Grève SNCF : un premier jour de galère qui donne le ton

Les voyageurs franciliens ont passé une journée très compliquée.
Les voyageurs franciliens ont passé une journée très compliquée. © LUDOVIC MARIN / AFP
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avec AFP , modifié à
Plus de 48% de grévistes, de nombreux trains annulés : la première journée de grève a été très suivie à la SNCF, transformant le trajet des usagers en galère mais sans faire trembler le gouvernement.

Grève SNCF, jour un. Elle était aussi crainte qu’attendue : la première journée de débrayage des cheminots, qui protestent contre la réforme ferroviaire du gouvernement a tenu toutes ses promesses, bonnes pour certains, mauvaises pour les autres. Le démarrage de la grève perlée, qui doit durer trois mois, s’est traduit par un nombre important de grévistes au sein de la SNCF et donc de nombreux trains annulés, transformant le trajet des usagers en interminable galère. Coincé entre la colère des cheminots et l’irritation des voyageurs, le gouvernement, lui, affiche sa détermination. Récit d’une journée mouvementée.

Pari réussi pour les cheminots

Avec un TGV sur huit en moyenne et un train régional sur cinq, les cheminots ont donné le ton mardi de la mobilisation contre la réforme de la SNCF. Comme l'avait anticipé la SNCF, le trafic était "très perturbé" en ce premier jour d'une grève au long cours. La direction a annoncé un taux de grévistes de 33,9% en milieu de matinée, soit moins que les 35,4% enregistrés le 22 mars. Mais parmi les "agents indispensables à la circulation des trains", le taux a atteint 48% mardi matin (contre 36% le 22 mars). Il était notamment de 77% chez les conducteurs et 69% chez les contrôleurs. Par conséquent, les perturbations étaient bien plus fortes que le 22 mars, notamment dans le Limousin, la Normandie et la région Paca.

Le chiffre de 33,9% de grévistes est remis en cause par le porte-parole de SUD-Rail, Erik Meyer, pour qui la direction "se décrédibilise complètement". "Avec 33% de grévistes, elle n'a pas été en capacité de s'organiser pour faire rouler les trains ? C'est soit de l'incompétence, soit du mensonge", assure-t-il. Il s'est réjoui de la réussite de cette première journée, estimant que le mouvement "durera". La SNCF a d’ores et déjà annoncé que le trafic sera tout aussi perturbé mercredi.

Rebelote mercredi

Le trafic ferroviaire restera "très perturbé" mercredi avec un TGV sur 7, un TER et un Transilien sur 5, selon les prévisions de la SNCF. La direction table sur les mêmes fréquences que mardi, à l'exception des TGV qui devraient être légèrement plus nombreux. Vous pouvez retrouver le détail des prévisions ici.

Des manifestations ont également ponctué la journée, dont une rassemblant plusieurs centaines de personnes à Paris. Dans la capitale, les manifestants, en majorité des cheminots de SUD-Rail et de FO, mais aussi des étudiants, des agents hospitaliers, des enseignants et des salariés d'Air France qui soutiennent le mouvement de grève, sont partis peu après 15h de la gare de l'Est en direction de la gare Saint-Lazare, sur fond de fumigènes, pétards et sirènes.

Journée de galère pour les usagers

En revanche, sur les quais, les usagers des transports en commun étaient nettement moins ravis. Il y a eu ceux qui avaient été prévenus et ont pu décaler leur voyage, une situation surtout valable sur les grandes lignes. Résultat : dans les principales gares, les voyageurs étaient parfois moins nombreux que les "gilets rouges" de la SNCF mobilisés pour leur venir en aide.

Mais sur les lignes régionales et en Île-de-France, la situation était autrement plus difficile. Dès le petit matin, les travailleurs se sont pressés sur les quais pour espérer prendre un des rares trains en circulation. Au micro d’Europe 1, Ange, agent de sécurité dans le Val-d’Oise, a raconté sa galère : "Je me suis réveillé à 3h pour pouvoir prendre le train. Je n'ai pas le choix. Dans ce domaine, on n'a pas le droit d'être en retard, car on fait l'ouverture des magasins. Habituellement, je mets 40 minutes maximum à faire le trajet. Là, je crois que j'en ai au moins pour 3 heures".

C'était la pagaille à la gare de Lyon mardi. © CHRISTOPHE SIMON / AFP

A l’heure de pointe, c’était la cohue dans les grandes gares parisiennes. Les passagers se sont massés sur les quais en attendant leur train, parfois dans la confusion. Symbole de la cohue générale observée par endroits, des voyageurs excédés par l’attente traversaient les voies gare de Lyon. Une femme est même tombée entre les rails et a dû être secourue par d’autres passagers.

Dommage collatéral de la grève à la SNCF : les automobilistes franciliens ont également passé une sale journée. Entre les conducteurs quotidiens et ceux qui ont anticipé les galères de train en prenant leur voiture ou en optant pour le covoiturage, il y avait beaucoup de monde sur les routes. Le matin, puis à la sortie des bureaux, le trafic était extrêmement congestionné autour de Paris, avec un pic à 425 kilomètres de bouchons vers 9h (contre 350 d’habitude), selon le décompte de Sytadin.

Embouteillages mardi SNCF

Le gouvernement tient bon

Au milieu de cette agitation, l’exécutif n’a pas tremblé. Le gouvernement "tiendra bon dans l'écoute, dans la concertation, dans le dialogue", a affirmé mardi sur RMC et BFMTV la ministre des Transports Élisabeth Borne. Pressée de dire si elle jugeait la grève justifiée, la ministre a répondu que, "personne ne peut comprendre", alors qu'elle a annoncé "deux mois de concertation" et des "avancées" sur l'ouverture à la concurrence, que "les syndicats ne bougent pas" et "répètent qu'ils veulent un mouvement long".

De son côté, le Premier ministre a ménagé la chèvre et le chou. "Je dois dire que j'entends autant les grévistes, qui parfois le disent avec vigueur, que ceux qui n'acceptent pas cette grève. Plus exactement que ceux qui veulent aller travailler, veulent continuer à bénéficier de leur liberté constitutionnelle d'aller et venir", a déclaré le Premier ministre lors de la séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale. "Si les grévistes doivent être respectés, les millions de Français qui veulent aller à leur travail, parce qu'ils n'ont pas le choix, parce qu'ils veulent aller travailler, doivent également être respectés", a-t-il insisté. Le cap est fixé, il ne bouge pas. Mais ce n’était que le premier jour…