Bac : faire remonter les "propos djihadistes", la consigne qui passe mal

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G.S. , modifié à
Plusieurs correcteurs des épreuves d'Histoire assurent avoir reçu pour consigne de faire remonter des propos radicaux aperçus dans les copies. 
LA FRANCE BOUGE

Selon le Snes-FSU, la consigne a été envoyée aux correcteurs du baccalauréat par l'Inspection générale d'histoire-géographie (IG HG). "Bac2016, consigne de l’IG d’HG aux correcteurs : faire remonter les propos antisémites, racistes et djihadistes trouvés dans les copies", a relayé le principal syndicat du secondaire, dans un tweet repéré par Le Monde. "Les enseignants sont des fonctionnaires responsables et compétents qui n’ont pas besoin d’appel à la délation pour accomplir leur travail", s'indigne le SNES-FSU.

"Pas à nous d'alimenter les fichiers 'S'". Selon le quotidien du soir, plusieurs témoignages confirment l'existence d'une telle consigne. Il aurait été demandé à certains professeurs de "faire remonter" à l'inspection les propos radicaux des élèves sur leur copie du bac. Le tout en brisant l'anonymat. "Pourquoi nous demander de scanner la portion des copies contenant les propos en question, et de l’envoyer à l’IPR [l’inspecteur pédagogique régional] avec le numéro d’anonymat du candidat ?", s'interroge ainsi une enseignante.

"Quand j’ai demandé [à un chargé de mission de l'inspection] s’il s’agissait de détecter des jeunes en voie de radicalisation, sa réponse a été positive. Il nous a conseillé de revenir à la réunion suivante avec les copies pouvant poser problème", poursuit une autre. "Ce n’est pas à nous d’alimenter les fichiers 'S'", renchérit une autre professeure.

"Maladresse". Contacté par Le Monde, l'entourage de la ministre de l'Education assure qu'il ne s'agissait pas d'une demande officielle. Les inspecteurs en question auraient "peut-être péché par excès de zèle, faisant preuve de maladresse dans leurs conseils" pour aider les enseignants à corriger les sujets, potentiellement polémiques cette année : l'Histoire du Proche et Moyen-Orient, la seconde guerre mondiale, la guerre d'Algérie, etc.

Reste une question : les propos  "antisémites, racistes et djihadistes" sont-ils nombreux ? Selon les témoignages cités par le quotidien, s'ils sont quasi-inexistants dans certaines académies, ils peuvent être un peu plus présents dans d'autres. "C’est rare mais ça peut arriver : on peut être confronté à un argumentaire xénophobe, un propos hostile aux juifs ou aux immigrés, mais aussi anti-américains, anti-Europe… Le correcteur fait comme il peut, en son âme et conscience", en mettant une note basse pour "hors sujet" par exemple, explique ainsi une enseignante de Créteil.