Sida : le "réservoir à virus", nouvel ennemi des chercheurs

Des "réservoirs à virus" du sida s'installent très rapidement dans le corps.
Des "réservoirs à virus" du sida s'installent très rapidement dans le corps. © MAXPPP
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Noémi Marois avec AFP , modifié à
RECHERCHE - Une étude montre que des "réservoirs à virus" du sida s'installent très rapidement dans le corps et résistent aux traitements.

Une étude de la Harvard Medical School, publiée dimanche dans la revue Nature, confirme la capacité du sida à réapparaître dans un organisme après plusieurs années de disparition. Elle vient corroborer un cas similaire apparu chez un bébé américain. Né il y a quatre ans d'une mère séropositive, le bébé avait été déclaré "guéri", après avoir suivi un traitement antirétroviral. Mais il y a deux semaines lors d'un test de routine, la fillette aujourd'hui âgée de quatre ans, a de nouveau été déclarée séropositive. L'étude des chercheurs américains menée sur des singes, vient mettre en lumière la grande rapidité avec laquelle le sida se loge dans des "réservoirs" pour réapparaître quand les traitements cessent. 

Une planque dans le système immunitaire. La force du virus du sida réside en sa capacité à intervenir dans notre système immunitaire. Il est capable de s'introduire dans les lymphocytes B,  ceux-là mêmes qui produisent les anticorps. Le virus s'y multiplie et au final, les fait mourir. 

Mais le virus s'introduit aussi dans d'autres lymphocytes, les lymphocytes T quand ils sont "dormants". Quand le VIH y est installé, il ne se multiplie pas, n'est plus actif. Il "dort" lui aussi. Le lymphocyte T devient alors un "réservoir viral". 

Une constitution de "réservoirs" très rapide. Les chercheurs de la Harvard Medical School ont inoculé à 20 macaques le VIS (la version du VIH chez les singes). Surprise, les "réservoirs à virus" se sont constitués moins de trois jours après l'infection alors que le VIS était  invisible dans leur sang. Les 20 primates ont ensuite été traités aux antirétroviraux, 3 jours, 7 jours, 10 jours ou 14 jours après l'inoculation. 

L'étude aboutit au même résultat pour les 20 singes. Quand le traitement est arrêté au bout de 24 semaines, l'infection virale réapparaît. Seule différence, le virus met plus de temps à réapparaître chez les macaques ayant été traités 3 jours après l'inoculation.

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Succès et limites des antirétroviraux. Les antirétroviraux  sont des médicaments qui empêchent le virus du sida de s'introduire dans l'ADN de nos cellules. Ils se prennent sous forme de trithérapie, c'est-à-dire en associant trois médicaments. 

Ce traitement a rencontré un succès certain car il fait disparaître le virus du sang et limite énormément les risques de transmission. Mais il est impuissant à éradiquer les "réservoirs à virus".

Et quand le patient cesse son traitement, le virus finit par sortir de son sommeil, il quitte alors son "réservoir" et s'attaque de nouveau au système immunitaire. C'est ce qui est arrivé au bébé américain. 

Vous l'aurez compris, sans les "réservoirs à virus", l'épidémie de sida pourrait être stoppée. 

Un "défi nouveau". L'installation en moins de trois jours de ces "réservoirs" est "un défi nouveau et important pour les stratégies d'éradication du VIH", selon les chercheurs américains. Ces "sanctuaires" à virus constituent désormais l'obstacle le plus important à l'élimination totale du VIH. Une part importante de la recherche actuelle sur le sida se focalise sur ce dernier bastion de résistance.

Quelles pistes pour éradiquer les "réservoirs à virus" ? La recherche explore deux pistes pour éradiquer ces réservoirs : le vaccin thérapeutique et la thérapie génique. 

Mais il existe des obstacles. Ces "réservoirs à virus" sont en effet très peu nombreux (ils concernent 1 lymphocyte T sur 1 million) et ils n'ont pas de marqueur génétique permettant de les isoler. Par conséquent, les recherches actuelles portent sur des "réservoirs à virus" in vivo, c'est-à-dire reconstitués en laboratoire.