Marine Le Pen vs Bruno Gollnisch

On connaîtra ce week-end le nom du successeur à Jean-Marie Le pen à la tête du Front national.
On connaîtra ce week-end le nom du successeur à Jean-Marie Le pen à la tête du Front national. © Reuters
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Plana Radenovic , modifié à
L’un deux succèdera à Jean-Marie Le Pen la tête du FN ce week-end. Portraits croisés.

Le nom du nouveau président du Front national sera annoncé officiellement ce week-end, au congrès de Tours. Qu’est-ce qui rapproche et différencie Marine le Pen, fille du sortant Jean-Marie Le Pen, donnée grande favorite, de son concurrent outsider Bruno Gollnisch ?

Round 1 : Marine Le Pen, la "télégénique"

Carte d’identité. Marine Le Pen, de son vrai nom Marion Anne Perrine, est née le 5 août 1968 à Neuilly-sur-Seine. Elle est la benjamine des 3 filles de Jean-Marie Le Pen et de sa première épouse Pierrette Lalanne.

Scolarité et diplômes. Marine Le Pen a étudié le droit à l’université d’Assas, à Paris. Elle est titulaire d'un DEA de droit pénal et d'un certificat d'aptitude à la profession d'avocat.

Mandats. La Neuilléenne cultive son ancrage régional, en mettant le cap au Nord. Elle est depuis mars 2010 conseillère régionale du Nord-Pas-de-Calais, et depuis 2008 conseillère municipale d’Hénin-Beaumont. Elle est députée européenne depuis 2004.

Son expérience au FN. Vice-présidente du parti national, elle dirige la liste FN aux dernières élections régionales, en mars 2010. Elle est encartée depuis ses 18 ans.

Les médias. Sur ce plan, la blonde télégénique a plus d’une longueur d’avance sur son concurrent. Marine le Pen sait utiliser les médias, et ils lui ouvrent leurs portes. La veille de la clôture des adhésions, le 10 décembre dernier, elle était, seule, invitée d’Arlette Chabot, sur France 2. Et le lendemain, elle crée le buzz en comparant les prières de rue des musulmans à l’Occupation. Pour Jean-Yves Camus, chercheur à l’Iris, spécialiste de l’extrême-droite, contacté par Europe1.fr, ces deux coups de maître ont été déterminants : "je pense que la fourchette était serrée avant, puis Marine Le Pen a clairement gagné la faveur des adhérents". D’ailleurs, pour les médias, elle a déjà gagné : elle est prévue en duplex de Tours dimanche, sur TF1. Elle sera l’invitée de RMC puis de RTL lundi et mardi prochains.

... contre Bruno Gollnisch et ses "27 années d’engagement"

Carte d’identité. Bruno Gollnisch est également né à Neuilly-sur-Seine, mais 18 ans avant sa rivale : le 28 janvier 1950.

Scolarité et diplômes. Bruno Gollnisch est également juriste, mais son niveau est plus élevé : il est docteur en droit, et professeur à l’université de Lyon. Il est aussi diplômé en langues orientales. Il a étudié à l’université de Nanterre, où il s’est démarqué en s’engageant contre le mouvement de Mai 68. Bruno Gollnisch est un grand connaisseur et amateur du Japon. En 1974-75, il est attaché de recherche à l’université de Kyoto. Et en 1981, il devient professeur de langue et de civilisation japonaise à Lyon.

Mandats. Il est conseiller régional de Rhône-Alpes, depuis 1986, et député européen, depuis 1989.

Son expérience au FN. Membre du FN depuis 1986, il a dirigé la campagne de 2002. Bruno Gollnisch n’hésite pas à mettre en avant ses "27 années d’engagement", sur son blog notamment.

Religion. Un point très important pour le candidat, qui revendique haut et fort son catholicisme.

Round 2 : Marine Le Pen séduit large

Selon Jean-Yves Camus, l’électorat de Marine Le Pen est majoritairement "issu de la classe ouvrière". A l’intérieur du FN, elle parvient, entre autres grâce à son nom, à s’attirer le soutien de nombreux militants, mais elle est boudée par les élites du parti, qui jugent sa ligne pas assez dure. Dans la presse d’extrême-droite, seul le titre Nation Presse lui a témoigné son soutien.

