Affaire de la sex-tape de Mathieu Valbuena : pourquoi l'enquête pourrait être annulée

Le policier surnommé "Lukas" s'était rapproché des maîtres-chanteurs après la plainte de Mathieu Valbuena (photo d'illustration).
Le policier surnommé "Lukas" s'était rapproché des maîtres-chanteurs après la plainte de Mathieu Valbuena (photo d'illustration). © ROMAIN LAFABREGUE / AFP
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avec AFP , modifié à
La cour d'appel de Paris s'est penchée jeudi sur l'attitude de "Lukas", un policier sous couverture qui s'est fait passer pour l'intermédiaire du footballeur auprès des maîtres-chanteurs présumés dans cette affaire.

Un policier infiltré a-t-il pu inciter des maîtres-chanteurs à réclamer de l'argent à Mathieu Valbuena en échange d'une vidéo intime ? C'est la question examinée par la cour d'appel de Paris, jeudi. L'enjeu est crucial dans le dossier : selon les avocats des six mis en examen, dont l'ancien international français Karim Benzema, les agissements de ce policiers remettent en cause la validité même de l'enquête.

Des mises en examen annulées ? "Je suis con quand je vois tout ça". En novembre 2015, Karim Benzema reconnaît son implication dans l'affaire dite du "chantage à la sextape" visant Mathieu Valbuena, qui coûtera cher aux deux footballeurs - aucun des deux n'a depuis rejoué en équipe de France. En garde à vue, l'attaquant reconnaît qu'il devait "servir d'intermédiaire" entre son ancien coéquipier et l'un de ses amis, Karim Zenati, lui-même en contact avec des maîtres-chanteurs. En jeu : la menace de révéler une vidéo intime de Valbuena, tournée lors d'une fête.

Dans ce dossier, quatre personnes ont depuis été mises en examen, outre Karim Benzema et Karim Zenati. Mustapha Zouaoui, dit "Sata" et Axel Angot, les maîtres-chanteurs présumés, Younes Houass, l'un de leurs intermédiaires, mais aussi le footballeur Djibril Cissé, également soupçonné d'avoir eu connaissance de ladite vidéo. Ces six protagonistes suivront de près la décision de la cour d'appel, qui rendra sa décision le 8 novembre : si l'enquête était invalidée, les mises en examen pourraient être tout bonnement annulées.

Un policier sous couverture. Sur quelle base ? Le comportement d'un septième acteur de l'affaire, un policier sous couverture surnommé "Lukas". Après la plainte de Mathieu Valbuena, ce dernier s'est fait passer pour un "ami proche" du joueur pour approcher les maîtres-chanteurs, devenant leur principal interlocuteur. Les procès-verbaux d'écoutes font état de plusieurs appels entre les deux parties, dont certains à l'initiative de l'enquêteur.

Pour les avocats de la défense, cet officier s'est rendu coupable d'une provocation à l'infraction au cours de ses contacts téléphoniques. C'est le policier qui "initie, relance et propose" un arrangement financier, affirme Me Serge Money, l'avocat de Mustapha Zouaoui. Samim Bolaky, conseil de Younes Houass assure quant à lui que son client n'a pas cherché à joindre "Lukas" pendant près d'un mois, avant que celui-ci ne prenne l'initiative de renouer le contact.

Le parquet pour une validation de l'enquête. L'argument est-il valable ? Dans un premier temps, la cour d'appel de Versailles a considéré que non, validant le déroulé de l'enquête. Mais en juillet 2017, la Cour de cassation a infirmé cet arrêt, donnant raison à la défense et désignant la cour d'appel de Paris pour statuer de nouveau. C'est cette étape de la procédure qui se déroule à huis-clos, jeudi.

Et selon le réquisitoire de l'avocat général, révélé par l'Équipe et consulté par Europe 1, un nouveau revirement de situation n'est pas exclu : estimant que "l'intervention de 'Lukas' aux fins d'établir la tentative de chantage commise jusqu'au 20 juin 2015 et d'en identifier les auteurs n'a pas à être remise en cause", le parquet juge que l'enquête doit aller jusqu'au bout.