Battu par sa compagne : un procès lève le tabou

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Alcyone Wemaere, avec agences , modifié à
JUSTICE - L'ex-compagne de Maxime Gaget sera jugée jeudi à Paris pour violences conjugales. Il avait raconté son calvaire dans un livre, "Ma compagne, mon bourreau".

Les victimes de violences conjugales sont majoritairement des femmes mais des hommes aussi sont battus par leur compagne. C'est l'histoire de Maxime Gaget, 37 ans, dont l'ex-petite amie sera jugée jeudi à Paris. Un procès qui met en lumière un sujet encore tabou.

Un procès pour comprendre. Battu, humilié, dépouillé, Maxime Gaget, 37 ans - qui sera l'invité d'Europe 1 à 7h45 jeudi matin - a connu l'enfer pendant 15 mois. Il a raconté son calvaire dans un livre "Ma compagne, mon bourreau" (Michalon). Jeudi, son ex-compagne, Zakia, 43 ans, sera jugée à Paris pour "violences, menaces et intimidations et escroqueries". Selon son avocate, elle était à l'époque des faits psychologiquement malade sans suivre de traitements médicaux adaptés. Aujourd'hui, soignée, elle est placée sous contrôle et risque jusqu'à 5 ans de prison.

Timide, courtois, Maxime Gaget dit attendre du procès des réponses pour comprendre ce qui lui est arrivé et l'aider à dépasser son traumatisme. "L'histoire de Maxime Gaget nous rappelle que la violence n'a pas de sexe", souligne le psychanalyste Alain Legrand, directeur du centre "SOS Violences Familiales" qui l'a suivi à Paris.

Une romance qui vire au cauchemar. Sous le coup d'une rupture sentimentale, le jeune informaticien provincial rencontre Zakia en 2007 via un forum de discussion où il joue les modérateurs. Sept mois après sa rencontre avec la mère de famille algérienne au RMI, séparée, il emménage avec elle et ses deux enfants dans un studio parisien de 25 m2.

D'abord surpris par "son langage cru" et sa "démarche de camionneur", il évoque une attirance "magnétique et irrationnelle" pour cette femme avec laquelle il espère une relation "solide et durable". Mais après deux mois d'un bonheur relatif, leur relation vire au cauchemar. Aux premières gifles balancées à l'issue d'une soirée où Zakia avait mélangé alcool et cannabis, il ne réagit pas, comme pétrifié. Il tente de s'accrocher à son rêve de fonder un foyer. La suite ne sera qu'une descente aux enfers : coups de poings, de manche à balai, de tabouret, brûlures. Hospitalisé à deux reprises, il explique avoir été agressé dans la rue. Ses absences lui font perdre son travail.

Réduit au rôle d'"esclave domestique" s'occupant des enfants et des tâches ménagères, il est cloîtré dans le studio ou un local extérieur, sauf pour faire les courses. Pour dormir, il est relégué dans l'entrée, à même le sol, interdit de salle de bain et de toilettes. Il est enfermé dans un débarras lorsque sa compagne reçoit d'autres hommes. Privé de ses papiers et cartes de crédit, il est peu à peu dépouillé de ses économies et menacé d'être dénoncé pour atteinte sexuelle sur ses enfants s'il ne se montre pas conciliant.

Sauvé par son beau-frère. C'est le propre frère de Zakia qui donnera l'alerte, craignant que Maxime Gaget ne finisse "dans une petite boîte". "Quand j'ai récupéré mon fils, il était méconnaissable avec son visage tuméfié et c'est au son de sa voix que j'ai su que c'était bien lui. Il était d'une maigreur effrayante, il n'y avait pas un centimètre de son corps sans trace de coups", a raconté son père, Christian Gaget.

Hospitalisé avec huit phalanges cassées, Maxime a également subi des opérations de reconstruction du nez et d'une oreille et s'est vu délivrer 100 jours d'incapacité totale de travail (ITT). L'avocate de Zakia, Me Houria Si Ali, a fait valoir que sa cliente, "bipolaire", "n'était pas vraiment elle-même au moment des faits".

Un homme meurt sous les coups tous les 13 jours. Le livre-témoignage de Maxime Gaget et le procès de sa compagne mettent en lumière un tabou méconnu du grand public : environ 7.000 plaintes d'hommes victimes de violences conjugales sont, en effet, comptabilisées chaque année. Mais "on estime que seuls 2% des faits sont déclarés car les victimes ont trop honte de porter plainte", précise Sylviane Spitzer, fondatrice de "SOS Hommes Battus". "Un homme meurt tous les treize jours sous les coups de celles avec qui il partage sa vie", estime pour sa part Alain Legrand. Par comparaison, une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son compagnon. "Pour certaines femmes, l'homme doit avoir une conduite virile. S'il ne l'a pas, alors la violence est, selon elles, justifiée".

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