Yvan Colonna jugé pour l'assassinat du préfet Erignac

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
Yvan Colonna comparaît à partir de ce lundi devant la cour d'assises spéciale de Paris pour l'assassinat du préfet de Corse Claude Erignac en 1998, le crime politique le plus grave en trente ans de violence sur l'île. L'accusé risque la perpétuité.

L'assassinat du préfet Erignac en Corse était et demeure sans précédent. Arrêté en juillet 2003 en Corse après quatre ans de fuite, Yvan Colonna, jugé à partir d'aujourd'hui devant les assises de Paris, est présenté par l'accusation comme celui qui, au sein d'un commando de six hommes, a fait feu à Ajaccio le 6 février 1998. Le berger du village de Cargèse, 47 ans, risque la perpétuité.

L'affaire a déclenché une des plus vastes enquêtes de police jamais menées dans le pays, avec quelque 400 arrestations. La procédure judiciaire, chaotique et riche en polémiques, en est à son troisième procès. Cette nouvelle audience, qui doit durer un mois, se déroulera sous tension, les indépendantistes corses présentant l'accusé comme innocent et même victime du système judiciaire. Emboitant le pas à Yvan Colonna, qui a vainement poursuivi en justice Nicolas Sarkozy en avril dernier pour "atteinte à la présomption d'innocence", ils ont engagé une campagne de soutien et d'affichage en Corse, avec l'appui de la Ligue des droits de l'homme. A propos de l'assassinat, les principaux dirigeants nationalistes, qui entendent venir au procès, expliquent depuis l'origine qu'ils "condamnent l'acte mais pas ses auteurs". A Paris, autour de la cour composée de sept magistrats professionnels, d'importantes mesures de sécurité sont prévues.

Claude Erignac a été abattu de trois balles dans la tête alors qu'il venait de garer sa voiture près du théâtre Le Kalliste, où son épouse l'attendait pour un spectacle. La justice est parvenue à ce jour à condamner en 2003 six responsables certains du crime, qui ont reconnu les faits. Il s'agit d'un groupe de nationalistes dissidents de Cargèse, qui voulait "refonder" la cause indépendantiste. Ce groupe avait revendiqué l'attaque de la gendarmerie de Pietrosella en 1997, où a été volée l'arme qui devait servir à tuer le préfet. C'est au printemps 1999 que ces six hommes, amis d'Yvan Colonna, ont été arrêtés, des experts étant parvenus à isoler et identifier toutes les communications téléphoniques passées sur leurs téléphones portables sur la scène du crime. Cet élément matériel capital implique cinq protagonistes, mais pas Yvan Colonna, qui n'a pas utilisé de portable. Et ce point de l'enquête pose un problème à l'accusation. En effet, ces hommes, tout en admettant toujours leur propre implication, sont revenus sur leurs déclarations de 1999 où ils accusaient pour cinq d'entre eux leur ami berger. Ils disent désormais qu'Yvan Colonna est étranger à l'affaire. Un d'entre eux, Pierre Alessandri, dit être le "vrai" tireur. Les autres refusent de détailler le scénario des faits.

La défense d'Yvan Colonna, forte des quatre avocats Antoine Sollacaro, Pascal Garbarini, Gilles Simeoni et Yves Dehapiot, entend donc plaider l'acquittement. Elle s'appuiera sur l'acquittement en appel des deux supposés "commanditaires" du crime, Jean Castela et Vincent Andriuzzi, blanchis en février 2006 après un procès catastrophique pour la police. Les avocats estiment que la fuite d'Yvan Colonna ne prouve rien puisque dans un entretien à TF1 juste avant cette "cavale", dans une lettre envoyée à la presse corse et dans tous ses interrogatoires, le berger de Cargèse s'est toujours dit innocent.