"Blue zones", ces régions qui concentrent plus de centenaires que la moyenne

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A.D
Le démographe Michel Poulain a classifié plusieurs zones sur le globe où la population vit plus longtemps. Il en a fait émerger des facteurs concordants. 
INTERVIEW

A l'heure où la France s'interroge sur la prise en charge du très grand âge et où la science repousse toujours plus les limites de la fin de vie, il existe des endroits sur la planète où le nombre de centenaires est supérieur à la moyenne, des régions appelées "blue zones". Le démographe belge Michel Poulain s'est intéressé à ces espaces particuliers. Invité dans l'émission C'est arrivé demain, il explique où l'on vit le plus longtemps et pourquoi.

Zones de forte concentration de centenaires. Pour définir ces "blue zones", le démographe est d'abord parti d'un constat. Envoyé en Sardaigne pour vérifier que la rumeur était réelle sur la longévité, il remarque une agrégation spatiale des centenaires, notamment dans les montagnes. Sur une carte vierge, il colore ces zones au crayon bleu et devient ainsi le père fondateur des "blue zones". Il a ensuite suivi deux méthodes dans d'autres territoires : "Soit on a directement un accès à l'état civil et on dépouille les actes de naissance et de décès et on fait des comptages. Soit, quand j'ai un nouveau village en tête, systématiquement, ce que je fais, c'est aller visiter le cimetière", décrit le spécialiste.

C'est avec cette dernière méthode, à l’origine guidée par l'intuition, qu'il découvre nombre de nonagénaires et de centenaires à Rhodes, à Chypre, en Crète, en Grèce... En étendant ses recherches, il en trouve en Amérique du Sud ou au Japon.

Nutrition. Ce que Michel Poulain découvre aussi, ce sont des points communs entre toutes ces zones, qui pourraient expliquer cette longévité. Le spécialiste a évacué l'aspect génétique, qui pourrait être opportun mais qui, sur une petite population, n'aurait pas apporté de conclusion probante. Il fallait donc creuser ailleurs : dans la nutrition, notamment, "en mettant en évidence deux ou trois facteurs, notamment la restriction calorique qui a marqué ces régions dans l'Histoire, le fait que ces gens ne mangent jamais plus de 80% de ce que peut contenir leur estomac et qu'ils mangent principalement des produits locaux et naturels." Michel Poulain prend l'exemple de la Sardaigne où la grande majorité de la nourriture n'est pas passée par l'industrie alimentaire.

Style de vie. S'ajoute au facteur nutritionnel celui de l'exercice physique. "Ils font leur jardin jusqu'à 90 ans sans difficulté. Ils bougent naturellement parce que dans les villages, il y a beaucoup de dénivelé." Le démographe évoque également "la solidarité à l'intérieur du village. On fait des fêtes pour les centenaires, il y a toute une logique qui donne un rôle aux centenaires dans la société que nous avons perdu dans les nôtres." Un style de vie qui s'éloigne de celui des zones très urbaines d'aujourd'hui.