Ce neurochirurgien qui opère les cerveaux sans anesthésie

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Thomas Sotto et , modifié à
INTERVIEW E1 - Le neurochirurgien Hugues Duffau revient sur les bienfaits de la chirurgie éveillée. 

Le professeur de neurochirurgie au CHU de Montpellier Hugues Duffau a mis au point il y a 17 ans la "chirurgie éveillée". Il vante les bienfaits de cette technique pour traiter les tumeurs au cerveau. "Le cerveau ne peut pas ressentir sa douleur", explique-t-il mercredi sur Europe 1. "Le patient nous aide à chaque instant en nous disant, dans le bloc, si on peut continuer à opérer, à enlever plus de tumeur, ou s'il faut s'arrêter". 

Des tests tout au long de l'opération. Les patients atteints d'une tumeur au cerveau sont donc réveillés. "Il n'y a plus d'anesthésie car quand on opère un patient du cerveau, on souhaite préserver sa qualité de vie", argumente le professeur Hugues Duffau. "Il faut repérer les zones à éviter pour ne pas générer de séquelles". Très concrètement, "il y a une participation très importante de neuropsychologues et orthophonistes. On présente des tests au patient pendant l'opération, nous avons donc un retour permanent pour savoir si on arrive dans une région à risque, s'il faut s'arrêter, s'il faut continuer". 

"Deux langues sacrifiées au bloc". Comment bien expliquer la chirurgie éveillée ? En racontant quelques souvenirs d'opération. "On a testé chez une pianiste ses aptitudes à parler plusieurs langues", se souvient le professeur de neurochirurgie au CHU de Montpellier Hugues Duffau pour Europe 1. "Il y a différents circuits dans le cerveau qui correspondent à différentes langues. Elle parlait cinq langues, le russe, l'anglais, le français, l'italien et l'espagnol. J'ai été obligé de lui demander de choisir entre 3 et 4 langues, on les a séléctionnées avec sa famille pour sa vie après l'intervention. Pour la soigner, il a fallu sacrifier deux langues". Et d'ajouter : "on l'a fait à la carte !". Cette technique porte bien son nom : "la cartographie fonctionnelle individuelle".

Une technique qui devrait se développer. "Cette méthode est de plus en plus connue", estime le neurochirurgien Hugues Duffau au micro Europe 1. "J'ai eu l'occasion de former 300 centres de neurochirurgie dans 45 pays en 17 ans ! Ils reproduisent les mêmes résultats : en dehors de 1% d'aléas, 99% des patients récupèrent après l'intervention chirurgicale".