Législatives : Les Républicains revoient leurs ambitions (très) à la baisse

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François Baroin craint que les Républicains n'essuient "une très grosse dérouillée" aux législatives.
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En seulement un mois, le parti de la droite est passé de la volonté de contraindre Emmanuel Macron à une cohabitation à la crainte de subir une "dérouillée", selon le mot de François Baroin. 

Le glissement sémantique s’est fait tout en douceur, au fil des jours. Alors qu'après le second tour de la présidentielle, Les Républicains clamaient leur ambition de remporter les législatives et de forcer Emmanuel Macron à une cohabitation, ils sont aujourd'hui beaucoup plus prudents. Ils semblent même redouter une débâcle, à l’image de leur leader François Baroin qui, selon Le Canard Enchaîné, a récemment pronostiqué que son parti allait prendre "une très grosse dérouillée".

  • De l’assurance à la déprime

Voici comment a varié le discours des Républicains en un mois :

- "Nous ne souhaitons pas être la première force de l'opposition, nous souhaitons avoir la majorité pour gouverner le pays". François Baroin dans Le Figaro, le 10 mai

- "Le plus sûr pour avoir une politique de droite et du centre, c'est d'avoir une majorité de droite et du centre". François Baroin, le 16 mai devant des élus LR.

- "Personne n'y croit. Macron aura la majorité absolue. On table, nous, sur 150 à 170 députés, y compris les UDI". Un élu Les Républicains à l’AFP, le 20 mai
 
- "Si nous sommes dans une situation où il n'y a aucune majorité - ce qui peut être le cas - à ce moment-là, on ne va pas décider de bloquer le pays pendant cinq ans", Christian Jacob, le 21 mai sur LCI

- "François Baroin fait un grand travail pour essayer de porter nos 577 candidats mais vous voyez bien que c'est difficile", Thierry Solère, le 30 mai sur Public Sénat.

- "On va prendre une très grosse dérouillée. Je suis comme les taulards, je compte les jours avant la quille." François Baroin dans Le Canard Enchaîné, le 7 juin

  • Ce qui a changé

Scission, épisode 1

Pour espérer l’emporter le 18 juin au soir, il aurait fallu que Les Républicains fassent corps. Mais déjà laminé par l’affaire Fillon, le parti a dû faire face à une première scission dès les jours qui ont suivi le second tour de l’élection présidentielle, le 7 mai. Le 15 mai en effet, une vingtaine de ténors LR signent un appel commun pour répondre à la main tendu par Emmanuel Macron. La fracture est nette, cassante, puisqu’au final, 170 élus LR les rejoindront. Parmi eux : Nathalie Kosciusko-Morizet, Jean-Pierre Raffarin, Thierry Solère, Christian Estrosi ou encore Gérald Darmanin.

Le même Gérald Darmanin qui participera à accentuer cette fracture en acceptant le 17 mai d’entrer au gouvernement au côté notamment de Bruno Le Maire. Deux jours plus tôt, la nomination d’Edouard Philippe à Matignon avait déjà créé force remous au sein des Républicains. Dès lors, deux camps s’affrontent : ceux qui, comme Laurent Wauquiez ou Eric Ciotti, fustigent leurs camarades, et ceux qui sont plus indulgents. Le parti est déboussolé, ce qui était sans doute l’un des objectifs d’Emmanuel Macron en nommant un Premier ministre et des ministres de droite. En tout état de cause, la perspective d’une victoire, déjà improbable, devient chimérique.

La dynamique de LREM

Une scission mortifère donc, combinée qui plus est à une dynamique impressionnante de La République en marche. Les sondages n’en finissent plus de confirmer que les Français ont l’intention de donner à Emmanuel Macron une majorité pour gouverner. Une majorité qui pourrait même être écrasante. Selon un sondage Ipsos-Sopra Steria pour France Télévisions et Radio France publié mardi, La République en marche pourrait obtenir jusqu’à 415 sièges, dans l’hypothèse la plus haute. L’Assemblée accueillant 577 députés, cela laisse forcément peu de places aux autres partis, qui devront se partager moins de 200 sièges. Et si Les Républicains ne seront pas les moins mal lotis, ils risquent bien d’avoir du mal à franchir la barre des 150 élus.

Et les élections anticipées dans les 11 circonscriptions des Français de l’étranger sont venues confirmer cette tendance positives pour LREM. Les candidats de la majorité présidentielle sont arrivés en tête dans 10 territoires sur 11. Et dans la dernière, les deux finalistes, s’ils ne sont pas investis, se réclament tous les deux d’En Marche ! Bref, LREM pourrait faire le Grand Chelem. "On s’attendait à une vague, c’est un tsunami", a résumé Thierry Mariani, qui a obtenu 18,78% des voix dans la 11ème circonscription, contre 54,11% pour son adversaire LREM. Une analyse de sa situation locale qui pourrait bien valoir au plan national dès le premier tour, dimanche.

Scission, épisode 2 ?

Et comme si cela ne suffisait pas, Les Républicains, qui ont acté leur défaite, se déchirent aussi d’ores et déjà sur l’après-législatives. Entre ceux qui plaident pour un travail constructif avec la future majorité, et les tenants d’une opposition totale. "A droite, on n'est pas tous dans une logique de dire que si on n'est pas majoritaire, on sera dans l'opposition et on s'opposera à tout pour bloquer le quinquennat", a expliqué Thierry Solère lundi sur Radio J. Le député sortant des Hauts-de-Seine n’a ainsi pas exclu de créer un groupe distinct à l’Assemblée le cas échéant. "Je ne sais pas, nous verrons comment les choses s'organiseront. J'espère surtout qu'on sera majoritaire à être des députés constructifs et non pas destructeurs".

Les semaines qui suivront le 18 juin s’annoncent donc pour le moins compliquées pour Les Républicains. Sans compter qu’il faudra, à l’issue d’un congrès à l’automne 2017, élire un nouveau président au mouvement.