Loi Travail : l'Élysée estime avoir gagné le bras de fer

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M.B. et Antonin André
Pour l'exécutif, les manifestations prévues mardi seront certes très suivies, mais la CGT est en train de fléchir.

Le baroud d'honneur d'une CGT prête à plier. C'est ainsi que l'Élysée perçoit la journée de mobilisation contre la loi Travail organisée mardi. Alors qu'une rencontre est prévue vendredi entre Philippe Martinez, leader de l'organisation syndicale, et la ministre du Travail, Myriam El Khomri, la CGT est pourtant bel et bien décidée à frapper fort.

Forte mobilisation attendue. L'exécutif s'attend à ce que la mobilisation soit suivie, le syndicat ayant bien préparé les choses en amont. La CGT a recensé plus de 600 cars affrétés dans toute la France pour permettre aux militants de rejoindre Paris, où un cortège s'ébranlera en début d'après-midi depuis la place d'Italie. En outre, une cinquantaine d'autres manifestations sont prévues en région, selon l'organisation syndicale. Celle-ci espère donc dépasser les chiffres de mobilisation du 31 mars, qui faisaient référence jusqu'ici. Ce jour-là, entre 390.000, selon les autorités, et 1,2 million de personnes, selon les organisateurs, avaient battu le pavé.

Tournée d'adieux. Mais à l'Élysée, pas question de se laisser impressionner. "Les trains roulent, l'essence coule à flot, les poubelles sont ramassées", se félicite-t-on dans les couloirs du Palais. Il y flotte comme un air de légèreté après trois mois et demi de mobilisation contre la loi Travail. L'exécutif estime que le bras de fer est gagné et que la CGT, sur le point de reculer, fait sa tournée d'adieux mardi. François Hollande a joué la stratégie de l'usure, du lent déclin de la mobilisation. Et dit et répète que "la loi Travail passera", persuadé que, d'ici plusieurs mois, son bilan en sera crédité. On lui reconnaîtra d'avoir tenu bon, et la primauté de l'accord d'entreprise sur l'accord de branches, point clef de la loi El Khomri, marquera le quinquennat du sceau du réformisme.

Philippe Martinez affaibli. Si l'Élysée est persuadée que le dénouement du conflit est proche, en dépit de la programmation de deux autres journées d'action par la CGT à la fin du mois de juin, c'est qu'il observe un changement de comportement chez Philippe Martinez. En mars, lors de la première phase du conflit, le leader de la CGT refusait systématiquement de venir au ministère du Travail pour discuter. À l'époque, il ne voulait voir que le président de la République et posait un préalable : le retrait de la loi Travail. Aujourd'hui, ce retrait n'est plus un préalable. Philippe Martinez accepte de voir Myriam El Khomri, qui ne lui réserve en rien un traitement d'exception. La ministre du Travail le reçoit, comme elle a reçu Jean-Claude Mailly, de FO, vendredi dernier, et Laurent Berger la semaine d’avant. Aucune faveur pour Philippe Martinez, donc, contrairement à ce dont ce dernier se targue auprès de sa base.

Perdant-perdant. Difficile de dire, néanmoins, que la CGT a perdu et le gouvernement gagné ce bras de fer de plusieurs mois. Sept Français sur dix ont une mauvaise opinion de Philippe Martinez, et autant rejettent la loi Travail. Les quatre mois de conflit imposés pour une loi mal conçue, que la majorité de la population désapprouve, se soldent par un bilan perdant-perdant. Personne n'en tirera un crédit politique. Pour preuve, Manuel Valls, qui comptait sur le texte pour peaufiner son image de réformateur, a battu ces dernières semaines son record d'impopularité dans l'opinion.