Assurance chômage: échec de la négociation, l'État reprend la main

© KENZO TRIBOUILLARD / AFP
  • Copié
Gabriel Vedrenne avec AFP , modifié à
Réunis une dernière fois jeudi, les négociateurs de l'assurance chômage ont constaté leur désaccord après le refus catégorique du Medef de moduler les cotisations patronales. 

L'issue était inévitable : les partenaires sociaux ont constaté jeudi l'échec de la négociation sur l'assurance chômage, renvoyant de facto le dossier entre les mains du gouvernement, ont annoncé les négociateurs syndicaux, vingt minutes après avoir entamé l'ultime séance. Les négociateurs sont parvenus à un "constat de désaccord", a indiqué à la presse Patricia Ferrand, vice-présidente de l'Unedic et membre de la délégation CFDT. Une information confirmée par les négociateurs de la CFTC et de la CGT.

Pourquoi ça coince. Chômage de masse, multiplication des contrats précaires, etc. : le régime d'Assurance chômage est en déficit chronique, avec une dette qui devrait atteindre 33,6 milliards d'euros fin 2017. Les partenaires sociaux négocient donc depuis fin février une réforme de l'assurance chômage pour tenter de le faire revenir à l'équilibre.

Tous les syndicats réclamaient, sous des formes diverses, de moduler les cotisations sociales, et donc patronales, en fonction du type de contrat : la CGT proposait une surcotisation générale, FO et la CFE-CGC préconisaient un système de bonus-malus pénalisant les entreprises qui abusent des contrats courts, tandis que la CFDT et la CFTC privilégiaient une dégressivité des cotisations selon la durée dans l'emploi (CFDT, CFTC). En face, le patronat ne voulait pas en entendre parler.

Pointé du doigt, le Medef réagit. L'intransigeance de l'organisation patronale a d'ailleurs été très critiquée à l'issue de cette réunion de la dernière chance. "L'attitude du patronat a conduit au blocage", alors que "des mesures ambitieuses étaient sur la table pour rééquilibrer les comptes du régime", notamment "pour éviter le recours parfois abusif aux contrats très courts", a réagi la ministre du Travail Myriam El Khomri. Dans un communiqué commun, la CFTC et la CFDT ont considéré que "le patronat (avait) fait le choix aujourd'hui de l'échec de la négociation du régime d'assurance chômage, essentiellement pour des raisons de conflit interne au Medef". "C'est le Medef qui porte la responsabilité de cet échec" inédit depuis 1982, a renchéri Eric Aubin, le négociateur de la CGT, qui a refusé de signer le constat de désaccord.

De son côté, le Medef se défend en imputant l'échec des négociations au "dogmatisme" des syndicats soucieux de "punir les entreprises" via des hausses de leurs cotisations.

Quelles options pour le gouvernement ? Plusieurs options s'offrent désormais au gouvernement : prolonger l'actuelle convention, qui arrive à échéance le 30 juin, et/ou modifier lui-même les règles du régime. Le gouvernement va "assurer sans délai" la continuité de l'indemnisation chômage en prorogeant la convention actuellement en vigueur au-delà du 30 juin, a annoncé jeudi le ministère du Travail. Mais en prorogeant en l'état la convention actuelle, le gouvernement tire un trait, au moins temporairement, sur sa promesse faite à Bruxelles de réaliser 1,6 milliard d'euros d'économies d'ici à fin 2017.

Le gouvernement "transposera dans les règles de l'assurance chômage" l'accord intermittents signé le 28 avril, a également annoncé le ministère. Le projet de décret sera transmis au Conseil d'Etat d'ici la fin du mois de juin et publié au journal officiel d'ici la mi-juillet.