Fraude à la "taxe carbone" : jugement mercredi au procès du "casse du siècle" marseillais

Le tribunal correctionnel de Paris va rendre son jugement mercredi dans l'affaire du "carbone marseillais"
Le tribunal correctionnel de Paris va rendre son jugement mercredi dans l'affaire du "carbone marseillais" © PHILIPPE HUGUEN / AFP
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avec AFP , modifié à
Après un procès qui a duré deux mois, le tribunal correction de Paris va rendre son jugement mercredi concernant l'affaire du "carbone marseillais" dans laquelle 36 personnes sont mises en cause.

Trente-six prévenus, dont une ex-prof de maths, pour un butin vertigineux : 385 millions d'euros. Le tribunal correctionnel de Paris rend mercredi son jugement au procès du "carbone marseillais", le plus important volet de la fraude à la TVA sur le marché des droits à polluer.

Un procès haut en couleur

Une tentaculaire "carambouille". Le procès, haut en couleurs, a exploré durant deux mois cet hiver les méandres de cette tentaculaire "carambouille". Avec, devant les juges, une brochette hétéroclite de prévenus : retraités, sculptrice, avocat, financier... Parmi eux, deux sont en détention provisoire : la Marseillaise Christiane Melgrani, charismatique pivot du dossier, une ancienne prof de maths au verbe haut et au bras long ; et le financier Gérard Chetrit, petit homme brun et nerveux, qui a reconnu avoir joué le rôle de "trader" de l'escroquerie.

La plus grosse escroquerie à la TVA

Une "simple" escroquerie... à 385 millions d'euros. Considérée comme une spécialité du milieu franco-israélien, la fraude à la "taxe carbone" s'était nouée entre 2008 et 2009 sur le marché des droits à polluer, alors très peu réglementé, sur le modèle d'une simple escroquerie à la TVA. Elle a coûté au total 1,6 milliard d'euros à l'État français. Plusieurs volets à 23, 146 ou encore 283 millions ont été jugés ces dernières années, mais celui-ci, avec 385 millions d'euros de TVA éludés au fisc, est le plus spectaculaire. 

 

Un réseau international. Il prend racine dans le quartier marseillais du Panier et s'étire entre une myriade de sociétés écrans et comptes offshores, d'Israël à la Nouvelle-Zélande. Les prévenus, avec "223 comptes bancaires" dans "25 pays", avaient tissé selon le Parquet national financier "en quelques semaines une toile de sociétés dans le monde entier", qu'il aura fallu "dix ans" pour dénouer.

Deux principaux prévenus

"Ma Dalton". Christiane Melgrani, 59 ans, qui fut surnommée "Ma Dalton" dans la presse, risque le plus gros : le parquet a demandé contre elle 12 ans d'emprisonnement et 10 millions d'euros d'amende. En récidive, l'ex-enseignante devenue gérante d'un piano-bar puis "ingénieure commerciale" dans une société de bâtiment avait déjà été condamnée pour trafic de drogue.

La quinquagénaire a reconnu avoir participé à une phase "test" de l'escroquerie ainsi qu'au blanchiment avec l'aide de proches, mais le PNF estime qu'elle a aussi contribué à mettre en place l'escroquerie proprement dite, commise via deux courtiers sur le marché des "quotas carbone", ce dont elle se défend. L'accusation estime en outre qu'elle a "dirigé la partition que devaient jouer les uns et les autres". Durant les débats, ses coprévenus n'ont semblé ne livrer des noms qu'avec son accord.

Gérard Chetrit, le "trader". Contre Gérard Chetrit, 48 ans, qui menait un train de vie fastueux entre Monaco, Londres et Israël avant d'être interpellé, le PNF a demandé dix ans de prison et 20 millions d'euros d'amende. Ainsi que dix ans de prison et cinq millions d'euros d'amende contre un troisième suspect clé, Éric Castiel, en fuite en Israël, "trait d'union" entre les deux premiers. Leur défense s'est employée à tenter de prouver qu'ils n'étaient pas les moteurs de la fraude. "Christiane Melgrani n'est pas la 'Marraine' que l'on vous a présentée", avait plaidé l'un de ses avocats, Pierre Bruno.

Jusqu'à sept en de prison requis contre les autres. Contre les 33 autres prévenus, soupçonnés à divers degrés d'avoir participé à la fraude ou à son blanchiment en se faisant investisseurs, gérants de paille ou intermédiaires, des peines allant du sursis à sept ans de prison ferme ont été demandées. Parmi eux, des professionnels, avocat, expert-comptable, promoteur, ont "trahi les règles du monde des affaires", avait estimé le parquet. Plusieurs prévenus, visés par un mandat d'arrêt, devraient manquer à l'appel mercredi.