À Matignon, une passation de pouvoir chaleureuse entre deux Normands

Bernard Cazeneuve a accueilli son successeur à Matignon, lundi après-midi.
Bernard Cazeneuve a accueilli son successeur à Matignon, lundi après-midi. © AFP
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M.L , modifié à
Édouard Philippe a officiellement succédé à Bernard Cazeneuve comme Premier ministre, lundi. Malgré leurs différences d'opinion, les deux hommes ont mis l'accent sur leurs points commun et le respect mutuel qui les unit. 

Il aura fallu attendre toute la matinée pour que l'Elysée confirme son nom. Mais une fois la nomination d'Édouard Philippe, maire LR du Havre de 46 ans, officialisée au poste de Premier ministre, les choses sont allées très vite, lundi après-midi. Moins d'une heure après l'annonce du secrétaire général de l'Elysée, ce proche d'Alain Juppé s'est présenté à Matignon avec quelques minutes d'avance sur l'horaire de la passation de pouvoir, prévue à 16 heures. 

Une "relation personnelle d'amitié". Tapis rouge, représentants de la Garde républicaine et micros pour le ministre sortant et son successeur... Toute la journée, techniciens et jardiniers s'étaient activés dans la cour pour préparer l'arrivée du nouveau chef du gouvernement. À peine descendu de voiture, ce dernier a été chaleureusement accueilli par Bernard Cazeneuve, sous un beau soleil et devant quelques centaines de spectateurs, principalement employés du ministère. Les deux hommes ont ensuite échangé une longue poignée de mains avant de s'engouffrer dans le bâtiment.

" Les Normands sont violemment modérés, c'est à dire qu'ils sont imprégnés de l'esprit de sagesse  "

Leur entretien aura duré moins de trente minutes, deux fois moins longtemps que celui entre François Hollande et Emmanuel Macron, dimanche. Mais c'est dans une ambiance chaleureuse que Bernard Cazeneuve et Édouard Philippe ont redescendu, souriants, les marches de l'hôtel de Matignon. Le sortant, ancien maire de Cherbourg a pris la parole pour évoquer la "relation personnelle d'amitié", entre les deux hommes, résultant de leurs "attaches normandes". Et de citer Alexis de Tocqueville, "qui disait que les Normands sont violemment modérés, c'est à dire qu'ils sont imprégnés de l'esprit de sagesse." 

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Une longue ovation. Visiblement ému, Bernard Cazeneuve est ensuite revenu sur sa "fierté" d'avoir occupé différents ministères tout au long du quinquennat, évoquant, comme une évidence, les nombreux attentats survenus alors qu'il était ministre de l'Intérieur, et "qui ont plongé notre pays dans un immense chagrin". Le Cherbourgeois a encore estimé que "l'histoire" reconnaîtrait la pertinence des choix du quinquennat Hollande, dont les résultats "commencent à se faire jour". Un discours bienveillant et longuement applaudi, y compris par son successeur. 

" J'ai été heureux de voir que la République vous confiait des responsabilités "

À son tour invité à s'exprimer, Édouard Philippe a, lui aussi, souligné ses points communs avec son prédécesseur : "les Normands sont certes violemment modérés, mais ils sont aussi conquérants. Vous êtes totalement normand, et moi aussi", a-t-il glissé dans un clin d'oeil à Bernard Cazeneuve. Le maire du Havre a ensuite rappelé son admiration pour un homme au parcours ministériel "exceptionnel", allant jusqu'à évoquer un "exemple".

"Merci et bon vent". "J'ai été heureux, alors même que j'étais député de l'opposition, de voir que la République vous confiait des responsabilités. Alors même que vous êtes un homme de gauche et que je suis un homme de droite, nous avons l'un pour l'autre de l'estime", a encore affirmé le nouveau Premier ministre, proche d'Alain Juppé, lui-même locataire de Matignon il y a une vingtaine d'années. "Vous avez constitué un exemple, et un exemple de caractère", a-t-il conclu. "Merci, et comme on dit chez moi au Havre, bon vent." 

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Une nouvelle poignée de mains et une nouvelle ovation plus tard, Bernard Cazeneuve est monté en voiture, tournant le dos à un quinquennat dont il restera l'une des figures phare. Alors qu'une DS de collection, modèle affectionné par le ministre sortant, avait été aperçue dans la cour de l'Elysée en fin de matinée, c'est finalement à bord d'une berline grise qu'il a quitté la rue de Varenne. Après avoir pris le temps de serrer quelques mains, Édouard Philippe est, lui, rentré dans "son" hôtel en petites foulées, rappelant la démarche d'Emmanuel Macron à l'Elysée, dimanche.