Sur son blog, Marine Le Pen affirme cependant, noms à l’appui, que sa candidature est parrainée par "2/3 des secrétaires départementaux du mouvement". Entre autres, la candidate malheureuse aux régionales en Ile-de-France Marie-Christine Arnautu la soutient. Le Front national de la jeunesse a clairement pris parti pour elle. Une des cadres de ce mouvement de jeunes est d’ailleurs appelée "mini-Marine".

... quand Bruno Gollnisch fidélise

D’après Jean-Yves Camus, l’électorat de Bruno Gollnisch est "plus traditionnel, plus âgé, plus conservateur et plus bourgeois" que celui de Marine Le Pen. Le candidat est soutenu par l’élite du FN, ainsi que par les catholiques intégristes et les courants les plus radicaux de l’extrême-droite. Des soutiens qualifiés de "zozos provocateurs, caricaturaux et anachroniques" par Marine le Pen. Une bonne part de l’entourage de Bruno Gollnisch, dont son bras droit Yvan Benedetti, est issu de l’Œuvre française, un groupuscule antisémite et pétainiste.

Bruno Gollnisch voit sa fidélité à la ligne dure du parti récompensée : les trois principaux journaux d’extrême-droite roulent pour lui. Il s’agit de l’hebdomadaire Minute (hebdo d’extrême droite), le très catholique Présent, et le pétainiste et antisémite Rivarol. Le rédacteur en chef de ce dernier Jérôme Bourbon a d’ailleurs été qualifié de "taliban hystérique" par Jean-Marie le Pen, après avoir traité Marine Le Pen de "démon", et de "Carla Bruni de la droite nationale".

Faute de bénéficier du soutien du Front national de la jeunesse, le candidat a ses propres jeunes, baptisés sobrement Les Jeunes avec Gollnisch.

Round 3 : Marine Le Pen, la "sociale"

Contrairement aux apparences, les programmes des deux rivaux ne diffèrent pas tant que cela. Les deux concurrents prônent la "préférence nationale", s’érigent contre "l’UMPS", c’est-à-dire le système politique en général, et défendent la peine de mort. Leurs divergences se situent sur les plans économique et social.

Selon des informations d'Europe 1, Marine Le Pen axe son programme économique sur la sortie de l'euro, une révolution fiscale, et la relocalisation de l'économie. Plus sociale que Bruno Gollnisch, elle a un discours, très porteur en temps de crise, "anti-mondialisation, parfois anti-capitaliste", explique Jean-Yves Camus.

Au niveau sociétal, Marine Le Pen est plus moderne que son concurrent. Divorcée deux fois, elle n’est pas opposée à l’avortement. Une grande cause de son désamour par les catholiques traditionnalistes. Sur l’immigration, Marine Le Pen focalise ses attaques contre l’islam, au nom de la laïcité. Et elle ne surfe pas du tout, contrairement à son père, sur la vague négationniste et antisémite.

Enfin, Marine Le Pen se voit déjà candidate en 2012 : "sauf à courir à l’échec, il n’est pas possible de dissocier dans le système électoral français le chef du parti et le candidat à l’élection présidentielle", proclame-t-elle dans sa profession de foi. "Si je suis élue, le FN sera le premier parti à avoir un projet et un candidat pour 2012", a-t-elle confié à Europe 1.

... contre Bruno Gollnisch, le catholique libéral

Première chose qu’il fera s’il est élu, instaurer un contre-gouvernement, sur le modèle du "shadow cabinet" anglo-saxon. Le but, "montrer que le FN se pose les bonnes questions, et y apporte les bonnes réponses".

Des idées beaucoup plus libérales que celles de sa rivale : Bruno Gollnisch veut supprimer ISF, le bouclier fiscal, et l’impôt sur le revenu. Sur l’immigration, Bruno Gollnisch suit plus la thématique traditionnelle du Front national, selon laquelle les immigrés créeraient du chômage. Enfin, en bon catholique traditionnaliste, il se proclame contre l’avortement.