Calais : le lucratif business des passeurs de migrants

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Lionel Gougelot, à Calais, avec Alycone Wemaere , modifié à
REPORTAGE - Neuf passeurs ont écopé de dix mois à six ans de prison ferme à l'issue du procès mardi à Boulogne-sur-Mer. Les autorités ont multiplié les effectifs policiers pour essayer d'en finir avec ces réseaux.

Huit Égyptiens et un Français comparaissaient mardi devant le tribunal de Boulogne-sur-Mer. Ils sont accusés d'être des passeurs qui profitent de la détresse des migrants. Pour lutter contre ces filières clandestines, des effectifs de police et de gendarmerie ont été envoyés à Calais la semaine dernière. Un journaliste d'Europe1 s'est rendu sur place.

>> Mise à jour le 29 octobre : les neuf passeurs ont écopé de dix mois à six ans de prison ferme à l'issue du procès mardi à Boulogne-sur-Mer. Les prévenus, dont certains sont étrangers, se sont également vus infliger des sanctions d'interdiction du territoire français (ITF), sauf pour l'un d'entre eux qui a un enfant en France.

Des groupes organisés. Dans les bars de Calais, les passeurs se repèrent parfois aux liasses de billets de 100 ou 200 euros qu'ils exhibent sans complexe pour payer leurs consommations. Les groupes les plus organisés sont les Albanais : ils logent dans les hôtels du centre-ville et le soir, on les voit rôder dans les parkings de la zone portuaire.

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Un manège bien rôdé. Roberto, chauffeur routier italien, connait bien le problème des passeurs : à cause d'eux, il lui est arrivé de retrouver des clandestins dans la remorque de son camion. "La nuit, j'en ai déjà vu dans le parking, ils ouvrent le camion, ils y mettent les clandestins et après ils ferment la porte", raconte-t-il. Se font-ils payer pour ça ? "Bien sûr qu'il prennent de l'argent pour ça, et les clandestins payent…"

Des passeurs qui ne font pas toujours "passer". Pour 1.000 ou 2.000 euros, parfois plus, ces passeurs guident les migrants dans le port pour déjouer les contrôles à l'embarquement des ferries. Mais Elya, réfugié érythréen, se méfie, lui, de ces mafias : "il y a des gars qui viennent dans les camps et qui vous disent qu'il faut les payer pour qu'ils vous fassent monter dans les camions mais, en fait, ils prennent l'argent et il ne font rien de ce qu'ils ont promis. Ils prennent l'argent et ils disparaissent, ce sont des voleurs!", raconte-t-il. Elya, comme beaucoup d'autres clandestins, espèrent un jour passer par leurs propres moyens.

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Les gros poissons ne sont pas à Calais. Les passeurs interpellés à Calais ne sont bien souvent que des petites mains. Les chefs de réseau se trouvent en région parisienne, en Italie ou dans les pays d'origine.

Cependant, si les autorités ont augmenté le nombre de policiers dans le port, c'est pour bien faire comprendre à ces filières d'immigration que, pour elles, Calais va devenir une impasse.