Tiers payant : malgré les propositions, les médecins protestent toujours

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avec AFP
L'Assurance maladie et les mutuelles ont présenté mercredi quelques mesures pour simplifier le tiers payant. Mais…

Le tiers payant généralisé sera simple ou ne sera pas. C'est en tout cas ce qu'avait promis à l'origine François Hollande aux médecins libéraux, vent debout contre cette mesure phare de la loi santé. Pour tenter de les rassurer, l'Assurance maladie et les complémentaires Santé ont dévoilé plusieurs solutions, mercredi dans un rapport. "Nous répondons à toutes les exigences des médecins", martèle Etienne Caniard, le président de la Mutualité française. Pourtant, les praticiens sont encore loin d'être convaincus.

Un délai. Le tiers payant, qui doit être généralisé en 2017, prévoit l'avancement des frais du patient lors d'une consultation. En clair, l'Assurance maladie et les complémentaires Santé (mutuelles, institution de prévoyance, assurances) s'engagent à payer directement le médecin, sans que le patient n'ait à mettre la main à la poche. À partir de 2017, tous les médecins auront obligation de s'y plier pour la part "Sécu". Et ils pourront choisir de le faire ou non pour la part mutuelle.

Le hic : les professionnels de Santé redoutent un système trop compliqué, où s'accumuleraient les retards - voire les oublis - de paiement. Dans leur rapport, l'Assurance maladie et les complémentaires s'engagent donc à améliorer les dispositifs existants pour des remboursements fiables et rapides. Toutes se sont engagées à respecter un délai de paiement de maximum sept jours. Et pour s'assurer du respect de cet engagement, les professionnels de santé auront le choix entre deux solutions.

Des moyens de contrôles. La première serait "de les doter d'un système de suivi automatique des paiements" dans leur logiciel, écrit le rapport. Cela leur "permettrait de savoir, pour chaque acte ou consultation réalisée, si sa facturation a bien été émise, reçue, traitée, puis payée" par la Sécu d'une part, et la complémentaire santé d'autre part.

Une autre solution serait de "recourir à un opérateur intermédiaire, pour lui confier la gestion des flux de facturation et des retours avec les organismes payeurs". Le médecin ferait appel à un organisme extérieur, comme actuellement les pharmaciens qui, moyennant une dizaine ou une vingtaine d'euros par mois, voient leurs remboursements gérés par des "organismes concentrateurs tiers" (OCT). Si le médecin souhaite un virement bancaire unique, il pourra le demander à cet organisme, ou à un opérateur financier spécialisé, sous forme de "prestation supplémentaire".

" "C'est un dispositif de plus en plus absurde et kafkaïen" "

Des garantis inconditionnées. Le rapport l'assure également : tout sera mis en œuvre pour éliminer au maximum les rejets de factures. La part Sécu sera quoi qu'il arrive réglée au médecin, même si le patient n'a pas respecté le parcours de soins ou si sa carte Vitale n'est pas à jour.

Pour la part complémentaire, en revanche, le médecin devra lui-même contrôler l'attestation du patient. Et ce jusqu'à la mise en place, d'ici à 2017, d'"un service en ligne intégré" à son logiciel. Un service d'assistance sera également mis en place dès juillet 2016 par l'Assurance maladie. À noter, enfin, que les complémentaires n'excluent pas un système de pénalités financières en cas de retards de paiement.  Mais il n'y a eu aucun engagement clair là-dessus pour le moment.

Mais un rejet des médecins. Le verdict est sans appel : ces propositions ne satisfont pas les médecins. Tout d'abord, ces mesures impliquent quelques investissements de leur part (achat d'un logiciel ou paiement d'un organisme indépendant). La Fédération des médecins de France a ainsi dénoncé "une escroquerie" lors d'une conférence de presse. En outre, au lieu d'un dispositif simplifié, les syndicats retiennent une accumulation de démarches administratives supplémentaires. Pour Jean-Paul Ortiz le président de la CSMF, premier syndicat des libéraux, cité par l'AFP : "l'usine à gaz se confirme". "C'est un dispositif de plus en plus absurde et kafkaïen, qui ne répond pas du tout à une demande de simplification", renchérit dans Le Parisien Claude Leicher de MG France.

Les médecins ne seront-ils donc jamais convaincus ? Selon Les Echos, ils veulent bel-et-bien "enterrer" le tiers payant. "Confiant", Etienne Caniard, de la Mutualité française, veut pour sa part croire qu'"on assistera au même phénomène" que lors du lancement de la  carte Vitale en 1998, décriée puis adoptée par les médecins.