"Passe ton bac d’abord !" : une expression qui vient de loin

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LA PETITE HISTOIRE - Née dans la seconde moitié du 20ème siècle, la formule est restée… mais son sens a changé.
LA FRANCE BOUGE

"Passe ton bac d'abord!" Quel lycéen n'a jamais entendu cette injonction ? Apparue dans la seconde moitié du 20ème siècle, l'expression a traversé les générations. Mais aujourd'hui, elle est rarement formulée au premier degré… car le bac a perdu son statut de sésame pour la vie.

L'expression du fossé parents/enfant. La formule "Passe ton bac d'abord !" est le reflet d'une époque : celle de l'Éducation nationale d'avant 1968. Cette époque, Cabu l'a croquée dans son album "Passe ton bac après on verra!". La BD met en scène le Grand Duduche, un lycéen désinvolte et provocateur plus attiré par le dessin que par les matières académiques.

L'injonction qui lui est faite de passer son bac exprime bien le contexte d'alors : avant de le laisser s'engager dans une voie artistique incertaine, ses parents veulent qu'il ait un diplôme. A l'époque, le baccalauréat est considéré comme un sésame, une assurance de réussite professionnelle. Si l'expression fait mouche, c'est qu'elle résume tout le décalage entre les craintes et les attentes des parents et les aspirations idéalistes des ados.

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Entre ironie et inquiétude. Quelques années plus tard, avec la crise et l'apparition du chômage dans la société française, l'expression se mâtine vite d'une ironie amère comme dans le film-réalité "Passe ton bac d’abord" de Maurice Pialat qui sort en 1978. Point d'idéalisme ici : le cinéaste campe une adolescence lensoise paumée et sans illusions. "Le chômage ici ou là-bas, c'est la même chose... Moi j'quitte le bahut, j'en ai marre !", maugrée un des personnages dans le film où il est finalement assez peu question du bac… sauf dans la bouche de parents inquiets et déstabilisés.

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Passe ton bac d'abord - Bande Annoncepar CinemaMonAmour

Et maintenant ? La proportion de bacheliers sur une génération est passée de 3 % en 1945, à 25 % en 1975 pour atteindre 77,3% en 2014. Le diplôme ne distingue donc plus vraiment celui qui le décroche. Au contraire, c'est plutôt celui qui n'a pas le bac qui est montré du doigt. "Le bac est symboliquement de plus en plus faible, mais il est de plus en plus nécessaire paradoxalement. Tous ceux qui ne l’ont pas sont pénalisés", relevait ainsi le linguiste Alain Rey dans une interview en 2013. Ainsi, si l'expression "passe ton bac d'abord" perdure - souvent sur un mode humoristique - le bac n'a plus le même statut : le diplôme qui était perçu comme un Graal est devenu un minimum requis. "Et donc au niveau de l'objectif, tu vises un bac+5 ?", se voit ainsi demander une lycéenne dans le documentaire de David André "Chante ton bac d'abord" sorti en 2014. Les temps ont changé, l'expression, elle, même détournée, est restée.

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