Payer les hôpitaux pour désengorger les urgences : cette idée qui fait débat

© BERTRAND LANGLOIS / AFP
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François Geffrier, édité par Anaïs Huet , modifié à
Le député La République en Marche Olivier Véran propose que les hôpitaux touchent entre 20 et 60 euros pour chaque patient renvoyé des urgences pour aller voir un médecin généraliste.

Va-t-on bientôt nous demander de passer notre chemin aux urgences ? Le député LREM Olivier Véran, rapporteur de la commission des Affaires sociales de l'Assemblée et lui-même médecin, a déposé un amendement visant à inciter financièrement les hôpitaux à rediriger vers la médecine de ville les patients qui se présentent aux urgences, alors que leur souci de santé serait aussi bien traité par leur généraliste.

Simple mal de gorge ou infarctus ? Les hôpitaux toucheraient entre 20 et 60 euros pour chaque patient à qui un rendez-vous aurait été proposé dans un bref délai chez un médecin de ville. La proposition doit être débattue vendredi, mais on sait déjà que la ministre de la Santé Agnès Buzyn la voit d'un bon œil.

En revanche, les professionnels semblent nettement plus sceptiques. L'idée fait même frémir le chef du service des urgences de l'hôpital Avicenne à Bobigny. "Quand un patient vient parce qu'il a mal à la gorge, ça peut être un infarctus du myocarde. Il faut faire la part des choses, il faut être médecin. Là, on ouvre la porte à des erreurs, et peut-être à une morbidité", alerte le professeur Frédéric Adnet au micro d'Europe 1.

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Une proposition "qui ne résout rien". Pour de nombreux patients, les urgences représentent souvent leur seule option pour obtenir rapidement un diagnostic. "Si les gens viennent aux urgences, c'est souvent parce qu'ils n'ont pas le choix, parce qu'ils n'ont pas trouvé de médecin généraliste en ville. Et là, on va leur dire qu'ils n'ont rien à faire aux urgences et qu'ils doivent retourner voir un généraliste. Ça ne va rien résoudre", met en garde Philippe Juven, patron des urgences de l'hôpital Georges-Pompidou à Paris, et par ailleurs élu Les Républicains.

Réduire le nombre de passages aux urgences. Le principe même d'un versement d'argent aux hôpitaux qui renvoient un patient paraît incongru à certains praticiens, même s'ils louent l'intention initiale. "Je ne suis pas sûr que cette idée de payer une absence d'acte résiste à l'expérimentation. Mais il faut le tester, car on ne peut pas continuer à avoir 21 millions de passages aux urgences par an", estime de son côté Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France. Sur ces 21 millions de passages aux urgences chaque année, 6 millions auraient pu être traités par un médecin de ville.