Sida : "les jeunes se protègent au début..."

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POINT DE VUE - Le sexologue Michel Ohayon explique le rapport des jeunes avec le sida.

Les jeunes ont-ils encore conscience des dangers du sida ? Alors qu'a lieu lundi la journée mondiale de lutte contre le sida, la question se pose. Vendredi dernier, une étude d'une mutuelle étudiante réalisée auprès de plusieurs centaines d'étudiants a pointé le relâchement des jeunes face au virus. Les chiffres sont alarmants : 33 d'entre eux ne porte jamais de préservatifs, alors qu'ils étaient 30% un an plus tôt, en 2013. Nous avons demandé à Michel Ohayon, sexologue et directeur du centre de santé sexuelle "Le 190", à Paris, de nous expliquer le rapport des jeunes avec l'épidémie de sida.

Les jeunes se protègent-ils toujours contre le sida ?

On sait que la sexualité débute par un rapport protégé, et ensuite on se protège moins. Les jeunes ont rarement des partenaires multiples. Chez les jeunes adultes hétérosexuels d'une vingtaine d'années, c'est le plus souvent une succession de relations, de rapports monogames. Donc très vite, c'est une histoire de confiance qui revient sur le tapis. On commence alors à parler avec son partenaire, et quand l'un et l'autre se disent "clean", qu'ils n'ont pas le sida, les jeunes enlèvent les préservatifs. Les jeunes adultes gays, eux, n'ont pas le sentiment de moins se protéger. Mais la circulation du virus est davantage liée à l'environnement qu'aux pratiques sexuelles. Le risque d'attraper le sida est bien supérieur pour les homosexuels. Il peut être même jusqu'à 200 fois plus élevé !

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La pornographie a-t-elle une influence sur la propagation du virus ?

C'est un vieil argument. Alors, oui, la pornographie, où on voit des rapports non protégés, a eu une influence sur les pratiques sexuelles, en ce sens qu'elle s'est substituée au cercle familial dans l'apprentissage de la sexualité. Mais beaucoup de gens savent que ce n'est pas la vraie vie et ne confondent pas la fiction et la réalité. A ma connaissance, il n'y a jamais eu de lien précis qui a été établi entre la pornographie et la propagation de l'épidémie. C'est davantage une idée reçue.

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Les jeunes d'aujourd'hui ont-ils une vision différente du sida que leurs aînés ?

Ce qui a beaucoup changé avec l'épidémie, particulièrement chez les jeunes gays, ce sont les smartphones.Il y a maintenant de nombreuses applications de rencontres sur téléphones portables. Grâce à la géolocalisation, il y a rapidement un pseudo-dialogue qui s'engage avec quelqu'un qui se trouve à proximité. Rapidement, l'excitation peut monter et aboutir à un rapport sexuel. Là, encore, la confiance revient sur le tapis. On peut dire qu'on est "clean", mais qu'est ce qui va le prouver ? Rien.