Affaire Rémi Fraisse : justice militaire ou ordinaire ? Les Sages devront trancher

Le Conseil constitutionnel a trois mois pour se prononcer.
Le Conseil constitutionnel a trois mois pour se prononcer. © AFP
  • Copié
avec AFP , modifié à
Jean-Pierre Fraisse, père du jeune militant économiste tué en 2014, a obtenu de la Cour de cassation qu'elle transmette aux Sages une Question prioritaire de constitutionnalité. 

Un gendarme qui commettrait une infraction en mission de maintien de l'ordre relève-t-il de la justice militaire ? La famille de Rémi Fraisse, tué en 2014 à Sivens par une grenade, a obtenu mardi la saisine du Conseil constitutionnel sur cette question.

En avril 2018, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Toulouse avait rejeté un recours de Jean-Pierre Fraisse, le père du jeune militant écologiste, et confirmé la compétence des juges d'instruction statuant en matière militaire.

Jean-Pierre Fraisse, qui a formé un pourvoi sur ce point de procédure, a obtenu de la Cour de cassation qu'elle transmette aux Sages une Question prioritaire de constitutionnalité (QPC). La question porte sur l'article 697-1 du code de procédure pénale, selon lequel les juridictions militaires sont compétentes pour les "infractions commises dans le service du maintien de l'ordre" par des gendarmes.

Le Conseil constitutionnel a trois mois pour se prononcer. Ses avocats estiment notamment que cet article instaure "une différence de traitement injustifiée entre les parties civiles", contraire à la Loi fondamentale, selon l'uniforme de l'auteur de l'infraction : un gendarme sera jugé par des juges militaires, un policier par des juridictions ordinaires.

Le Conseil constitutionnel a trois mois pour se prononcer.

Sur le fond, le gendarme qui a tiré la grenade a bénéficié en janvier d'un non-lieu. Dénonçant une "justice aux ordres", Jean-Pierre Fraisse avait fait appel, mais cette procédure est suspendue dans l'attente de la décision sur sa QPC, selon une source proche du dossier.

"Une première victoire depuis quatre ans". "Si le Conseil constitutionnel suit notre argumentation, alors c'est l'ensemble de l'instruction qui sera remise en cause, et par conséquent le non-lieu prononcé par le juge d'instruction" statuant en matière militaire, a commenté l'avocat de Jean-Pierre Fraisse à la Cour de cassation, Patrice Spinosi, saluant une "victoire d'étape".

"C'est une première victoire depuis quatre ans, qui relance véritablement l'affaire Fraisse", s'est également félicité un autre des avocats, Arié Alimi.

Rémi Fraisse, âgé de 21 ans, avait succombé à l'explosion d'une grenade tirée par un gendarme lors de violents affrontements sur le chantier de la retenue d'eau controversée de Sivens, le 26 octobre 2014. Trois semaines après sa mort, le gouvernement avait annoncé l'interdiction des grenades offensives à l'origine de ce décès, après avoir suspendu leur utilisation.