Les procureurs veulent une loi pour encadrer les remontées d'informations

Les remontées d'informations du parquet jusqu'à la garde des Sceaux ont été mises en lumière mercredi par "Le Canard Enchaîné" .
Les remontées d'informations du parquet jusqu'à la garde des Sceaux ont été mises en lumière mercredi par "Le Canard Enchaîné" . © DAMIEN MEYER / AFP
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avec AFP , modifié à
Selon le procureur de la République de Lyon, le système actuel pour que des affaires significatives fassent l'objet d'une remontée d'informations au ministère de la Justice, n'est "pas suffisant". 

Les remontées d'informations du parquet au garde des Sceaux sont "légitimes" mais doivent être "encadrées par la loi", a déclaré vendredi Marc Cimamonti, président de la conférence nationale des procureurs, qui demande une réforme constitutionnelle sur le statut du parquet.

"La remontée d'informations est légitime, mais encadrons-la pour éviter les dérives", a confié à des journalistes le procureur de la République de Lyon, à l'issue de la conférence nationale des procureurs au Palais de justice de Paris. "Il est important que des affaires significatives fassent l'objet d'une remontée d'informations au ministère de la Justice, mais le système actuel n'est pas satisfaisant parce que cette remontée n'est encadrée que par des circulaires", a-t-il poursuivi. "Il faut l'encadrer par la loi pour en prévoir les critères", selon ce procureur.

"Restituer" la remontée d'informations "dans une approche plus large". Les remontées d'informations du parquet jusqu'à la garde des Sceaux ont été mises en lumière mercredi par Le Canard Enchaîné qui affirme que Jean-Jacques Urvoas, quand il était ministre de la Justice, a envoyé une note de la Direction des Affaires criminelles et des Grâces (DACG) à son "ami" Thierry Solère sur l'enquête le concernant. La DACG, qui fait le lien entre le garde des Sceaux et le parquet, avait sollicité le procureur général de Versailles afin d'obtenir les informations demandées, selon l'hebdomadaire satirique. Mais "il faut restituer" cette question des remontées d'informations "dans une approche plus large", selon Marc Cimamonti : "la question de la réforme constitutionnelle du parquet". Il appelle notamment à revoir les conditions de nomination des procureurs. "Le pire serait le statu quo. Nous souhaitons une réforme constitutionnelle", a-t-il dit.

La subordination du parquet "conforme à la Constitution". Le Conseil constitutionnel a jugé le 8 décembre "conforme à la Constitution" le texte qui définit la subordination du parquet au garde des Sceaux. Les magistrats du parquet ont encore en France un lien organique avec le pouvoir exécutif qui a le dernier mot pour leurs nominations, alors que pour les magistrats du siège, le gouvernement est tenu de suivre les avis du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), un organe indépendant. Depuis 2012, le gouvernement, qui peut nommer un magistrat du parquet contre l'avis du CSM, s'est cependant abstenu d'imposer des nominations. La ministre de la Justice Nicole Belloubet, qui est intervenue à la conférence des procureurs, a redit à des journalistes qu'elle souhaitait "aller vers plus d'indépendance de la justice" et pour cela "modifier le statut du parquet".