Déraillement du TGV Est : des erreurs de calcul dès la feuille de route

Le 14 novembre 2015, le déraillement de la rame d'essai avait fait 11 morts et 42 blessés à Eckwersheim dans le Bas-Rhin.
Le 14 novembre 2015, le déraillement de la rame d'essai avait fait 11 morts et 42 blessés à Eckwersheim dans le Bas-Rhin. © © FREDERICK FLORIN / AFP
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NM , modifié à
La feuille de route indiquait un freinage deux kilomètres avant une courbe, alors que, selon deux experts indépendants, il en aurait fallu trois. 

Un accident "déjà écrit", une équipe dépourvue des "compétences" nécessaires, "les lois physiques de base inconnues"… Le rapport d'étape sur le déraillement du TGV Est n'est pas tendre avec les responsables de cet essai qui a viré au drame le 14 novembre 2015 en faisant 11 morts dans le Bas-Rhin, rapporte lundi Le Parisien.

Un freinage trop tardif. Les auteurs, deux ex-ingénieurs d'Alstom qui ont livré leurs conclusions aux juges d'instruction, ciblent d'abord la vitesse choisie avant même le jour de l'essai. "L'accident était déjà écrit sur les documents en possession de l'équipe de conduite", estime le rapport. "La mise en oeuvre des consignes de freinage prévues dans les documents examinés conduisant à faire entrer le train dans la courbe de 945 mètres de rayon à une vitesse supérieure à celle du basculement (déraillement, ndlr)", précise-t-il. Selon ses deux auteurs, pour passer de 330 km/h à 176 km/h, il aurait fallu freiner trois kilomètres avant la courbe. Or, la feuille de route indiquait un freinage deux kilomètres avant seulement, et le cheminot chargé d'encadrer l'équipe a, en plus, décidé de repousser encore le freinage un kilomètre plus loin. 

Des décisions prises "à l'estime". L'équipe est ainsi directement visée par le rapport. "Elle s'est vu confier la responsabilité de décider des points d'enclenchement du freinage alors qu'elle n'en avait ni les moyens ni les compétences requises", avancent les deux experts. Ainsi, les conducteurs ont pris des décision "à l'estime, sans justification technique". "Les lois physiques de base régissant la marche du train paraissent inconnues", insiste le rapport.

Un "quasi-accident" trois jours avant. Ces conclusions sont d'autant plus lourdes de conséquences que trois jours avant le déraillement, un précédent essai avait été mené avec de gros risques à la clef, un "quasi-accident", selon le rapport d'étape, mais sans qu'aucune conséquence en soit tirée par l'équipe. Le 19 octobre dernier, deux salariés de la SNCF et un autre de la Systra - la filiale responsable des essais - ont été mise en examen pour homicides et blessures involontaires.