Intempéries : "On a manqué de culture du risque ces dernières années"

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Romain David , modifié à
Pour l'hydrologue Emma Haziza, le système de vigilance et d'alerte météorologique doit être revu face aux nouveaux types de risques climatiques.
INTERVIEW

Depuis des semaines, la France vit au rythme des alertes météorologiques. Mardi matin, 24 départements restent encore en vigilance orange, de la Bretagne aux Ardennes, en raison des précipitations orageuses et du risque d'inondations. "On a des records d'activité électrique au mois de mai, suivi par deux 'gouttes froides' qui se sont installées avec ces fameux systèmes qui se mettent en place et génèrent des dépressions successives avec potentiellement des orages colossaux et des pluies diluviennes", commente au micro d'Europe Bonjour Emma Haziza, hydrologue et présidente du centre de recherches ‘Mayane’ sur la gestion des risques inondations.

Des réactions rapides et violentes. Alors que les phénomènes de ce type se sont multipliés depuis quelques temps, cette spécialistes estime que notre système d'alerte et de vigilance atteint ses limites face à l'évolution du climat et aux réactions, toujours plus violentes, des territoires aménagés par la main de l'homme. "On a manqué de culture du risque ces dernières années", pointe-t-elle." Le système de vigilance a été créé en 2001 pour Météo-France, et pour Vigicrue en 2005. Ça commence à faire un certain temps et on voit bien que les systèmes évoluent. Aujourd'hui, le risque n'est plus sur la rivière mais sur un territoire qui va réagir extrêmement rapidement ; c'est à dire de petits cours d'eau, à sec, qui d'un seul coup vont monter de deux à trois mètres de hauteur en une heure, et toutes les routes qui sont coupées", relève Emma Haziza.

Une nouvelle cartographie des risques. "Aujourd'hui, ça n'est pas dans les zones considérées comme inondables qu'il y a le plus d'inondations, c'est sur les territoires entiers. On dépasse complètement les clivages des déterminations cartographiques que l'on avait avant", explique encore cette scientifique. "Quand on est face à ces phénomènes-là, on doit revoir complètement la manière de les gérer et de s'organiser", insiste-t-elle. "C'est la vie sociétale complète qui est remise en question et là, on a besoin d'une adaptation très rapide de la vigilance, il faut passer à un système qui permette d'alerter la population en temps réel".

"Effets domino". Alors que la fin des précipitations qui s'abattent actuellement sur l'Hexagone n'est pas attendue avant mercredi, Emma Haziza veut aussi alerter sur les conséquences de ces pluies. "Maintenant, on est face aux effets domino avec un territoire qui va réagir en cascade : la prochaine étape, c'est les coulées de boue et la mobilisation de tous les débris, ce qui peut engendrer des barrages temporaires".