Crime organisé : le statut de repenti comporte "des lacunes préjudiciables"

© AFP
  • Copié
avec AFP , modifié à
Le président de la Commission nationale de protection et de réinsertion des repentis a écrit à la ministre de la Justice pour tirer la sonnette d'alarme.

Le dispositif des repentis, mis en oeuvre en 2014 pour lutter contre la criminalité organisée, comporte "des lacunes préjudiciables", estime un haut magistrat dans une lettre à la garde des Sceaux et au ministre de l'Intérieur.

Protection policière et identité d'emprunt. Un an après sa nomination comme président de la Commission nationale de protection et de réinsertion des repentis (CNPR), Bruno Sturlèse estime que le statut de repenti à la française "reste sous-utilisé" et demande dans un courrier adressé le 9 février à Nicole Belloubet et Gérard Collomb une "amélioration du dispositif législatif". Ce dispositif, qui offre notamment au repenti une identité d'emprunt et une protection policière, a passé son premier test judiciaire en mars devant les assises d'Aix-en-Provence pour le procès de l'assassinat en bande organisée d'Antoine Nivaggioni en octobre 2010 à Ajaccio.

Des lacunes "incompréhensibles". Pour Bruno Sturlèse, "tous les acteurs impliqués dans (la) mise en œuvre du dispositif s'accordent pour considérer que les textes actuels, qui sont difficilement lisibles et qui comportent de préjudiciables lacunes, sont un frein puissant". "Plus préoccupantes sont les lacunes préjudiciables, voire incompréhensibles", estime l'avocat général à la Cour de Cassation, rappelant que "certaines infractions particulièrement graves et habituelles de la criminalité organisée" ne relèvent pas du dispositif" en raison de limites légales.

Un statut sous conditions. Selon les textes, une personne ayant participé à la commission d'un acte aboutissant à la mort ou à l'infirmité permanente d'une victime, ne peut ainsi prétendre à ce statut. Pour illustrer son propos, il cite l'exemple d'"un individu qui participe à la commission d'un meurtre ou d'un assassinat dans une association de malfaiteurs et qui souhaite collaborer à l'élucidation du crime en échange de sa protection" mais qui n'est pas "éligible au statut de repenti". C'est "un véritable obstacle dans des affaires en cours touchant par exemple à la criminalité corso-marseillaise", estime-t-il. "L'opinion publique comprendrait-elle que l'individu appartenant à une organisation terroriste et qui serait disposé en échange de sa protection à dénoncer des membres de l'organisation qui prépareraient un attentat, ne puisse pas bénéficier non plus du statut de repenti", s'interroge-t-il.