Le beau-frère de Jean-Claude Romand s'oppose à sa libération conditionnelle : "Il les tue une deuxième fois"

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Chloé Triomphe, édité par Thibaud Le Meneec , modifié à
Vingt-deux ans après sa condamnation à la perpétuité, le vrai-faux médecin Jean-Claude Romand a demandé sa libération conditionnelle, examinée mardi. Au micro d'Europe 1, son beau-frère demande un report.
TÉMOIGNAGE

C'est l'une des plus affaires criminelles françaises les plus incroyables du XXème siècle. En juin 1996, Jean-Claude Romand est condamné à la prison à perpétuité pour le meurtre de sa femme, de ses deux enfants et de ses parents. Vingt-deux ans plus tard, celui qui a mené une vie de vrai-faux médecin avant de commettre ce quintuple homicide en 1993 demande aujourd'hui sa libération conditionnelle, à l'expiration de la période de sûreté. Cette demande sera examinée mardi.

"Est-ce qu'il ne finirait pas le boulot ?" En attendant ce verdict, Emmanuel Crolet, le frère de la femme de Jean-Claude Romand, reste bouleversé par cette demande. "Il les tue une deuxième fois, confie-t-il au micro d'Europe 1. Nous nous préparons à ça depuis trois mois seulement. C'est un peu dur de se dire 'bon, il va sortir et puis on passe à autre chose' car pendant 25 ans, on n'est pas passé à autre chose. (…) En plus, il y a une crainte que je n'évacue pas : en ne changeant pas, qu'est-ce qu'il a dans la tête ? Est-ce qu'il ne finirait pas le boulot ?"

Deux journées tragiques, en janvier 1993. Le "boulot", ce sont les suites de ce quintuple homicide commis les 9 et 10 janvier 1993. Ce jour-là, l'homme alors âgé de 38 ans commence par tuer sa femme Florence dans le lit de leur maison familiale, dans l'Ain, avec six coups de rouleau à pâtisserie. Puis il va voir ses enfants, assis devant la télévision. Il fait monter Caroline, 7 ans, puis Antoine, 5 ans, dans leurs chambres, et les tue avec une carabine. Le lendemain, il se rend chez ses parents dans le Jura et les abat à leur tour. Seule son ancienne maîtresse échappe au massacre, grâce à ses supplications. Jean-Claude Romand rentre chez lui, gobe des barbituriques périmés et allume un incendie dans la nuit. Il ne reste en vie que grâce à l'intervention rapide des pompiers.

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"Vingt ans de mensonges" pour une double vie. C'est l'épilogue d'un mensonge qui durait depuis 1975, lorsqu'il ne s'était pas présenté à ses examens de fin de deuxième année de médecine. Au lieu de redoubler, il avait commencé à faire croire à tous qu'il avait été reçu à l'internat de Paris, puis qu'il avait décroché un poste de chercheur à l'Inserm, à Lyon. Au quotidien, Jean-Claude Romand partait le matin soi disant travailler, pour faire vivre sa famille. Il empruntait alors de l'argent à ses proches, faisant miroiter d'alléchants placements en Suisse. Dans les faits, il dépensait jusqu'à 7.000 euros par mois pour rendre crédible son personnage de notable. Son beau-frère parle de "vingt ans de mensonges, où il a berné tout le monde", jusqu'à cette tragique journée de janvier 1993, alors que ses proches allaient découvrir sa double vie.

Entendu sur europe1 :
Dans 6 mois, dans un an, dans deux ans… Qu'est-ce qui l'empêcherait d'aller sur la tombe de sa femme et de ses enfants ?

Un report, "quelque chose d'humain". "Il ne faut pas se leurrer. Fatalement, il sortira un jour", admet aujourd'hui Emmanuel Crolet. "On n'est pas contre, on ne peut pas être contre" cette libération. Mais, pas encore prêt à voir Jean-Claude Romand libéré, il souhaiterait un "report" de la date de libération pour ne pas revivre un "cauchemar éveillé". "Ce serait quelque chose d'humain parce que l'humanité, là-dedans, il n'y en a pas beaucoup", déplore le beau-frère du meurtrier.

Si la requête de Jean-Claude Romand est acceptée, mardi, Emmanuel Crolet aura une peur, née de la conviction que le vrai-faux médecin n'a pas changé en 22 ans de détention : "Qu'il puisse encore tuer. Qui peut me dire que ce n'est pas le cas ? Ça peut rester quelqu'un de dangereux parce que s'il sort dans 6 mois, dans un an, dans deux ans… Qu'est-ce qui l'empêcherait d'aller sur la tombe de sa femme et de ses enfants ? Ce jour-là, si ma mère y est, vous imaginez ?"