Le quadruple meurtre des frères Jourdain : "une affaire qui colle au cœur et à la mémoire"

  • Copié
Guillaume Perrodeau , modifié à
Chez Christophe Hondelatte, retour ce mercredi sur la terrible affaire des frères Jourdain, qui ont tué et violé quatre jeunes filles en février 1997.

C'est sans doute l'une des affaires criminelles les plus terribles de ces dernières années en France. En février 1997, Jean-Michel et Jean-Louis Jourdain enlèvent, étranglent et violent quatre jeunes filles. Une horreur qui avait bouleversé la France entière, comme le raconte Christophe Hondelatte, dans Hondelatte raconte.

Une fugue à laquelle la famille ne croit pas. Le 11 février 1997, la fête bat son plein depuis trois jours au Carnaval du Portel, dans le Pas-de-Calais. Peggy et Amélie Merlin ont rendez-vous avec Audrey et Isabelle Ruffin pour la dernière soirée de l'événement. Les quatre jeunes filles, âgées de 16 à 20 ans, profitent des festivités au milieu des convives, s'amusent, dansent et chantent. Elles ont ensuite prévu d'aller au bal d'Équihen, à trois kilomètres de là.

Le lendemain, dans la matinée, la mère de Peggy et Amélie a rendez-vous avec ses filles sur la place du Portel. Elles ne se présentent pas. Au début, Marie-Josée Merlin n'est pas inquiète. Mais la matinée passe et aucune nouvelle de ses filles. Alors elle appelle Laure Lamotte, la mère d'Audrey et Isabelle. Qui n'a pas de nouvelles de ses filles non plus. En début d'après-midi, elles décident d'aller à la gendarmerie, qui croit plutôt à une fugue. Pour les deux mères de famille, cela ne tient pas une seconde debout. Mais pourtant, deux jours vont passer sans que la police ne s'inquiète vraiment.

>> De 14h à 15h, c’est Hondelatte raconte sur Europe 1. Retrouvez le replay de l'émission de Christophe Hondelatte ici

48 heures après leur disparition, Laure Lamotte et Marie-Josée Merlin mobilisent leur entourage, qui entreprend des recherches, fouille des endroits isolés. Trois jours après la disparition des quatre jeunes filles, un premier rebondissement se produit. Un coup de fil anonyme raconte à l'une des mères des filles la présence de deux types louches, le soir du carnaval, dans une camionnette blanche à rayures vertes. Laure Lamotte et Marie-Josée Merlin alertent un journaliste local et un papier paraît le lendemain. Le début d'une résonance nationale pour cette affaire.

Pourtant, six jours après la disparition des deux fratries, des témoignages se multiplient pour dire avoir vu les quatre filles à Fréjus, Paris ou encore Outreau. Si bien que pour le procureur de la République, la piste de la fugue a tendance à se préciser. Du côté de la famille, on ne croit pas une seconde à cette hypothèse.

Une camionnette met les enquêteurs sur la piste des deux frères. L'enquête connaît alors un nouveau rebondissement. Un second coup de fil anonyme, une femme cette fois-ci, dit que la camionnette recherchée depuis plusieurs semaines appartient à deux frères : les Jourdain. La femme va d'ailleurs plus loin et annonce aux mères de famille qu'ils ont déjà été condamnés pour viol et meurtre et qu'ils habitent à Dannes, à 20 kilomètres du Portel.

Les proches s'organisent, direction la petite ville désignée où ils débutent leur enquête personnelle. Et on leur confirme en effet que les Jourdain sont des personnes peu recommandables, tous les deux condamnés pour viol et meurtre. Le lendemain du coup de fil anonyme, les gendarmes appellent les policiers pour leur signaler qu'ils ont vu une camionnette blanche avec des bandes vertes et qu'ils ont noté l'immatriculation. Les officiers se rendent immédiatement au domicile du propriétaire supposé. Il leur annonce avoir vendu la dite camionnette il y a quelques jours. À qui ? Jean-Michel Jourdain.

Les policiers arrêtent immédiatement les deux frères, ainsi que leur père et un troisième frère. Face aux policiers, Jean-Michel et Jean-Louis Jourdain sont taiseux, mais les officiers sentent bien que Jean-Louis pourrait être le maillon faible. Alors ils le travaillent, jouent sur la corde sensible de sa sœur morte et il finit par lâcher : "Il n’y a plus rien à faire pour elles, elles sont sur la plage à Sainte-Cécile."

"Les Jourdain sont des braconniers". Jean-Louis Jourdain conduit les policiers sur place, sur une dune, où les pompiers creusent et tombent sur les quatre corps, encore dans leur costume de carnaval. L'autopsie révélera qu'elles ont été étranglées toutes les quatre, ainsi que violées, sauf Isabelle.

L'issue de l'affaire bouleverse la région, d'autant plus que les frères Jourdain avaient déjà été condamnés pour des faits similaires. Dans les villes alentours, dans le Pas-de-Calais, les gens manifestent et défilent par centaines pour faire part de leur mécontentement. Le président de la République, Jacques Chirac, va même prendre la parole à la télévision pour faire part de son horreur. "Les Jourdain sont des braconniers. Cela faisait plusieurs jours qu’ils cherchaient une proie", explique l'avocat général de l'époque, Luc Frémiot. "C’est une affaire qui colle au cœur et à la mémoire", se remémore-t-il.

Quant aux deux frères, ils se rejettent la faute l'un sur l'autre. Ils parlent tous les deux d'un blockhaus où les filles auraient été gardées avant d'être tuées. La reconstitution montrera que cette version ne tient absolument pas. Tout porte à croire que les quatre jeunes filles ont été tuées dans la camionnette, les unes après les autres. "On imagine le calvaire vécu, car elles ont assisté aux meurtres et aux viols de chacune d’entre elles", indique Luc Frémiot.

Le procès ne donnera pas plus de réponse. "Dès les premiers mots, on comprend qu'ils ne parleront pas, ou qu’ils nous diront des mensonges." Jean-Michel Jourdain est condamné à perpétuité, avec 22 ans de sûreté. Son frère Jean-Louis, à la perpétuité également, mais avec une période de 20 ans de sûreté.