Législatives : comment Hollande a fait campagne

François Hollande, les limites d'une présidence "normale"
François Hollande, les limites d'une présidence "normale" © MAXPPP
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Hélène Favier , modifié à
LEGISLATIVES - Et si depuis la présidentielle, Hollande n’avait pas cessé d’être candidat ?

Depuis qu’il s’est installé à l’Elysée, il y a trois semaines, François Hollande ne s’est pas franchement épanché sur les législatives dont le premier tour se jouera dimanche prochain. Tradition républicaine oblige, le président Hollande se situe au-dessus des partis et ne prend pas part directement aux batailles électorales. Pas de longs discours donc, mais des mots à lire entre les lignes.

Car, si François  Hollande se prononce peu sur l’échéance de dimanche, son implication dans le scrutin est totale. "Toute son action est suspendue à cette élection. Et pour ne pas la perdre, François Hollande mène une campagne subliminale !", explique à Europe1.fr le politologue Laurent Dubois. Communication verrouillée, mesures symboliques, message rodé : la machine Hollande pour les législatives est, en effet, bien place. En voici ses principaux rouages.

• Une posture anti-sarkozy

Cette "campagne subliminale", François Hollande la mène en creux. "C’est bien simple, on a l’impression que Nicolas Sarkozy n’a pas encore quitté l’Elysée, tant François Hollande joue l’anti-programmation. Il fait de l’anti-Sarkozy à tous les étages : sobriété contre bling-bling", analyse le politologue, rappelant l’obsession de "la normalité" du nouveau président. On a ainsi vu Hollande se déplacer en train ou encore annoncer qu’il ferait lui-même ses courses. Et ses ministres sont au même régime : Cécile Duflot prend le RER et porte des jeans au Conseil des ministres ; Laurent Fabius emprunte des compagnies low cost pour ses déplacements.

En somme, "alors que Nicolas Sarkozy avait chamboulé les codes nommant des ministres d’ouverture, multipliant les déclarations dès les premiers jours de son mandat, François Hollande a, à l’inverse, à cœur de jouer la rupture de la rupture. Il s’exprime peu, ne fait pas de coups", ajoute Laurent Dubois. "Le message qu’il veut faire infuser pour les législatives, c’est que ‘Nicolas Sarkozy appartient au passé’". 

• Une communication verrouillée

Et pas question de déroger à ce discours : toute la communication de François Hollande et du gouvernement dans son ensemble est verrouillée, même ses ministres sont priés de se maîtriser sur Twitter. Dès le premier Conseil des ministres de son quinquennat, le président de la République a, en effet, mis en garde les 34 membres du gouvernement, leur demandant "d'être très attentifs à leur activité numérique". "Pas question de voir apparaître une Nadine Morano rose à quelques jours de l’élection", ironise le politologue.

• Des premières mesures populaires et symboliques

Sur le fond, le verrouillage est tout aussi présent. Favori des sondages, le PS doit, s’il veut l’emporter, gérer la course sans faire de grosses bourdes d’ici la fin du scrutin, le 17 juin prochain. Les premières mesures annoncées par le gouvernement - du blocage des loyers à la revalorisation de l’allocation de rentrée en passant par "un coup de pouce" au SMIC - appartiennent toutes au dossier "réformes populaires". "Pour l’instant, nous n’avons donc eu droit qu’à des mesurettes symboliques qui parlent au peuple de gauche. Les dossiers qui fâchent, eux, sont remisés dans les placards", explique Laurent Dubois. Objectif : éviter à tout prix "un épisode TVA sociale". En 2007, la proposition d’une TVA sociale confessée par Jean-Louis Borloo entre les deux tours avait, en effet, réveillé des électeurs de gauche et une cinquantaine de circonscriptions était passée sous le nez d’une UMP sonnée. 

• Un message rodé

Comme il l'avait fait durant la campagne présidentielle, François Hollande a demandé aux Français de voter utile lors de ces prochaines législatives. "Qu'ils fassent en sorte qu'il y ait une majorité pour le changement", a-t-il exhorté sur France 2, lors de son unique intervention, réclamant une majorité "large", "solide" et "cohérente" à ses concitoyens. En somme, "son message est le suivant : le gouvernement a besoin de vous. Et c’est, en effet, tout l’enjeu de ces élections législatives. Ces élections sont momifiées par la présidentielle - les Français estiment que le grand vote est passé et se désintéressent de celui-ci -, mais, c’est pourtant ici que tout l’action d’un quinquennat se décide", résume Laurent Dubois, précisant "les membres du gouvernement sont donc priés, eux aussi, de diffuser ce message de vote utile relooké".

Pour l’heure, la méthode Hollande semble fonctionner : la gauche est toujours la grande favorite des sondages. "Cette prudence, c’est la force de Hollande. Mais aussi sa faiblesse", ajoute le politologue, "puisque depuis son arrivée à l’Elysée, le nouveau président n’a toujours pas réussi à imposer sa marque. De fait, la présidence Hollande n’a toujours pas commencé".Rendez-vous après les législatives.