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Romain David , modifié à
Au micro d'Europe 1, Christophe Soullez, le responsable de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, lève le voile sur les conclusions de l'enquête annuelle "Cadre de vie et sécurité", qui pointent pour 2018 une baisse sensible des actes de violence en France.
EXCLUSIF

L'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) publie jeudi son rapport annuel sur la délinquance en France pour l'année 2018. Or, après une année 2017 marquée par une hausse globale des violences, l'année 2018 se distingue par de fortes baisses. "En 2018, beaucoup d’indicateurs affichent des tendances à la baisse, voire des baisses très importantes, puisqu’il s’agit parfois du plus bas niveau depuis 2006", a révélé en exclusivité dans la matinale d'Europe 1 Christophe Soullez, le responsable de l'ONDRP. 

Réalisée chaque année depuis douze ans par l'Insee et l'ONDRP, l'enquête "Cadre de vie et sécurité" interroge un échantillon d’individus (15.000 entretiens) qui ont été victimes d’infractions, que celles-ci aient fait l’objet d’une plainte auprès des autorités ou pas. "Cela nous permet d’avoir des chiffres qui ne portent pas uniquement sur le taux d’activité de la police et de la gendarmerie", souligne Christophe Soullez.

Les tendances à la baisse

"Pour les vols avec menace, le nombre de victimes déclarées a été divisé par deux depuis 2006", à 166.000, relève Christophe Soullez. Dans 52% des cas, il s'agit de vols à l'arraché, et l'objet volé est majoritairement un téléphone portable. Il évoque également un plus bas historique des vols de véhicules, passé de 500.000 à moins de 200.000 l'année dernière. Les cambriolages sont également en baisse de 14% (490.000 contre 569.000 en 2017).

Les violences sexuelles ont aussi tendance à baisser en 2018, passant de 265.000 à 185.000. "Elles avaient fortement augmenté en 2017, on reste donc à un niveau fortement élevé par rapport à ce que l’on a connu entre 2006 et 2012", nuance toutefois cet universitaire. Autre constat : les victimes de violences sexuelles ou de violences au sein du couple sont majoritairement des femmes.

Les tendances à la hausse

À l’inverse, la hausse des débits frauduleux sur Internet se poursuit. Ce chiffre est en progression depuis sept ans, avec 1,2 million de victimes désormais. "Tout ce qui touche à la cyberdélinquance, à la cybercriminalité, aux arnaques sur Internet est un phénomène en augmentation depuis plusieurs années. Il y a un transfert de la délinquance, avec des individus qui pensent prendre moins de risques derrière leur ordinateur qu’en allant commettre un vol à main armée", explique Christophe Soullez.

Les violences physiques hors ménage, c’est-à-dire les violences dans la rue, sur son lieu de travail ou d’étude, sont également à la hausse, avec 693.000 victimes déclarées en 2018. "Dans la très grande majorité des cas, au moins 90% des faits, il n’y a pas d’interruption temporaire de travail qui est prononcé", précise Christophe Soullez. "On reste sur des faits de faible gravité, même si on peut juger que le niveau de victimes est très élevé dans un pays comme le nôtre."

Un écart entre la délinquance réelle, et la délinquance portée à la connaissance des forces de l'ordre

Cette enquête trahit également une forte distorsion entre ce qui est déclaré par les personnes interrogées et les plaintes réellement enregistrées par les forces de l’ordre. Par exemple, si dans 94 % des cas de vols de voiture le propriétaire va porter plainte, ce n’est quasiment jamais le cas face à une fraude en ligne. "Le taux de plainte est très faible, et d’autant plus que la victime, pour ce type de faits, n’est pas obligée d’avoir un récépissé du dépôt de plainte pour obtenir un remboursement de sa banque", explicite le chef de l'Observatoire national de la délinquance.

De même, seules 13% des victimes de violences conjugales portent plainte. "Neuf victimes sur dix ne se déplacent pas à la police ou à la gendarmerie pour rapporter les faits. Ce qui montre bien que leurs statistiques ne sont pas celles de la délinquance mais seulement de la petite partie des infractions portée à leur connaissance", conclut Christophe Soullez.