Les Républicains : les trois grands chantiers de Wauquiez

© BORIS HORVAT / AFP
  • Copié
, modifié à
Le nouveau président des Républicains a emporté une large victoire dimanche soir. Mais il doit désormais faire face à des chantiers considérables, dont le succès n’est pas garanti. 

Une élection dès le premier tour, près de trois quarts des voix reçues (74,64%), une participation plus large qu’attendu… La soirée de dimanche avait tout du triomphe pour Laurent Wauquiez. Le tout nouveau président des Républicains aurait pourtant tort de s’endormir sur ses lauriers. Car tout reste à faire. Le président d’Auvergne-Rhône-Alpes doit s’entourer, rassembler, définir une ligne, préparer les prochaines échéances électorales. Autant de chantiers qui seront parfois aussi des chausse-trappes pour celui qui ne cache pas son ambition présidentielle. Pour l’instant, 2022 reste encore très loin.

  • Nommer une équipe dirigeante

Il s’agit du premier chantier pour Laurent Wauquiez : s’entourer à la tête du parti. "Nous allons tout reconstruire. Nous allons tout renouveler, avec des nouveaux visages", a-t-il lancé au soir de sa victoire. Plusieurs noms circulent déjà avec insistance. La nomination, en tant que vice-présidente, de la juppéiste Virginie Calmels, plus grosse prise de guerre de la campagne, a tout du secret de Polichinelle. La première adjointe d’Alain Juppé à Bordeaux devrait selon toute vraisemblance être flanquée d’un autre vice-président en la personne de Guillaume Peltier. Un tandem aux antipodes idéologiquement, qui illustrera le grand écart qui a actuellement cours chez LR.

Ces deux-là ne sont toutefois pas des inconnus, comme le directeur de campagne Geoffroy Didier, qui devrait lui aussi se voir confier un rôle. Les autres futurs membres de l’équipe dirigeante sont eux effectivement des nouveaux visages. On parle ainsi de Gilles Platret, maire de Chalon-sur-Saône, et porte-parole du candidat Wauquiez, du maire de Châteauroux Gil Averous ou encore des députés Damien Abad et Emilie Bonnivard. Autant de personnalités qui devront se faire un nom auprès du grand public. Si l’omniprésent Laurent Wauquiez leur laisse un peu de place dans la lumière.

  • Rassembler sa famille politique

Ce chantier va de pair avec le premier. Jugé très clivant, jouissant volontiers d’une réputation de tueur en politique, Laurent Wauquiez devra parvenir à rassembler autour de lui. "Le deuxième message consistera à rassembler, tendre la main, proposer à tout le monde de venir à bord pour arriver à remettre la droite ensemble", explique-t-il lundi dans Le Figaro. Ce n’est pas gagné, tant le nouveau président de LR suscite parfois le rejet, voire la haine, parmi ses camarades.

Il suffit de relire Jean-François Copé, début septembre dans Marianne : "Sarkozy avait viré les non-sarkozystes, Fillon avait viré les non-fillonistes et Wauquiez virera les non-wauquiezistes, c’est-à-dire tout le monde, puisque tout le monde le hait!", assénait l’ancien président de l’UMP. Tour à tour, Valérie Pécresse ou Xavier Bertrand ont publiquement fait part de leurs réticences à voir leur collègue président de région prendre la tête de leur mouvement. Laurent Wauquiez, cela dit, a une chance : sa large victoire le légitime. Pour ses détracteurs, il faudra se rallier, se taire, ou partir.

"On va mettre en observation Laurent Wauquiez". Pour l’heure, aucun ténor n’a franchi le pas, en rejoignant par exemple Agir, le parti fondé par certains Constructifs. Mais d'aucuns s’interrogent tout haut. "Est-ce que je vais rester dans ce parti? Je n'en sais rien, je vais voir après la période des fêtes de Noël qui est propice à la réflexion", a  ainsi affairé l’ancien ministre des Transports Dominique Bussereau sur Sud Radio. Jean-Pierre Raffarin a résumé sur France Inter l’état d’esprit de beaucoup : "On va mettre en observation Laurent Wauquiez. Elle sera vigilante, une observation vigilante. Je n'ai pas aimé la campagne de Laurent, mais je le crois capable d'évoluer."

L’UDI est elle prête à ouvrir ses bras. En cas de victoire de Laurent Wauquiez, "il n’y aura plus d’alliance avec Les Républicains", avait prévenu Jean-Christophe Lagarde le 8 décembre dans Le Parisien. "Je le dis très clairement. (…) Ce n’est plus possible. Ce qui n’empêchera pas de travailler avec des personnalités qui partagent nos valeurs", disait aussi le dirigeant centriste, citant Christian Estrosi, Dominique Bussereau, Valérie Pécresse ou Xavier Bertrand. Le nouvel homme fort des Républicains devra donner des gages de rassemblement. Au risque de provoquer une saignée.

  • Définir une ligne claire et préparer les européennes

Là encore, ce chantier est lié aux deux précédents. Laurent Wauquiez doit de toute urgence définir une ligne politique qui sied au plus grand nombre. Lui qui a fait une campagne très à droite, qui a été accusé de verser dans l’identitaire et l’euroscepticisme, devra recentrer son propos. "Les Républicains doivent redire qu’il n’y a pas de victoire pour la droite sans le centre et adopter une ligne idéologique qui permette sur plan national comme au plan local une alliance avec le centre", a déclaré Maël de Calan, candidat malheureux, dimanche soir après sa défaite.  

Mettre d'accord Calmels et Peltier. Et la première ligne à clarifier concernera l’Europe. Car l’UE sera au cœur des prochaines élections, en mai 2019. Et il faudra du temps pour réunir sous la même bannière une Virginie Calmels et un Guillaume Peltier. La première, même si elle veut réformer l’Union, adhère au marché ouvert imposé par Bruxelles et ne veut pas remettre en cause l’espace Schengen, quand l’autre plaide pour du "patriotisme économique" et un rétablissement "des frontières migratoires". "Guillaume Peltier, dans cette déclaration, fait un peu de l’antilibéralisme primaire", a réagi lundi sur France Info Virginie Calmels, sans se départir de son sourire. "Nous ne sommes pas exactement en phase. C’est ça qui est intéressant. Il faut qu’il y ait des vrais débats".

Des vrais débats, il y en aura certainement. Et pour Laurent Wauquiez, il ne faudra pas trop tarder à les lancer puis à trancher. Car des européennes mal négociées et sanctionnées d’un mauvais résultat seraient un premier coup d’arrêt aux ambitions, sans limites, du président des Républicains.