Valls, porte-parole et dircom du gouvernement ?

Manuel Valls est allé jusqu'à placer lui-même ses ministres derrière lui, lors de la conférence de presse qui a suivi le Conseil des ministre.
Manuel Valls est allé jusqu'à placer lui-même ses ministres derrière lui, lors de la conférence de presse qui a suivi le Conseil des ministre. © Reuters
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C'EST MOI QUI PARLE - Le Premier ministre a innové mercredi, en s'exprimant, lui-même, en salle de presse, dès la sortie du Conseil des ministres.

Manuel Valls continue de mettre en œuvre sa méthode "anti-couacs". Le Premier s'est livré mercredi à un exercice exceptionnel, en s'exprimant, lui-même, en salle de presse, dès la sortie du Conseil des ministres, en lieu et place du porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll. Le chef du gouvernement est venu présenter directement les mesures de son plan d'économies de 50 milliards. Et rien n'a été laissé au hasard.

Soigner la photo. Pour donner l'image d'une "cohérence" longtemps parue absente sous le gouvernement Ayrault, Manuel Valls est allé jusqu'à placer lui-même ses ministres derrière lui, afin qu'ils apparaissent derrière les caméras et donnent l'impression de le soutenir. Le Premier ministre voulait faire passer un message : les économies seront faites, sans remise en cause du "modèle sociale" français.

La scénographie a donc été orchestrée au millimètre, et les ministres choisis pour l'occasion : Marisol Touraine (Affaires sociales), Michel Sapin (Finances), Christian Eckert (Budget), et Marylise Lebranchu (ministre de la Réforme de l'Etat) ont été soigneusement alignés derrière lui. Et les journalistes n'ont eu le droit à aucune question.

Inédit. Plusieurs politicologues, interrogés par Europe1, assurent qu'une telle intervention du chef du gouvernement, dans la salle de presse réservée au compte rendu du Conseil des ministres, ne s'est jamais produite. Comme le rappelle Le Lab, Jean-Marc Ayrault avait déjà, lui, innové en s'exprimant plusieurs fois à l’issue du Conseil des ministres. Mais il l’avait fait depuis le perron de l’Élysée. Idem pour François Hollande, qui était notamment intervenu depuis la salle des fêtes lors de l’affaire Cahuzac.

Valls veut être "sur tous les fronts". Pour le politologue Olivier Duhamel, cela exprime une "volonté de monter au créneau sur tous les fronts" de la part de Manuel Valls. "Il veut monter en première ligne, y compris à la place de l'Elysée, cassant ainsi la tradition de la Ve République. Et ce qui est surprenant, c'est que François Hollande le laisse faire. Car Manuel Valls doit avoir son feu vert pour organiser une pareille intervention", décrypte le spécialiste, contacté par Europe1.fr.

Depuis la prise de ses nouvelles fonctions, en effet, l'ex-ministre de l'Intérieur semble avoir pris la main sur toute la communication de l'exécutif.  "J'ai dit au président de calmer ses collaborateurs, il ne doit pas y avoir d'interférence entre l'Elysée et Matignon", aurait carrément déclaré Manuel Valls à un ministre, selon l'Express.  "Le type qui habite Matignon n'est plus un Premier ministre selon la représentation que l'on en a longtemps eue. François Fillon fut le chef de cabinet de Nicolas Sarkozy, Jean-Marc Ayrault l'attaché parlementaire de François Hollande, Manuel Valls est pour l'instant son directeur de communication", résume également un "hiérarque" du PS dans les colonnes du magazine.

Au PS, une fronde se forme. Dans les rangs socialistes, cette conférence de presse express n'a pas été du goût de tous. "Méthode surprenante, les députés socialistes découvrent en réunion de groupe via la télévision les décisions du gouvernement", a ainsi déploré le député Michel Pouzol sur Twitter. "Sur la forme, on prend de vitesse la majorité parlementaire pour la mettre devant le fait accompli alors qu'on nous avait promis un dialogue en amont", a renchéri le député Christian Paul.

Mais pour d'autres, si Manuel Valls préfère prendre la parole lui-même, et vite, sur des sujets si sensibles, c'est pour éviter que l'information sorte dans la presse avant sa présentation officielle. Et qu'elle soit mal interprétée. Comme le résume le député PS Dominique Raimbourg, "pas du tout choqué sur la forme" : "On avait eu une explication avec le Premier ministre le matin de sa déclaration de politique générale, cela vaut dialogue avec le groupe. Pour ce genre d'annonces, il faut éviter les fuites".

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