseil. Pourtant, la facture est lourde pour les finances publiques. "En 2015, un rapport spécial d'une commission du Sénat a évalué à plus ou moins 100 milliards d'euros" le coût pour l'Assurance maladie, note Louis Cofflard.

Un plan sérieux et ambitieux à respecter. Pour l'avocat, le gouvernement n'est pas assez engagé sur les sujets environnementaux, et ne s'emploie pas à respecter scrupuleusement les plans de réduction de la pollution atmosphérique établis par l'Europe, la France et les régions. Dès lors, si Louis Cofflard était propulsé ministre de la Transition écologique, il sait déjà à quel chantier il s'attaquerait en priorité pour rendre à l'air sa pureté : "On refait de manière sérieuses les plans de protection de l'atmosphère, et on démontre que d'ici deux ou trois ans, on va atteindre les normes de qualité de l'air".